Ayant laissé mourir de soif une fillette yazidie réduite en esclavage en Irak, la djihadiste et milicienne de Daech Jennifer Wenisch a été condamnée à seulement dix ans de prison lundi, par un tribunal de Munich.
Jennifer Wenisch. Allemande. 30 ans. A rejoint l’État Islamique en 2014, porté les armes à son service, intégré sa « police des mœurs » pour en faire respecter les prescriptions à coups de fouet. Avec son mari, lui aussi membre de l’EI, elle a acheté une Yazidie et sa fille comme esclaves. Parce que la fillette de cinq ans, malade, aurait uriné sur son matelas, elle a laissé son mari l’attacher pour la suspendre à la fenêtre en plein soleil, 50°, et la faire lentement mourir de chaleur et de soif sous les yeux de sa mère.
Capturée et jugée en Allemagne, Jennifer Wenisch risquait la perpétuité. Mais ce qui tient lieu de « justice » outre-Rhin a préféré la condamner à dix ans de prison seulement. Immonde décadence d’un Occident que son fétichisme pour un « humanisme » perverti conduit à perdre toute humanité.
Jennifer Wenisch n’est pas un monstre, dira-t-on, mais notre semblable. Oui, et c’est précisément pour cette raison qu’elle doit répondre de ses actes par une sanction à la hauteur de ses crimes, parce que la monstruosité de ce qu’elle a fait n’est pas la conséquence inévitable d’une nature monstrueuse, mais le résultat de ses choix, libres et responsables.
Pas la loi du talion
Vous voulez donc la loi du talion ! s’insurgera-t-on encore. Non : la loi du talion consisterait à attacher cette femme en plein soleil jusqu’à ce qu’elle meure de soif. Que les beaux esprits ne voient pas qu’il y a d’autres alternatives que le choix caricatural entre ce talion radical et le laxisme de juges pervertis est une preuve supplémentaire de notre effondrement collectif, intellectuel et moral.
« Notre », car dans le départ de jihadistes vers l’EI, tous les pays européens sont tragiquement solidaires. « Notre », car si l’affaire se déroule en Allemagne, la situation française n’est pas très différente : pour s’en convaincre, il n’y a qu’à écouter ceux qui s’indignent presque plus des propos de Patrick Jardin que des actes des criminels responsables de la mort de sa fille au Bataclan. Comme ils se pavanent, drapés dans leur supériorité morale autoproclamée ! Les principes qu’ils affichent ne servent que de masques à leur écœurante lâcheté.
Le pas-de-vague est un avilissement généralisé
Lâcheté morale, car seul compte à leurs yeux de ne pas se salir les mains, qu’importent les victimes, qu’importe l’humanité, qu’importe cette jeune femme massacrée au Bataclan, qu’importe cette enfant affreusement torturée et assassinée. Lâcheté physique, car c’est aussi la lâcheté de ceux qui passent devant les agressions sans réagir, la lâcheté de cette foule qui n’a rien fait pendant que tant de femmes étaient agressées la nuit du Nouvel An à Cologne. Lâcheté sociale, « pas de vague », lâcheté de ceux qui préfèrent se taire et laisser Samuel Paty être tué plutôt que courir le risque de se faire traiter de « fachos » ou autres anathèmes du même ordre.
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Entre les « vous n’aurez pas ma haine » sans cesse psalmodiés, et le soi-disant « Etat de droit » auquel des magistrats offrent, comme autant de sacrifices humains, les victimes des criminels qu’ils laissent libres d’agir (trahissant l’esprit des lois pour en mettre la lettre au service de leur idéologie militante), l’Occident ne cesse de s’avilir. Il s’avilit au point de vouloir se persuader que dix ans de prison seraient une « juste peine » pour s’être mis au service de l’horreur absolue, et pour avoir torturé et tué lentement une enfant de cinq ans sous les yeux de sa mère. Que Jennifer Wenisch soit co-auteur de la mort de cette fillette ou « seulement » complice ne change rien. Ce n’est là qu’argutie sans intérêt au regard de la gravité du crime.
N’oublions pas nos racines : si Athéna empêche toujours ses protégés de s’abandonner aveuglément à la fureur, elle promet aussi à Ulysse qu’elle combattra à ses côtés et que le sol de son palais « sera souillé du sang et de la cervelle de ses ennemis » (Odyssée, chant XIII, vers 386 – 396). Sommes-nous donc les héritiers du héros, prêt à affronter trois cents guerriers pourvu que la fille de Zeus soit auprès de lui, ou de cette valetaille qui cherchait à s’attirer les bonnes grâces des prétendants en les encourageant à dévorer Ithaque ?
Les Yazidis et leurs bourreaux islamistes
Jennifer Wenisch n’est pas juste une criminelle, ni même un ennemi vaincu et désormais inoffensif. Comme Salah Abdeslam, elle est l’un des soldats d’un ennemi déterminé et conquérant, bien résolu à nous soumettre et nous détruire. Comme le devrait celui d’Abdeslam, son jugement aurait dû servir à prouver à cet ennemi notre capacité à faire preuve de la brutalité nécessaire pour briser sa volonté de nous attaquer. Il n’en a rien été, et le tribunal de Munich a montré son esprit…. munichois. Là-bas comme ici, « vous n’aurez pas ma haine » est l’antithèse du « nous combattrons (….) nous ne nous rendrons jamais » de Churchill.
Mais face à l’abomination des crimes de cette femme, ces considérations stratégiques ne sont pas l’essentiel. Ce qui compte, c’est l’incroyable mépris dont l’Allemagne, avec ce jugement, fait preuve envers cette fillette morte, envers sa mère qui a assisté impuissante à son agonie, envers tous les Yazidis réduits en esclavage, violés, massacrés par l’État Islamique, et envers toutes les victimes de l’EI quelles qu’elles soient. Ce qui compte, c’est la détresse de tous ces gens à qui l’Occident a promis qu’il les protégerait, mais qu’il trahit pour préférer s’enorgueillir de n’être pas trop dur envers leurs bourreaux. Accepter sans réagir la décision indigne de ce tribunal, c’est renoncer à toute véritable éthique. C’est piétiner ce qui fonde la grandeur de l’humanité, pour cajoler ce qui nourrit son horreur. C’est cracher sur tout ce qui a pu faire la noblesse de notre civilisation depuis trois millénaires. Si nous voulons encore avoir le droit de nous dire civilisés, nous devons aujourd’hui crier notre colère, et proclamer notre soif d’une vraie Justice.