Accueil Édition Abonné Jérôme Fourquet: « Les cathos pratiquants sont assez rétifs à l’accueil des migrants »

Jérôme Fourquet: « Les cathos pratiquants sont assez rétifs à l’accueil des migrants »

Entretien avec le directeur du département Opinion publique à l'IFOP


Jérôme Fourquet: « Les cathos pratiquants sont assez rétifs à l’accueil des migrants »
Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion publique à l'IFOP. © Hannah Assouline

Pris en étau entre la montée d’un islam revendicatif et la défense laïque, beaucoup de catholiques se perçoivent comme une minorité menacée. Pour séduire cette communauté droitisée, FN et LR se livrent une course à la calotte. Entretien avec le directeur du département Opinion publique à l’IFOP. 


Causeur. Votre livre évoque la « communauté catholique », comme il existe des communautés maghrébine et asiatique en France. Cela signifie-t-il que les catholiques ont conscience de ne plus former la majorité culturelle du pays ?

Jérôme Fourquet. Les catholiques se considèrent en effet comme une minorité parmi d’autres dans une société massivement déchristianisée, dont les mutations anthropologiques (loi Taubira, voire bientôt PMA et GPA ?) les heurtent profondément. Jusqu’au mariage pour tous, ils se sentaient protégés par une espèce de droit d’aînesse, mais la loi Taubira leur a fait prendre conscience des conséquences de leur statut minoritaire. En dépit de leur mobilisation massive, ils n’ont pas réussi à faire reculer la gauche au pouvoir. En cela, la Manif pour tous (2013) est l’antithèse de la mobilisation pour l’école libre (1984), qui avait obtenu gain de cause.

Pourtant, la déchristianisation de la société ne date pas d’hier : dès le début des années 1960, juste avant le concile Vatican II, seulement un tiers des Français déclarait aller à la messe tous les dimanches. En 2012, ce chiffre était descendu à 6 %, signe d’un basculement culturel et sociologique majeur.

Les cathos sont fortement divisés.

À mesure que la société se déchristianise, son noyau catholique semble de plus en plus s’engager. Ainsi, le PACS (1997) n’avait soulevé aucune mobilisation massive alors que le mariage pour tous (2012-2013) a cristallisé l’opposition de centaines de milliers de catholiques. Comment expliquez-vous ce réveil ?

Le PACS concernait un statut administratif distinct du mariage et était symboliquement bien moins fort. Bien que l’ouverture d’une union civile aux couples homosexuels ait alors heurté une partie des cathos, cela n’avait rien à voir avec la réaction à la loi Taubira. La Manif pour tous a développé une stratégie assez habile en se concentrant sur le volet adoption, qui scellait la remise en cause de la famille traditionnelle, plutôt que sur le mariage, qui se bornait à avaliser le PACS et qui « passait » beaucoup mieux dans l’opinion. Ainsi, sur l’ensemble de la population, bien au-delà des seuls catholiques, 60 % des Français se déclaraient favorables au mariage pour tous alors que sur l’adoption, le rapport de forces était de 50/50. Idem chez les catholiques, dont la majorité ne s’opposait pas au mariage pour tous, mais beaucoup plus à l’adoption. Le discours anthropologique de la Manif pour tous « un papa et une maman » a eu bien davantage de résonance que l’argumentation anti-PACS exclusivement catho de Christine Boutin en son temps.

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Février 2018 - #54

Article extrait du Magazine Causeur




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est journaliste.

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