Dans de nombreux États, la dépénalisation du cannabis permet aux consommateurs de ne plus se cacher, mais elle n’empêche pas le fléau des drogues de synthèse de se propager.
Des 50 États des États-Unis, 22 ont légalisé l’usage récréatif du cannabis et neuf l’ont décriminalisé. Dans la plupart, la distribution commerciale est légale, mais aussi la culture pour usage personnel. Dans les Dakota, nord et sud, et dans l’Arkansas, l’électorat vient de rejeter la dépénalisation par référendum. Conformément à la tribalité politique typique de l’Amérique, les États qui maintiennent la prohibition, comme le Texas ou le Tennessee, sont souvent ceux qui interdisent l’avortement.
Un grand changement
Depuis novembre 2022, le président Biden pousse le Congrès à révoquer la loi fédérale interdisant l’usage du cannabis. Étant donné que l’État fédéral n’est responsable que de 5% des poursuites judiciaires et que, dans ce domaine, la juridiction fédérale se limite à des parcs naturels et à des installations aéroportuaires et militaires, il s’agit d’une action symbolique destinée à séduire les électorats de couleur, puisque, selon Biden, la proportion de Noirs condamnés pour usage du cannabis est « nettement plus élevée que pour les Blancs ». Il a signé un décret pour gracier tous les condamnés pour possession de marijuana. Leur casier judiciaire réduisant les chances des Noirs de trouver un emploi, le président peut prétendre avoir fait œuvre de justice raciale.
A lire aussi : La multinationale de la coke
Un argument courant en faveur de la dépénalisation est le fait que le cannabis ne soit plus considéré comme une drogue d’introduction. Après des années de disputes à coups d’études et de contre-études scientifiques, il est désormais accepté que la légalisation du cannabis récréatif n’entraîne pas une montée de la consommation de drogues dures chez les adultes. Le pétard pourrait même diminuer la consommation excessive d’alcool !
Crack, héroïne et fentanyl inquiètent autrement les autorités
La dépénalisation représente-t-elle un grand changement ? En Californie, où elle a eu lieu en 2016, la réponse est non. Toute répression a cessé, la culture personnelle est tolérée, et les fermes de cannabis sont entrées dans une étrange semi-légalité. L’usage médical est admis dans 38 États. Il sert comme analgésique ou calmant sous forme de feuilles à fumer ou de pommade à enduire. Selon les statistiques officielles, 78 millions d’Américains ont recours au cannabis, dont 55 millions régulièrement. Le grand changement, c’est que les bobos n’ont plus besoin de cachotteries pour acheter leur dose aux dealers de rue.
A lire aussi : Face à la drogue, la confiscation
En revanche, rien ne change pour les toxicos, surtout des SDF, qui envahissent aujourd’hui les centres-villes de San Francisco, San Diego, Los Angeles, Boston ou Baltimore. Ils sont accros à d’autres drogues comme le crack, l’héroïne et le fentanyl. Le pays croule sous une épidémie de toxicomanie, malgré les efforts de l’État fédéral qui subventionne des programmes de sevrage par méthadone. La légalisation du cannabis permettra-t-elle au moins d’arracher le trafic au crime organisé ? C’est peu probable. Comme les cartels dominent actuellement le commerce, ils seront à même de concurrencer les vendeurs légaux en inondant le marché avec du cannabis illégal à bas prix.