L’Italie défie l’Europe. L’annonce de l’intégration au budget italien de deux mesures sociales pour 2019 le rend incompatible avec les objectifs fixés par l’Union européenne.
Ceux qui avaient pronostiqué que l’Italie se coucherait aux ordres de la Commission en seront pour leurs frais. Giuseppe Conte, Luigi Di Maio et Matteo Salvini ont tordu le bras du ministre de l’Economie Giovanni Tria qui fixait la barre du déficit budgétaire à ne pas enfreindre à 1,6 %. Ce sera, nominalement à 2,4 % et tout porte à penser que ce sera bien plus. Nous le saurons au printemps, juste avant les élections européennes… Car Giovanni Tria, visé personnellement dans des éditos et tweets incendiaires, a cédé et annoncé mercredi que deux mesures sociales – le « revenu de citoyenneté » et la possibilité de partir plus tôt à la retraite – seraient prises en compte dès le budget 2019, conformément aux demandes des partis de la coalition au pouvoir qui le portaient dans leur programme. Jusqu’à présent, la coalition que tout le monde disait vouée à l’échec fonctionne, et même bien : elle n’a aucun intérêt politique à se diviser et étaler un quelconque manquement à son programme de gouvernement.
Et si l’Europe avait tort ?
Pierre Moscovici est bien ennuyé. Le commissaire européen aux Affaires économiques doit en même temps constater le manquement aux règles budgétaires (ineptes, mais) obligatoires, et ne pas être non plus celui qui rendrait la Commission encore plus haïe des Italiens, voire celui qui ferait exploser l’usine à gaz. Vendredi 28 septembre, il a sommé, à nouveau, le gouvernement italien de réduire une dette publique « explosive » (le mot malheureux est de lui), réaffirmant que le budget pour 2019 serait « hors des clous » des règles communes. Il a rapidement rajouté, soufflant le froid : « Nous n’avons pas intérêt à une crise entre l’Italie et la Commission. » Puis il a pris le risque de théoriser ce pourquoi il semble manquer de dispositions : « Faire de la relance quand on a une dette très élevée, ça finit par se retourner contre ceux qui le font ». Au moment où les analystes économiques découvrent, avec retard, les étonnantes (pour les ignorants) performances économiques de l’administration Trump…
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Fleurissent en effet des dizaines de chroniques intitulées : « Et si Trump avait raison ? » Ce n’est bien sûr pas évident pour ceux qui se rassurent en régurgitant des manuels scolaires d’économie ou les chroniques des hebdomadaires mainstream. Or, aucun pays ne peut s’en sortir s’il ne défend pas ses industries, ses fermes et ses travailleurs. Ce que Friedrich List appelle « le principe national d’économie politique » et la « théorie des forces productives ». Tout le monde parle de Ricardo (qui fut un spéculateur), et personne de List (son contemporain) qui réussit la mise en œuvre de véritables politiques économiques et industrielles (aux Etats-Unis, puis en Allemagne).
La question qui se pose désormais est : et si Conte avait raison ?
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