Avant la nomination de Gabriel Attal à Matignon, Julien Denormandie était sérieusement envisagé pour le poste aux côtés de Richard Ferrand ou de Roland Lescure. L’ancien ministre du Logement (2018-2020) et ministre de l’Agriculture (2020-2022) reste en retrait de la vie politique. Il publie Nourrir sans dévaster (Flammarion), avec Erik Orsenna.
Il y a des personnalités dont on sait tout de suite ce qu’elles valent. Et qui résistent parfois à la profusion d’éloges qu’on a déversée sur elles avant et qui inquiètent les sceptiques. J’ai écouté le 13 février Julien Denormandie, questionné par Jean-Jacques Bourdin sur Sud Radio[1]. Je l’ai trouvé remarquable sur sa conception de la vie politique et sur l’agriculture dont il avait été un ministre très apprécié. Il vient de publier un livre : Nourrir sans dévaster, écrit avec l’Académicien Érik Orsenna – qui a publié un libelle démagogique et faussement courageux il y a un an contre Vincent Bolloré ; on peut le regretter mais personne n’est parfait !
Le François-Xavier Bellamy de la macronie ?
En tout cas, pour qui est passionné par la psychologie des êtres, le courage intellectuel, la vigueur des idées et de leur structuration, la mesure de la forme, la modestie du ton et la nature du caractère, il est évident qu’on a l’intuition immédiate, avec Julien Denormandie, de la qualité d’un être. Précisément parce que celui-ci se dispense des éclats des Matamore et des provocations faciles. Et qu’il sait argumenter sans flatter ni mépriser. Parce que toute posture est refusée et que l’honnêteté domine, qu’aucune arrogance ne cherche à faire croire à une supériorité d’essence parce qu’il a connu le pouvoir et qu’il est très proche d’Emmanuel Macron, il inspire, il rassure. On crédite son verbe et sa sûreté d’une sincérité et d’une conviction évidentes. On perçoit que Julien Denormandie n’est pas l’un de ces politiciens ordinaires prêts à endosser n’importe quelle casaque.
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François-Xavier Bellamy me fait exactement le même effet et la différence des projets compte peu quand au contraire, par exemple, les monologues logorrhéïques de Danièle Obono ou la vivacité piquante d’une Rachida Dati m’ont signifié de suite ce qu’il en était d’elles. Il faut d’autant plus être attentif à ces moments médiatiques avec la profondeur de ce qu’ils révèlent sur les invités que le macronisme dispose d’un vivier assez pauvre. Gabriel Attal et Julien Denormandie, aussi dissemblables qu’ils soient, en représentent deux pépites, l’un dans un effacement intelligent, conscient des risques de l’ambition politique à tout prix et l’autre dans un éclat réactif, allègre et plus que prometteur.
Emmanuel Macron, un exécrable DRH
À quelle personnalité peut-on faire confiance en matière politique, en démocratie ? Comment la choisir ? Il est miraculeux que le président de la République tombe parfois juste dans cet exercice d’évaluation, tant il apparaît souvent comme un exécrable DRH…
Qu’on ne croie pas que la seule politique est concernée par ces fulgurances qui sur-le-champ nous éclairent. Il y a longtemps il ne m’a fallu que si peu de temps pour déceler que l’aura médiatique et mondaine de Claire Chazal flattait pourtant la pire intervieweuse qui soit – et Marc-Olivier Fogiel m’en a voulu de cette vive lucidité. Aujourd’hui l’omniprésence de Léa Salamé demeure un mystère ; son succès est favorisé par cette perversion française : incompréhensible à l’origine, le processus cumulatif le porte à des admirations clientélistes et corporatistes peu explicables.
Il ne me paraît pas indécent de placer sur le même plan le grave et le futile, le superficiel et le profond. Pour le léger comme pour l’important, je déteste l’égarement où l’esprit se laisse corrompre par la mode et la routine. Je n’apprécie pas que les citoyens, quelle que soit leur curiosité, se fassent berner.
Pour terminer sur ma note initiale, je ne surestime pas la preuve par les entretiens mais je confirme cependant que ces trente minutes où j’ai écouté Julien Denormandie me permettent de valider tout le bien que j’ai déjà entendu sur lui. Il y a des signes superficiels et des évidences profondes qui résultent de ces instants où, bien interrogé, parfois bousculé, un être se montre dans son talent, son humilité et sa vérité. C’est le meilleur ou le pire, surgi en un trait de temps… Aussi je n’ai pas le moindre doute quand j’affirme : Julien Denormandie aurait été bien partout, serait bien partout !
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[1] https://www.sudradio.fr/emission/le-petit-dejeuner-politique-sudradio-141