Hadrien Desuin a pu parler avec Asia Bibi. Dans une ambiance pesante, la femme toujours victime de menaces a participé à une émission de radio « Les Incorrectibles » qui sera diffusée dimanche sur Sud Radio.
C’est peu dire qu’elle revient de loin Asia Bibi. Une décennie à croupir dans une geôle pakistanaise suivie d’une grosse année d’exil au fin fond du Canada, harcelée par ses matons et ses co-détenues, condamnée à la pendaison et à 300 000 roupies d’amende par des magistrats terrorisés, cette paysanne catholique du Pendjab a payé très cher le simple fait d’avoir bu la même eau que ses compatriotes musulmanes. « Haram! » ont-elles crié. Le « pays des purs » ne badine pas avec la charia. Un gouverneur du Pendjab et un ministre des minorités ont même payé de leur vie d’avoir défendue la cause de cette chrétienne. Les Mollahs n’ont pas non plus apprécié que Benoît XVI prononce son nom sur la place Saint-Pierre. En représailles, les quartiers chrétiens de Lahore ont été mis à sac par des salafistes ivres de haine. Des églises ont brulé.
Une femme d’une extrême gentillesse
A l’époque, la correspondante de France 24 au Pakistan, Anne-Isabelle Tollet couvre les événements et cherche à prendre contact avec la jeune persécutée. De ses rencontres clandestines, elle tire le livre Blasphème, publié dès 2011, et, comme on pouvait s’y attendre, la journaliste est la cible de menaces de mort et sa famille ne peut rester au Pakistan. En 2019, ses efforts sont récompensés. La mobilisation internationale paye: Asia Bibi est libérée suite à un arrêt de la cour suprême du Pakistan. Mais en échange, elle doit quitter sa patrie. Islamabad ne garantit pas sa sécurité. Au micro de Sud Radio (dans l’émission Les Incorrectibles d’Eric Morillot qui sera diffusée ce dimanche à 13h et 22h), Anne-Isabelle et Asia n’ont rien perdu de leur courage mais elles avouent que les menaces de mort se sont multipliées depuis la sortie de Enfin Libre ! leur livre publié en janvier aux éditions du Rocher.
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Pendant l’enregistrement, une escorte policière veille en permanence autour de nous. Il règne une atmosphère pesante à la Charlie Hebdo. Analphabète (elle a tout juste appris à écrire son nom), Asia Bibi se prête à toutes les demandes. Elle ressemble à beaucoup de femmes du sous-continent indien: réservée, d’une extrême gentillesse, souriante, elle concède toutefois être devenue méfiante et pense sans cesse à toutes celles qui sont encore internées sous prétexte de blasphème et qui, en réalité, sont victimes de querelles de voisinages et de castes.
Elle découvre Paris
Pour des raisons familiales, Asia Bibi n’a pas pu s’installer immédiatement en France et c’est donc le Canada qui accueille la jeune catholique à l’été 2019. C’est pourtant bien en France que Asia Bibi compte s’installer. En cette fin février, elle découvre Paris, dont elle est citoyenne d’Honneur, et assure avec endurance la promotion de son livre. Elle veut surtout l’asile. Le président Macron la reçoit dans la cour de l’Élysée ce vendredi pour ce faire et si elle doit repartir au Canada samedi, Asia Bibi compte bien revenir très vite parmi nous.
Une résistante
Pendant toutes ces années, on lui a proposé de se convertir à l’islam et de renier sa foi, mais elle a résisté.
Plusieurs fois, elle a cru que ses dernières heures étaient venues. Mais elle a tenu, priant sans cesse au fond de son cachot. Aujourd’hui, la France est heureuse et fière de lui tendre ses bras. Une réfugiée, une vraie, sera toujours la bienvenue chez nous. Au fond d’elle-même, Asia Bibi n’a qu’un souhait: revenir chez elle.
Malheureusement, elle ne sait pas encore que c’est impossible. Il reste à espérer qu’elle puisse rester en sécurité parmi nous, le pays des femmes et de la liberté.
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