Dans Aveuglements, Jean-François Colosimo, historien et théologien, voit dans la confusion entre politique et religieux l’origine des convulsions du monde moderne. Le dévoiement de la religion en un ensemble de rites marque la défaite de la spiritualité au profit d’idéologies politiques souvent mortifères. Tétanisé par la menace djihadiste, l’Occident peine à comprendre ce paradoxe.
Est-il possible d’être à la fois engagé et nuancé, passionné et précis, méthodique et digressif sur des questions aussi décisives par les temps qui courent que le retour du religieux, le choc des civilisations, les métamorphoses et les masques d’un nihilisme au mieux de sa forme, la barbarie la plus primitive des égorgeurs de Daech et celle de l’hypertechnologie prométhéenne de la Silicon Valley, cet aboutissement extrême occidental de la mondialisation libérale ? Est-il possible, aujourd’hui encore, de conjuguer l’histoire, la géopolitique, la philosophie et surtout la théologie sans oublier, parfois, la littérature et la poésie pour tenter de conjurer ce que Debord appelait en voulant caractériser la misère de l’homme moderne, « la perte de tout langage adéquat aux faits » ?
À lire le monumental essai de Jean-François Colosimo, Aveuglements, la réponse est oui. Le sous-titre, Religions, guerres, civilisations, délimite un champ de bataille qui est le nôtre aujourd’hui, qu’on le veuille ou non. Il est pourtant hors de question, pour l’auteur, d’élaborer une théorie ou de faire preuve d’esprit de système. Ceux qui voudront trouver ici un brûlot antimoderne ou un manifeste néoconservateur
