Récit de voyage dans une péninsule coincée entre migrants du Sud et touristes du Nord.
« Le comble du déracinement ? Sur les Champs-Élysées, j’ai entendu un accordéoniste rom jouer du Diam’s ! » Il y a une dizaine d’années, en écoutant l’un des habitués de mon estaminet favori deviser ainsi, je me figurais mal l’ampleur du désastre à venir. L’époque n’était pas encore aux niqabs sur canapé. Nul n’avait prévu le ressac migratoire qui déferlerait sur l’Europe après la vague des printemps arabes, l’implosion de la Libye et de la Syrie, ou la banalisation des attentats djihadistes en Europe. Aujourd’hui, c’est presque une lapalissade : l’exil pour tous tient lieu de mal du siècle. J’en ai observé les symptômes durant mes vacances italiennes : migrants en vadrouille, touristes en surnombre et autochtones parfois excédés par un double sentiment d’invasion furent mon lot quotidien.
Merano (Trentin-Haut-Adige)
Début juillet, tout avait bien commencé au Sud-Tyrol, cette région italienne qui parle allemand et marche droit. Ses paysages alpins font se sentir comme chez lui le touriste teuton. Il faut bien reconnaître que l’italianisation forcée menée sous le régime fasciste n’y a pas fait grand-chose : de la saucisse aux strudels, l’Autriche voisine affleure partout. De rares visages basanés et quelques touristes voilées en villégiature me ramènent à la réalité du village global. Même s’il y a loin de
