Je ne sais pas si vous étiez nombreux hier soir, vers 19h10, à guetter l’arrivée du Che de Belfort sur le plateau du Grand Journal de Canal +. En tout cas, j’étais devant le poste, persuadé que l’émission allait tourner au dîner de cons télévisuel, dont la spécificité est que ce sont les cons qui reçoivent. Mauvais esprit ? Tu parles ! A posteriori, Denisot et consorts m’ont plus que donné raison.
Sur les dix minutes d’interview, près de huit ont été consacrées à l’appartement que Jean-Pierre Chevènement loue en toute légalité à la Ville de Paris, à l’extérieur du parc social. Avec, comble du journalisme d’investigation, une visite du sieur Mouloud dans la mairie du IIIe pour interroger le bailleur du Che himself, l’édile de l’arrondissement qui suggère au lion de Belfort de laisser son logement à une famille plus nécessiteuse. Si telle est la vraie politique de la Ville de Paris, des milliers d’encartés PS vont trembler !
Passons. Alors que le quidam pouvait s’attendre à des questions musclées de Jean-Michel Aphathie du genre : « Ne pas appliquer la règle d’or est-il irresponsable ou suicidaire ? » ou bien « Le protectionnisme : ineptie ou néofascisme ? », rien de tout cela ne nous a été donné.
Denisot, Massenet et Aphathie persiflaient sur le ton du sage-qui-sait : cette candidature n’est pas crédible, notre invité est ringard, nous le méprisons. Aucune question de fond donc, à peine Chevènement a-t-il pu placer un petit credo protectionniste et mettre en cause la responsabilité des « élites mondialisées » dans le décrochage du peuple (citant Zygmunt Bauman au passage, joli !). Nos acolytes lui balançaient systématiquement dans la figure l’image d’un vieux père-la-rigueur stigmatisant les « jeunes de banlieue » en osant traiter les délinquants de « sauvageons ».
Pour finir, la production du Grand journal avait invité un aréopage de « jeunes de banlieues » ayant réussi (à gagner de l’argent), pour certains après avoir renoncé au vol. Ô parcours bénis des dieux de Canal : la délinquance puis la rédemption par le business.
Devant pareil spectacle, le Che paraissait totalement anachronique…tant mieux pour lui, merci pour nous.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !