Accueil Politique Jean-Pierre, au secours, la droite revient !

Jean-Pierre, au secours, la droite revient !


UMP Photos.

Sans vouloir faire le martyr obscur, vous n’imaginez pas à quel point la situation est anxiogène, en ce moment, pour un militant et un électeur de gauche comme votre serviteur. Je sens bien que ça patine un peu, pour tout dire. J’ai beau savoir, pour y participer, que le Front de Gauche fait une bonne campagne de terrain et que ça paye toujours à la fin, pour l’instant, on avance encore dans le brouillard du silence médiatique.

Quant à François Hollande, dont nous avons déjà dit qu’il était le candidat PS préféré de la droite, il semble confirmer tous les désespoirs que nous avions mis en lui. Et cela va de l’anecdotique au structurel : il a un mal fou à trouver un siège de campagne, il cafouille dans des combinazione ridicules avec des écologistes de plus en plus sectaires, il se laisse piéger dans des débats comme le nucléaire ou le vote des étrangers aux municipales alors que le chômage grimpe en flèche. Et surtout, il fait des risettes à Bayrou, reproduisant l’erreur stratégique de son ex-compagne qui est celle des sociaux-démocrates depuis quelques années : cette vieille lune que les présidentielles et les législatives se gagneraient au centre alors que cela n’a jamais vraiment été vrai. Pour ne prendre que les présidentielles, si l’on excepte Giscard en 74 et Mitterrand en 88, sous la Cinquième République, on gagne soit à droite comme Pompidou en 69, Chirac en 2002 et Sarkozy en 2007 soit à gauche comme Mitterrand en 81 et Chirac en 95. D’ailleurs, si le centre existait, il aurait un vrai parti à lui, Borloo ne se serait pas dégonflé, Hervé Morin ne serait pas confondu avec un clarinettiste et Bayrou n’en serait pas à sa troisième candidature.

Et puis François Hollande oublie qu’il a en face de lui l’une des droites les plus dures qu’on ait vue depuis longtemps. Elle est dure parce que qu’elle a peur de l’extrême droite, de la crise de la dette, de son bilan calamiteux en matière d’emploi, de pouvoir d’achat et de sécurité. La sécurité, c’était son cheval de bataille. La droite a réussi à faire croire qu’elle seule s’en souciait vraiment. On aura beau objecter que la révolution culturelle de la gauche en la matière a eu lieu depuis longtemps et que le colloque de Villepinte, qui actait que la sécurité des citoyens était une priorité républicaine, date tout de même de 1997 quand Jean-Pierre Chevènement était ministre de l’Intérieur, rien n’y fait[1. Sous prétexte que sur les bancs de la gauche à l’Assemblée ou au Sénat, on ne réclame pas une loi d’exception à chaque fait divers atroce, l’accusation de mollesse rousseauiste coupable revient à chaque fois.].

Et que dit François Hollande face à cette nouvelle offensive menée par Claude Guéant ? Pas grand chose, à vrai dire. Il y a bien Manuel Valls, qui fait remarquer que la gauche n’est plus au pouvoir depuis dix ans et que ce n’est pas de sa faute si on en est à voler des surgelés avec des kalachnikovs dans la bonne ville de Marseille, et que cet échec manifeste est celui du gouvernement.

Devant la mollesse toute sociétale du candidat Hollande, on a l’impression que ce ratissage à droite, très à droite, avec des propos de plus en plus violents sur les immigrés, même en situation régulière, pourrait bien réussir.

Le comble, dans cette atmosphère décidément très sombre où l’on nous fait croire sur fond de panique économique que le choix est entre une UMP qui se fait de plus en plus poreuse face au FN et un PS qui discute de tout sauf de ce qui angoisse vraiment les Français, c’est que le réflexe immunitaire vient de la droite elle-même.
Plusieurs voix à l’UMP se sont effet élevées pour dire que non, la droite française, ce n’était pas ça et qu’il y avait des limites à ne pas franchir. Nous avons même cru entrevoir la silhouette lointaine et oubliée de Michel Noir soutenant qu’il valait mieux perdre les élections que perdre son âme.

Je ne sais pas s’il s’agit de calcul politique (certains pensant que les électeurs finissent toujours par préférer l’original frontiste à la copie) ou d’une indignation sincère. Sans doute les deux, et puis quelle importance… Ce qui est vraiment surprenant, c’est que les paroles que j’attendais de la gauche sont venues de …Jean-Pierre Raffarin !
Ai-je pu autrefois le trouver ridicule, ce premier ministre de circonstance nommé par Chirac en 2002 en raison de son innocuité, avec sa tchatche bidon de communicant, son air perpétuellement épuisé à cause d’une fonction qui le dépassait, ses formules ridicules, sa sinophilie d’ex-jeune giscardien, et j’en passe.

Et puis voilà qu’il s’est mis en colère à la tribune du Rendez-vous du Rassemblement organisé par l’UMP il y a quelques jours et qu’il a déclaré : « Ne mélangeons pas tous les immigrés, ne faisons pas des immigrés des adversaires globaux. L’immigré qui respecte la règle, c’est un ami de la République, c’est un ami de la France. Il faut qu’il entende notre message. Il ne doit pas apparaître comme un problème pour notre République. »

Et là, je n’ai plus eu envie de me moquer de Raffarin mais de lui dire merci de faire le boulot du PS.

De le remercier tout court, en fait.



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