Publiée jeudi dernier, la circulaire de Jean-Michel Blanquer proscrivant le recours en classe à l’écriture inclusive, particulièrement le point médian, est une bonne nouvelle. Mais il reste des efforts à faire !
Fini le point médian ! Fini.e.s les ballerin.e.s ! Fini.e.s les professeur.e.s ! Quoi qu’en disent les féministes, il faut se rendre à l’évidence : un point final est mis à l’inclusive à l’école. Que les parents se réjouissent ! Mais que de pain reste sur la planche !
Le « masculin l’emporte » l’emporte !
Une circulaire, émanant du Ministère de l’Education Nationale, introduite par une citation de Madame le Secrétaire perpétuel de l’Académie Française, et adressée aux recteurs et aux rectrices d’académie ainsi qu’aux personnels de l’Education Nationale, vient d’être publiée au Journal Officiel, bannissant l’écriture reposant sur le point médian, obstacle à l’apprentissage de l’écriture et de la lecture. La circulaire préconise la féminisation des métiers et des fonctions (que l’Académie Française a toujours pratiquée) et maintient les accords grammaticaux. Le masculin « l’emporte » toujours sur le féminin ou plutôt a une valeur extensive, c’est-à-dire représente, à lui seul, les éléments relevant des deux genres. Rien de nouveau !
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Cette circulaire fait écho à une déclaration, passée inaperçue— et pour cause— datant de novembre 2017, du premier ministre Edouard Philippe, contraint de rappeler, vu le désordre linguistique régnant, que, conformément à l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539, toujours en vigueur, et en vertu de l’article 1 alinéa 2 du 4 août 1994 de la Constitution qui « dispose que la langue française est la langue des services publics », l’écriture inclusive est bannie des textes émis par le gouvernement, dont les arrêts doivent être compréhensibles pour tous.
Une machine a exclure les opposants au woke
Sauf que le gouvernement n’a été obéi nulle part. En 2021, les mairies imposent cette écriture mortifère dans leur communication et, dans les Universités, l’inclusive est devenue une machine à exclure les opposants au Woke. Dans les écoles maternelles et primaires, c’est souvent l’imagination au pouvoir. Si on ajoute à cela les revendications des tenants des langues régionales, qui passent déjà de la « reconnaissance » aux « revendications », on ne sera pas étonné que, dans le royaume, règne la confusion pour ne pas dire la guerre.
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Cette guerre remonte à loin. En 1984, à la demande de l’Académie Française —gardienne de notre langue —Georges Dumézil et Claude Levi-Strauss rappellent le rôle des genres grammaticaux dans la langue française. Le 10 octobre 2014, la même Académie rappelle les règles qui s’imposent dans la formation et l’usage des mots. Rien n’a changé depuis. Que le lecteur consulte les textes sur le site de l’Académie. La même Académie, rappelle que « la langue n’est pas un outil malléable et utilisable, modifiable au gré des désirs et des projets politiques. » Or, en 2021, qui ne voit qu’une idéologie égalitariste protéiforme fait violence à notre langue qu’elle entend modifier de sa propre autorité ?
Décidément, le genre grammatical, qui n’est pas le sexe, déroute les féministes et les linguistes. Au lieu de les intéresser, sans parler d’émerveiller, par son caractère inattendu, il les déstabilise. Loin du sexe, on est perdu. Au lieu de reconnaître qu’en l’absence de tout autre critère formel, l’article est la seule et unique marque du genre, et que le français ne dispose d’aucun suffixe de féminisation des mots, les féministes retournent à cet enfer qui fait du genre un sexe.
La maladie de la déconstruction mine notre époque
Ne nous y trompons pas. Ce féminisme linguistique, loin d’être un gadget, participe de la maladie de la déconstruction qui mine notre époque. Celle d’en finir avec ce qui est imposé : notre condition biologique et sociale. Or, quoi de plus imposé que la langue ? Sauf que ce refus faisant fi de l’histoire (lexique et grammaire) enferme les féministes dans une prison. Sans parler de ridicule. Les professeures se heurtent aux professeuses, les auteures aux autrices sans pouvoir être médecines. Bref, elles s’inventent des contraintes langagières pas possibles.
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Pour les syndicats, Jean-Michel Blanquer se trompe de priorité en pointant le point médian. Si c’est le cas, aucune raison de se priver de sa suppression. On a surtout l’impression que l’on ignore une langue avec son histoire et son génie. Pour revenir à la féminisation des mots de métier, rappelons que l’Académie Française ne s’y est jamais opposée ! Bien au contraire ! Elle l’a toujours pratiquée, mais sans esprit de système et en respectant le génie de la langue et son usage. On fait dire à Monsieur Blanquer qu’il approuverait la féminisation du mot « professeure ». Mais à condition que le e soit muet, dit l’Académie ! Quelle galéjade ! Utiliser systématiquement les « formes développées » comme « les enseignants et les enseignantes » pour favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes, qu’est-ce d’autre que de l’idéologie ? Quant à remplacer « les droits de l’homme » par « les droits humains », sommes-nous devenus à ce point ignorants du sens des mots que nous ne sachions plus que le mot « homme » désigne le mâle par opposition à la femme tout autant que l’espèce humaine en général ? Décidément, il faut vraiment poursuivre les efforts de reconquête de la langue française !