Les étudiants de la Sorbonne et les lycéens parisiens bloquent et saccagent pour protester contre le choix du second tour. Eux, ils voulaient Mélenchon. La solution envisagée ? Interdire de vote les plus de 65 ans, qui plébiscitent les partis établis, et bloquent tout renouvellement, disent-ils. Mais pourquoi en rester là ? se demande notre chroniqueur.
Déprédations, exactions, vols, saccages — particulièrement dans la chapelle de la Sorbonne, étant entendu que le culte de saint Mélenchon doit supplanter celui du Christ. Le rectorat, pour l’instant, évalue les dégâts — « un montant énorme », « plus de 500 000 euros », me dit-on là-bas. Les devis sont en cours pendant que les étudiants n’y sont pas.
Les p’tits jeunes ont courageusement levé le siège dès qu’il fut question de faire intervenir la police — appelée immédiatement par les instances universitaires, mais dont l’intervention a été longuement mise en suspens par l’Élysée. Les étudiants ont alors passé le relais aux organisations lycéennes, qui, intellectuellement confortées par deux ans de cours en pointillés, bloquent une poignée de lycées à Paris — les plus bourgeois, les nantis s’insurgent à moindres frais. « Ni Macron ni Le Pen », les tenants de l’intersectionnalité des luttes refusent le jeu électoral. Désormais, ça se passera dans la rue.
À moins que, comme le suggère le lider maximo, les législatives ne lui donnent une majorité de gouvernement.
Le plus drôle, c’est qu’au même moment, des débats sont lancés pour fixer une âge limite pour le vote des personnes âgées. Après tout, les seniors votent majoritairement Macron, et globalement pour les partis institutionnels. Normal : les vieux partis séduisent les vieux — appelons un chat un chat. En laissant voter les jeunes prioritairement, et les personnes en activité, on élirait Mélenchon dès le premier tour…
L’époque est décidément à la révision constitutionnelle. Au vote censitaire des années 1830 substituons donc un vote déterminé par l’âge.
L’embêtant, c’est que les vieux s’abstiennent fort peu (12%), et que les jeunes pratiquent assidument le refus des urnes (près de 45% sur la tranche 18-24 ans). Peut-être faudrait-il donner aux gamins un double droit de vote, pour compenser leurs pannes d’oreiller les jours de vote ?
Le droit de vote à 18 ans a lourdement contribué à la défaite de Giscard en 1981. Sur ces bases, un droit de vote à 16 ans devrait permettre à Alice Coffin de se retrouver Ministre des apocalypses futures, et à Sandrine Rousseau de diriger celui des Universités.
L’idée d’une interdiction de voter pour les plus de 65 ans s’appuie sur une idée simple : les retraités ne participent plus à la richesse nationale, ils doivent donc être exclus des processus de décision. Mais à ce compte, la tranche 18-24 ans n’y participe guère. Il ne serait peut-être pas mauvais de renouer avec la pratique romaine, qui reculait l’adolescence jusque vers 30 ans.
Evidemment, cela va contre l’égalité des citoyens. Mais avec le pouvoir, on peut faire passer ce que l’on veut. Eviter en tout cas le référendum, le nombre de vieux augmentant sans cesse, au fur et à mesure que la génération du babyboom entre dans le troisième âge.
Mais tout cela, ce sont des arguments piteux. Le plus simple serait de faire comme dans « Soleil vert » : éliminer les gens dès qu’ils ont atteint 65 ans. Faire de l’euthanasie une clef du processus électoral. Ok boomer ! disent ceux qui constituent la « génération connards ». C’est « KO boomer ! » qu’ils s’exclameront bientôt, chaque fois qu’un néo-retraité sera légalement poussé vers la fosse — en musique si vous voulez, comme dans le film de Fleischer : ne parle-t-on pas de « fosse d’orchestre » ?
J’essaie d’en rire, de peur d’avoir à en pleurer, comme Figaro. Savez-vous à quoi l’on distingue un homme intelligent d’un sombre connard ? Il arrive à une belle intelligence d’avoir des éclipses — elle ne s’en relève que plus brillamment. Mais le connard a à cœur de battre sans cesse son propre record, c’est même à ça qu’on le reconnaît. En l’espèce, les « jeunes mélenchoniens » (ont-ils bien réalisé que leur héros septuagénaire devrait être privé lui-même de vote, ou faut-il faire des exceptions ?) ont monté haut la barre.
Aucun « racisme » anti-jeunes dans mon propos. J’en connais qui pensent par eux-mêmes. J’admets qu’ils sont peu nombreux, et qu’ils vocifèrent moins que les crétins. Mais ils existent. L’Education nationale a eu à cœur, depuis quarante ans, d’en réduire le nombre, avec un vrai succès. À nous, les vieux, de ranimer la flamme — et d’envoyer en Camargue les jeunes mélenchoniens, jadotistes et assimilés, pour y récolter le riz et réfléchir à leur destinée. C’est d’une anti-révolution culturelle que nous avons besoin, avec un dirigeant fort qui s’appuiera non sur de jeunes Gardes rouges incultes et fanatisés, mais sur de vieux briscards qui n’ont plus l’âge de penser à eux et peuvent se dévouer pour les autres.
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