La polémique autour de la grande mosquée de Strasbourg a révélé l’ampleur de l’influence grandissante de l’islam turc sur le sol français. Cette communauté minoritaire s’est imposée dans les instances musulmanes et près de 50% des imams détachés en France sont issus de ses rangs….
La Confédération islamique Millî Görüs (CIMG), association née en 1995 en France sous sa forme actuelle, est sous le feu des projecteurs depuis la polémique sur le financement de la construction de la mosquée d’Eyyub Sultan en Alsace. Alors que le ministre de l’Intérieur accusait la majorité municipale de Strasbourg de subventionner « une ingérence étrangère sur le sol français », la préfète reprochait à la CIMG de prôner « un islam rigoriste », invoquant son refus de signer la charte élaborée par le Conseil français du culte musulman (CFCM). Quelques jours plus tard, le maire d’Albertville s’opposait à la construction d’une école privée par Millî Görüs dans sa commune. Ces prises de position vigoureuses traduisent de nombreuses inquiétudes concernant l’influence de l’islam turc – perçu comme un vecteur de l’exécutif d’Ankara – dans l’Hexagone. Le climat de suspicion a été aggravé par la dégradation, ces derniers mois, des relations entre la France et la Turquie qui s’opposent – souvent dans un langage peu diplomatique – sur de nombreux dossiers, comme ceux de la Libye, de l’Égypte ou des zones exclusives économiques en Méditerranée orientale.
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N’y allant pas par quatre chemins, la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) parle de « tentatives d’ingérence » de l’État turc. Ce dernier instrumentaliserait les citoyens franco-turcs par le biais d’un tissu associatif qui revendique des liens étroits avec le pays d’origine et de médias – turcophones comme francophones – diffusant des discours virulents contre le gouvernement français. C’est ainsi que les populations d’immigrés turcs ou issues de l’immigration turque, qui représenteraient entre 550 000 et 700 000 individus, sont devenues un enjeu politique non négligeable. Sont-elles pour autant acquises à 100% à l’AKP ?
La diversité de la population franco-turque
L’immigration turque en France est loin de constituer un bloc monolithique. Aux différences ethniques entre Turcs, Kurdes, Arabes ou Chaldéens s’ajoutent des traditions religieuses extrêmement variées. Extrapolant avec précaution les derniers chiffres de l’enquête « Trajectoires et Origines » de l’Ined et de l’Insee, on peut estimer qu’environ 88 % de cette population est musulmane, 6 % sans religion et 5 % chrétienne.
