Entendu sur une radio du service public : « Les colons israéliens en colère après la mort d’une des leurs ». « Une des leurs » ? Une « colon » donc ? Elle avait 13 ans ! Gagné par la nausée, j’ai fermé le poste. Quelques années auparavant, on avait pu lire dans nos journaux : « Quatre colons israéliens dont deux enfants tués par des Palestiniens. » Des « enfants-colons » donc ? Non, des enfants.
Le conflit israélo-palestinien fait couler beaucoup d’encre. En France, elle est particulièrement sale. Sous ces flots dégoulinants de bien-pensance, elle noie définitivement ceux qu’elle déshumanise pour mieux humaniser ceux qui les assassinent. On pourrait imaginer, la neutralité s’imposant, une phrase du genre : « Une adolescente israélienne tuée. » Ou : « Une fillette israélienne poignardée » (non, pas « fillette », ça inspirerait trop la pitié…). Rien de tel. L’assassinée sera pour toujours, selon des médias formatés, « une des leurs ». Une colon. Quand on pleure d’abondance sur Gaza, impossible de verser une seule larme sur Kyriat Arba (l’implantation où a eu lieu le meurtre)…
La Cisjordanie où la jeune Israélienne a été tuée dans son sommeil est ce qu’on appelle un territoire occupé. En effet, elle ne fait pas partie historiquement (pour les puristes, je parle ici de l’Histoire récente, pas de l’Histoire biblique) d’Israël. Va donc pour territoire occupé… Au bout de cette logique desséchée, il y aurait donc des occupants et des occupés. Ces derniers – qualifiés de « résistants » – auraient toute légitimité à s’insurger contre les premiers. Admettons. La France fut, de 1940 à 1944, occupée par les Allemands. Des résistants, des vrais, faisaient le coup de feu contre eux. Avec l’armée allemande, il y avait – services administratifs, services de propagande – des femmes avec leurs enfants. Connaît-on un seul résistant français qui aurait tué une petite Allemande de 13 ans ?
L’homme qui a assassiné la petite Israélienne est juste un assassin de la pire espèce. Un infâme tueur d’enfants. Et maintenant, redonnons à la victime son identité. Elle s’appelait Hallel Yaffe Ariel. Elle venait des Etats-Unis. Un kaddish pour Hallel Yaffe Ariel. Et pour ceux, fort nombreux je suppose, qui ne connaissent pas cette prière juive, un « Notre Père » fera l’affaire. Le « Notre Père » est l’enfant direct et légitime du Kaddish.
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