(Avec AFP) – Quand un énarque rétropédale, cela donne quelque chose comme : « J’ai été personnellement et profondément ébranlé devant l’effet produit par les malentendus et les distorsions auxquels ont donné lieu mes récentes déclarations sur la mise en oeuvre de notre stratégie de marque ici (en Israël). Je regrette profondément l’impact résultant du contexte et de l’interprétation de ces déclarations ».
Vous le devinez, cette phrase emberlificotée émane de Stéphane Richard, le PDG d’Orange. Le même assurait la semaine dernière à ses amis (et partenaires d’affaires) égyptiens qu’il se retirerait illico du marché israélien si cela ne tenait qu’à lui. Un tollé et plusieurs dénégations plus tard, voici venu l’épilogue de ce retrait en rase campagne, à l’issue d’un entretien avec le Premier ministre Benyamin Netanyahou. « Cette rencontre est pour moi l’occasion de dire avec clarté et sans ambiguïté qu’Orange ne prend part à aucun boycott en Israël ou ailleurs », a asséné Richard, ajoutant qu’Orange comptait bien « continuer à développer » son partenariat avec l’entreprise israélienne Partner. On croit rêver mais il paraît que la Terre promise est aussi celle des miracles…
Ayant déjà analysé les tenants et les aboutissants de cette valse-hésitation, je ne m’étendrai pas sur la tempête qui gronde sous le crâne de Stéphane Richard, sinon pour la résumer sommairement : comment contenter des millions de clients égyptiens sans s’aliéner le petit marché israélien? Ce ne sont bien évidemment pas les activités blâmables de Partner dans les colonies israéliennes de Cisjordanie, véritables épines dans le pied à une solution à deux Etats, qui ont motivé la prise de distance d’Orange, mais bien la peur de perdre la manne égyptienne. Après tout, ce n’est que la dure loi du marché : business is business.
Comme dans nos deux pays, tout finit par des chansons, on se souviendra des paroles du Sable et le soldat, que Gainsbourg avait offert à l’Etat d’Israël en pleine guerre des Six-jours. En 1967, le grand Serge prophétisait : « Tous les Goliath venus des Pyramides reculeront devant l’étoile de David ». Près de cinquante ans plus tard, pour des questions de gros sousous, Orange a bien failli se plier aux injonctions de Goliath.
Causeur ne vit que par ses lecteurs, c’est la seule garantie de son indépendance.
Pour nous soutenir, achetez Causeur en kiosque ou abonnez-vous !