Vendredi dernier, le conseiller régional RN de Bourgogne-Franche Comté Julien Odoul découvre une accompagnatrice scolaire voilée dans le public. L’élu prie alors la présidente de région de demander à la jeune femme d’enlever son voile. Que n’a-t-il dit… Depuis, la presse l’accuse de s’en « être pris » à une femme voilée et la présidente régionale n’exclut pas d’engager des poursuites judiciaires. Alors que 66% des Français (Ifop) réprouvent le port du voile par les accompagnatrices de sortie scolaires, une partie de nos élites s’acharne à faire du parti de Marine Le Pen le dernier garant de la laïcité. Entretien avec Julien Odoul.
Daoud Boughezala. Que s’est-il exactement passé le vendredi 11 octobre au Conseil régional de Bourgogne-Franche Comté ?
Julien Odoul. Après qu’une accompagnatrice scolaire voilée est entrée dans l’hémicycle régional, je suis intervenu auprès de la présidente de région Marie-Marguerite Dufay. Je lui ai demandé de bien vouloir demander à cette dame de retirer son voile islamique, qui est un signe religieux ostentatoire. Je l’ai fait au nom des principes républicains et laïques. Contrairement à ce qui a été dit, je n’ai jamais invectivé, encore moins agressé, humilié ou ordonné à cette personne de retirer son voile. Je me suis adressé à la représentante de l’institution républicaine qu’est le Conseil régional pour que nos principes et nos valeurs soient respectés au sein même de l’hémicycle.
Votre petit laïus était donc improvisé ?
Bien sûr. Je ne savais pas qu’une classe allait visiter le Conseil régional, encore moins qu’il y aurait une accompagnatrice scolaire voilée. Par la suite, j’ai appris qu’il s’agissait d’une classe de Belfort venant dans le cadre d’un programme d’éducation civique intitulé « La République et moi ». Via une maison de quartier belfortaine, l’école organise un programme de visite des institutions à destination des enfants. Dans ce cadre, je considère comme extrêmement grave que les enfants soient confrontés à une accompagnatrice voilée car ce n’est pas la République. Il est aussi grave que cette accompagnatrice ait pu entrer dans l’enceinte du Conseil régional avec son voile islamique. Et ce n’est pas un voile anodin puisque Zohra Bitan l’a qualifié ce matin aux « Grandes gueules » de « voile noir du salafisme ». C’est un symbole de l’islam politique et radical. Quelles que soient ses motivations, quand cette dame fait le choix de le porter dans une enceinte de la République, je considère ce geste comme une provocation communautariste et islamiste. Elle ne peut pas ignorer le sens de ce signe qui diffuse un message politique.
« La femme ne porte pas n’importe quel voile ! Le voile noir, c’est synonyme de salafisme ou de wahhabisme ! Par son habit, elle incarne une idéologie que nous ne pouvons que combattre ! » @ZohraBitan #GGRMC pic.twitter.com/EWdNGO7UL2
— Les Grandes Gueules (@GG_RMC) October 14, 2019
Beaucoup vous opposent l’argument de la légalité. Il est vrai que ni la loi de 2004 interdisant le port de signes religieux à l’école ni celle de 2010 prohibant le voile intégrale ne s’appliquent en l’espèce. Quels principes invoquez-vous ? La neutralité ? Une certain sens de la civilité ?
Cet épisode soulève plusieurs débats. Si j’ai une satisfaction, c’est d’ailleurs que le débat soit ouvert, notamment par le gouvernement. Le ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer a prononcé une phrase très importante : le voile n’est pas souhaitable dans la société, y compris chez les accompagnatrices scolaires. Cette question divise le gouvernement puisque Sibeth Ndiaye est sur une ligne opposée.
Polémique #Odoul (cc @JulienOdoul) sur la mère de famille voilée au conseil régional de @bfc_region 👇@SibethNdiaye défend la place des femmes voilées dans les sorties scolaires 🎒
cc @jmblanquer #DIMPOL @letellier_ftv @France3tv pic.twitter.com/IL8Pv4LpGu— DimancheEnPolitique (@DimPolitique) October 13, 2019
D’un point de vue légal, il y a un flou et un vide juridique. Ce vide se situe notamment au niveau du règlement du Conseil régional, qui est une enceinte démocratique, une institution de la République, un cénacle républicain qui doit respecter la neutralité religieuse en son sein. Aucun signe religieux ostentatoire ne devrait être exhibé dans son enceinte. La loi de 2010 sur la burqa sanctionne et interdit la dissimulation du visage mais laisse un flou car le voile islamique (hijab) ne dissimule pas entièrement le visage. Le Rassemblement national milite pour l’adaptation de la législation à l’avancée de l’islamisme dans notre pays : interdisons tous les signes religieux ostentatoires, dont le voile islamique, dans les bâtiments publics et même dans l’espace public, comme le prévoyait le programme présidentiel de Marine Le Pen.
Vous allez un peu vite en besogne. Avant d’interdire le voile dans la rue – ce qui ne serait pas une mince affaire – il faut régler le cas des accompagnatrices de sorties scolaires. Que comptez-vous faire ?
Ce débat doit être rapidement tranché car il est sur la table depuis quelques semaines avec la polémique déclenchée par l’affiche de la FCPE. Il ne peut pas y avoir la neutralité politique et religieuse dans l’enceinte scolaire et du prosélytisme, la diffusion de dogmes et d’idéaux religieux lors des sorties qui sont le prolongement de l’école. En tant qu’élu républicain et laïque, j’ai été récemment choqué par une cérémonie de remise des prix aux lycéens méritants à laquelle j’assistais dans la ville de Sens. Dans cette cérémonie organisée par l’Education nationale vingt-quatre heures après l’attentat de la préfecture, une lycéenne s’est présentée voilée pour recevoir son prix des mains du proviseur. C’est une atteinte manifeste au principe de laïcité. Dans le plus grand lycée de la région qu’est le lycée Janot de Sens, des élèves entrent voilées dans l’enceinte de l’établissement. J’ignore si elles le retirent ensuite en salle de cours mais c’est le même problème : les enceintes scolaires doivent être sanctuarisées et tout prosélytisme proscrit.
J’ai été frappé par les réactions des journalistes. Ce week-end, sur les plateaux télévisés, beaucoup vous ont présenté comme un agresseur, niant l’existence d’un continuum culturel et idéologique entre un certain islam séparatiste et le djihadisme. Que vous inspire l’attitude des journalistes dans cette affaire ?
Il y a eu plusieurs voix. Sur LCI, Olivier Mazerolle a délivré une analyse extrêmement lucide et pertinente sur la définition de l’islamisme et le sens de cette provocation. Judith Waintraub du Figaro et Gabrielle Cluzel de Boulevard Voltaire ont bien exprimé le lien évident entre l’idéologie islamiste et la finalité meurtrière des attentats terroristes.
Le sujet de fond, ce sont les renoncements successifs des pouvoirs publics et de la collectivité devant le communautarisme et l’islamisme, lequel joue très bien des failles de la loi de 1905 et des suivantes. L’islamisme avance par la victimisation et implante peu à peu des règles qui ne sont pas les nôtres.
En 2018, j’avais lancé une campagne en Bourgogne Franche-Comté pour dénoncer les progrès de l’islam radical, notamment les pressions communautaires, les atteintes à notre vivre-en-France dans les lycées, piscines, transports publics, les activités séparées entre hommes et femmes, l’invitation de prédicateurs de haine, les nombreux cas de départ en Syrie etc. On avait mis tous ces faits en relation avec ce que Causeur a appelé « l’islamisme citoyen » lors de l’affaire Mennel Ibtissem.
Rafraîchissez-nous la mémoire…
Cet « islamisme citoyen » est le carburant idéologique et la voiture-balai de l’islamisme. Au nom de l’égalité et d’une laïcité dévoyée, certains inversent les principes républicains pour défendre la liberté de tous les cultes à faire ce qu’ils veulent. Y compris venir au travail voilée, se baigner en burqini, réserver des activités sportives aux femmes et d’autres aux hommes.
Que répondez-vous à l’argument « vivre-ensembliste » qui vous reproche de mettre tous les musulmans dans le même sac en dénonçant ces dérives ?
Une majorité de Français de confession musulmane pratique sa foi dans la sphère privée et en a assez d’être prise en otage par les islamistes. Ils ont besoin d’une parole forte de l’Etat républicain qui, en garantissant des principes comme la laïcité et la neutralité dans les bâtiments publics, renforce le vivre-en-paix, la sécurité et l’intégration. Je ne sombre jamais dans la stigmatisation ou la discrimination. Dans mon discours introductif à l’assemblée plénière du Conseil régional, j’avais d’ailleurs appelé à une société de vigilance et les Français de confession musulmane de se lever et de stigmatiser celles et ceux qui dévoient leur religion. Ceux-là poussent à la guerre civile, au choc des civilisations pour fracturer la société. Tous les Français, et a fortiori ceux de confession musulmane, ont toute leur part à prendre dans le combat contre l’islamisme qui est essentiel pour notre sécurité et pour savoir dans quelle civilisation nous voulons vivre.
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