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Jean-Marie Rouart: en mémoire d’Augustin

« Augustin Rouart entre père et fils » (Gallimard, 2023)


Jean-Marie Rouart: en mémoire d’Augustin
Jean-Marie Rouart, membre de l'Académie française depuis 1997 © BALTEL/SIPA

Dans Augustin Rouart entre père et fils, Jean-Marie Rouart fait acte de piété filiale en ressuscitant à la fois la figure du peintre et du père


Le romancier et académicien Jean-Marie Rouart a déjà fait état, dans des livres précédents, de sa naissance dans une grande famille de peintres parisiens. Par Julie Manet, épouse d’Ernest Rouart, il est même lointainement apparenté à Édouard Manet. Son père, Augustin Rouart, a consacré sa vie à la peinture et doit être considéré comme l’un des membres les plus talentueux de cette lignée d’artistes.

Le modèle favori de son père

Dans ce très joli livre qui est publié aujourd’hui, et qui comporte force reproductions de tableaux ou de dessins, Jean-Marie Rouart nous livre un témoignage de première main sur son père. Comme on le constate à la lecture, c’est une manière d’aborder l’œuvre d’un artiste peintre avec une parfaite acuité, d’autant plus que Jean-Marie Rouart fut, lorsqu’il était enfant, le modèle favori de son père : « Quelle mystérieuse attirance, se demande-t-il, le portait à me dessiner sans fin, à multiplier les esquisses, les croquis, les portraits dont j’étais le sujet ? »


Jean-Marie Rouart réfléchit à cette prédilection de son père à le faire poser. Il remarque : « À travers moi, c’est l’enfance qui le fascinait, son innocence, sa fragilité. » C’est l’occasion pour l’écrivain de s’interroger sur les motivations profondes de la quête artistique de son père : « J’étais le trait d’union, écrit-il, entre notre monde médiocre et le monde enchanté de l’art. » Pour Augustin Rouart, la peinture fut certainement un refuge, mais aussi plus que cela : la possibilité d’accéder à un idéal esthétique qui allait bouleverser sa vie. Lorsque Jean-Marie Rouart se demande ce qu’il doit à son père, il souligne ceci : « Je découvris grâce à lui que derrière la réalité existait un autre monde auquel il avait accès. » Et ce fut pour le futur romancier une révélation sans conteste capitale.

« La passion exclusive de l’art »

Augustin Rouart avait « la passion exclusive de l’art », écrit son fils. La relative pauvreté dans laquelle sa famille était tombée ne gênait aucunement le peintre. Il avait connu dans sa jeunesse l’aisance matérielle de la grande bourgeoisie, gâchée malheureusement par « des déchirements familiaux » qui lui firent, par la suite, préférer une vie simple et pauvre. Jean-Marie Rouart fait cette observation cruciale, sur le caractère de son père : « Profondément chrétien, il avait foi en la Providence qui pourvoirait au seul but qui comptait pour lui : accomplir sa destinée de peintre. »

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La peinture d’Augustin Rouart, contemporaine par exemple de l’œuvre d’un Claudel, a ceci de magique qu’elle rafraîchit l’œil constamment. En tout cas, Jean-Marie Rouart peut écrire de son père, de manière significative, la chose suivante :  « D’ailleurs, lui qui détestait toutes les intellectualisations de l’art se sentait infiniment proche des sculpteurs des cathédrales : leur art faussement naïf, la fraîcheur et la fantaisie qu’ils mettaient dans leurs œuvres l’enthousiasmaient. »

Une figure paternelle inestimable

Dans ce texte évidemment très personnel sur son père, Jean-Marie Rouart nous fait part de ce qui, à ses yeux, caractérise un artiste. Il expose aussi les répercussions que cette passion exclusive pour l’art peut avoir sur les proches. Jean-Marie Rouart est-il devenu écrivain grâce à son père ? Pendant son adolescence, il devait se révolter contre lui, déplorant sa faiblesse de caractère en tant que chef de famille. Cela lui permit néanmoins de choisir des pères de substitution, ces écrivains qu’il commença à aimer plus que tout. Par la suite, le fils revint vers son père, tel un enfant prodigue. Une sorte d’admiration essentielle naquit alors pour cette figure paternelle si particulière, dont Jean-Marie Rouart reconnut le prix inestimable.

Après la disparition de son père en 1997, Jean-Marie Rouart œuvra pour faire reconnaître davantage sa peinture. Des expositions furent organisées, avec succès, comme celle qui eut lieu tout récemment, au mois de mai dernier à Paris, à la mairie du VIIIe arrondissement. Jean-Marie Rouart a par ailleurs organisé une donation à l’État de certaines toiles de son père en 2021. Une exposition au Petit Palais avait officialisé cet événement important.

Jean-Marie Rouart, Augustin Rouart entre père et fils. Avec 95 illustrations. Relié sur papier. Éd. Gallimard.

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Jacques-Emile Miriel, critique littéraire, a collaboré au Magazine littéraire et au Dictionnaire des Auteurs et des Oeuvres des éditions Robert Laffont dans la collection "Bouquins".

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