Elle aimait Hollywood qui, rapidement, après quelques films où sa plastique fut mise à l’honneur, ne voulut plus d’elle. Elle aimait offrir ses seins au regard de tous, en « une » de Playboy ou lors de strip-tease dans les cabarets minables d’une Amérique qui sera celle de Sarah Palin. Elle aimait exciter les hommes et, parfois, vivre avec eux malgré les coups qui abîmaient son joli visage aussi sûrement que les sunlights. Elle aimait aussi ses enfants, ses chihuahuas, sa collection de peluches et les perruques peroxydées parant de glamour un cuir chevelu ravagé.
Elle s’appelait Jayne Mansfield, fut la rivale de Marylin Monroe à l’époque lointaine où la guerre des blondes était une cause internationale. Elle était sexy, bien avant Pamela Anderson, Paris Hilton et Loana.[access capability= »lire_inedits »]
À 34 ans, par son sang versé sur l’asphalte, elle est définitivement entrée dans la légende : « Aux basses heures de la nuit, le 29 juin 1967, sur un tronçon de la route US 90 qui relie la ville de Biloxi à La Nouvelle-Orléans, une Buick Electra 225 bleu métallisé, modèle 66, se trouva engagée dans une collision mortelle. »
L’avis de décès du vieil Hollywood
Dans son premier texte, le si beau et mélancolique Anthologie des apparitions, Liberati tournait déjà autour de l’ombre charnelle de Jayne Mansfield. Dans Jayne Mansfield 1967, roman qui doit autant à Crash, de J. G. Ballard, qu’au Barthes des Mythologies, il ne la quitte plus, partant de sa mort, faisant corps avec elle pour remonter le fil de sa vie.
Liberati suit Jayne lors de sa dernière année, au plus près de ses pas, de ses rêves et de sa déchéance. Il passe avec elle son ultime soirée, dans les loges de carton-pâte d’un show kitsch. Il est sur le bord de la route au moment fatal de l’accident. Dandy stylé plein d’empathie, à la manière du chroniqueur de Vanity fair Dominick Dunne, il note tous les détails de la collision. Il se rappelle de Jayne, rayonnante, en couverture de l’album Hollywood Babylon, puis des photos de sa dépouille dans la version italienne du volume II du livre de Kenneth Anger.
Entre les deux séries de clichés, la guerre des blondes a pris fin et un vieux monde a signé son propre avis de décès : « Les époques de décadence n’aiment pas forcément les gens décadents et Hollywood redoute l’intelligence. Jayne Mansfield n’est que la réponse trouvée par une volonté et une énergie supérieures à une situation historique : la fin du star-system et des femmes-objets. »
Flâneur sentimental attaché à la mémoire de son héroïne, Liberati corrige quelques fausses vérités. Non, Jayne n’a pas été décapitée. Non, elle n’était pas une sataniste convaincue, même si elle rencontra Anton LaVey, le gourou de « L’Église de Satan », qui se présentera plus tard comme l’un de ses amants. Méphistophélès de foire du Trône, LaVey permet à Liberati de fouiller les boursouflures criminelles de l’Amérique de Charles Manson et de sa famille, hippies tendance croix gammée qui assassinèrent notamment Sharon Tate. Non, enfin, Jayne Mansfield n’était pas une ravissante idiote.
Ravissante, oui, malgré la drogue, l’alcool et les psychotropes. Idiote, sûrement pas. Sa quête permanente de gloire nécessitait de l’intelligence. Jayne n’en était pas dépourvue, gestionnaire parfaite d’une carrière qui, pourtant, n’avait pas d’avenir, entre inaugurations de boucheries, tours de chant foireux et effeuillages porno. Quand il parle de la notoriété de Jayne en 1967, Liberati évoque BB, les Beatles et le pape Pie VI. Ce n’était pas rien pour la plus blonde des icônes.[/access]
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