Communiqué de Valérie Pécresse
Valérie Pécresse dément catégoriquement les propos qui lui ont été prêtés dans Le Canard Enchaîné du 29 juillet, selon lequel elle aurait distingué ses compatriotes juifs et musulmans des autres au cours d’une réunion publique qui s’est tenue à la salle des fêtes du Blanc-Mesnil en présence de nombreux élus et personnalités le 8 juillet dernier.
Elle y avait réaffirmé, au contraire, que toutes les religions doivent s’inscrire dans les lois de la République. Voici les propos qu’elles a tenus : « c’est évident, ce que l’on a demandé aux catholiques et aux juifs par le passé, on doit pouvoir le demander aux musulmans de France. Mais ce qu’on a donné aux catholiques et aux juifs par le passé, on doit aussi pouvoir le donner aux musulmans de France, dès lors qu’ils s’intègrent dans les principes de la République. Tout ça, c’est des sujets dont il faut que nous parlions. Tout ça, c’est des sujets de discussion. »
L’enregistrement intégral de cette réunion publique a été réalisé par la télévision « La Locale » et a été déposé chez Maître Stéphane Emery, huissier de justice, et sera utilisé pour toutes les procédures judiciaires nécessaires à rétablir son honneur attaqué.
Causeur présente toutes ces excuses à Valérie Pécresse pour avoir relayé une mauvaise restitution de ses propos.
Raymond Barre doit bien rire là où il est. En campagne en Seine-Saint-Denis pour les élections régionales de décembre prochain, Valérie Pécresse – députée LR – a cru judicieux de déclarer qu’«il faut résoudre la question des lieux de culte et des écoles confessionnelles car on doit pouvoir donner aux musulmans ce qu’on donne aux Français et aux Juifs. Le tout étant de lutter contre ce fléau qu’est l’islamophobie » (Canard Enchaîné, 29.7.2015).
Cela partait sans doute d’un bon sentiment (le genre de sentiment qui croît à l’approche des élections), mais les musulmans et les juifs de France seront heureux d’apprendre qu’ils ne sont pas français, en tout cas, pas autant que les « autres » français, les français normaux (blancs et chrétiens).
Disparue l’émancipation des juifs de France par l’Assemblée Constituante en 1791, abrogé le décret Crémieux de 1870 (l’infâme Peyrouton l’avait déjà fait en 1940 pour Pétain. C’est du réchauffé), retour au Code de l’Indigénat ! On fera ainsi mieux la différence car bon sang ne saurait mentir comme disait le pauvre Zola qui m’en voudrait, en bon dreyfusard, de le citer dans ce contexte.
Ceci étant, peut-on vraiment lui en vouloir ? Mme Pécresse s’est probablement mise au niveau des prochains programmes scolaires d’histoire version Najat Vallaud-Belkacem. On ne sait pas si elles seront bien faites, mais on est sûr que les têtes seront moins pleines.
Plus sérieusement, cette déclaration laisse assez perplexe. Que Valérie Pécresse aille faire un exercice de charme auprès de l’électorat de Seine Saint-Denis, c’est normal. C’est même indispensable lorsque l’on brigue la présidence de la région Île-de-France. Mais ce genre de réflexions est soit une maladresse navrante pour une femme politique de son expérience et de son intelligence soit un stratagème électoraliste aussi risqué que déshonorant.
Qui aujourd’hui, à part les obsessionnels de la race de l’extrême droite et leurs pendants tout aussi futés d’extrême gauche, confond réellement religion et nationalité ? Personne .
Mais alors nos hommes et femmes politiques peuvent-ils vraiment tout se permettre pour se faire élire ? S’il est vrai que l’électorat musulman penche en général à gauche (enfin, de moins en moins, les musulmans n’étant pas plus naïfs que la moyenne), la ficelle est un peu grosse. En France aujourd’hui, les citoyens – fussent-ils de religion musulmane, juive, catholique, bouddhiste… – bénéficient des mêmes droits et sont soumis aux mêmes devoirs.
Tenir un discours tel que celui de Valérie Pécresse est dangereux. Cela nuit autant à la cohésion nationale qu’à l’exigence de vérité. Les mosquées, tout comme les écoles musulmanes, existent. Si leur nombre est moins important que le nombre d’écoles juives et plus encore des écoles privées catholiques, c’est aussi en raison de l’absence d’interlocuteurs (le CFCM n’a été fondé qu’en 2003). Jouer sur une différence de traitement de cette façon en ces temps d’exacerbations sociales et communautaires n’est sans doute pas la meilleure façon de rassembler les citoyens.
Pour autant, Mme Pécresse ne doit pas désespérer. Le 3 octobre 1980, le jour même de l’attentat contre la synagogue de la rue Copernic, Raymond Barre s’était fendu d’un « cet attentat odieux voulait frapper les Israélites qui se rendaient à la synagogue et a frappé des Français innocents qui traversaient la rue Copernic ». Trente-cinq ans après, on s’en souvient encore. Mais cela n’a pas empêché celui-ci de finir le septennat de Giscard comme Premier ministre puis d’être élu député du Rhône et maire de Lyon.
Les voies électorales sont parfois impénétrables.
*Photo: MEIGNEUX/SIPA. 00714537_000014.
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