Islam : qui stigmatise qui?


Islam : qui stigmatise qui?

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Au Nigeria, le récent enlèvement par le mouvement islamiste Boko Haram de plus de 200 jeunes filles a provoqué un remous sans précédent dans l’opinion publique mondiale. Sur Twitter, Michelle Obama, le pape François et l’ex-Première Dame Valérie Trierweiler ont désormais en commun un même #bringbackourgirls. « Ramenez-nous nos filles ! » exigent en chœur les célébrités du monde entier. Place du Trocadéro, nos sémillantes actrices et autres féministes ont bravé la foule et les médias pour porter haut le message.

On imagine Abubakar Shekau, chef de file de Boko Haram, se délecter de ces images, encore plus saoul qu’à l’ordinaire de l’impact inespéré de son rapt massif. Jusque-là, les exécutions sommaires de chrétiens et gardiens de la paix sur le sol nigérian avaient ému quelques heures, sans plus. L’image du leader Shekau expliquant en riant qu’il va vendre les jeunes filles sur le marché « au nom d’Allah » est particulièrement glaçante. 

L’Académie Islamique Internationale du Fiqh (jurisprudence islamique), basée à Jeddah, en Arabie Saoudite, a condamné cette action en la qualifiant « d’acte odieux ». Les savants de cette institution ont également souligné que ce « crime et les autres crimes commis par ces organisations extrémistes contredisent tous les principes humanitaires, les valeurs morales et violent les dispositions du Coran et de la Sunna ».

Au Caire, Al-Azhar appelle le groupe islamiste armé à relâcher les lycéennes, soulignant que faire du mal à ces jeunes filles est « totalement contraire aux enseignements de l’islam et à ses principes de tolérance ».

Dans l’hexagone, M. Dalil Boubaker, président du Conseil français du culte musulman, condamne l’enlèvement sans équivoque : « Les actes terroristes de la secte Boko Haram commis sous le prétexte de l’islam stupéfient le monde musulman et toutes les personnes qui respectent un minimum d’humanité », affirme-t-il.

De son côté, la jeune pakistanaise Malala, 16 ans, rescapée d’une tentative d’assassinat des talibans, a sobrement déclaré à CNN que Boko Haram « devrait aller étudier l’islam ». Dont acte.

L’actualité n’a pas ménagé le monde arabo-musulman. Toujours au Nigeria, 118 personnes ont été tuées le 20 mai et 56 autres blessées dans un double attentat sur un marché de Jos. Le 1er mai, une voiture piégée a fait plus de 16 morts en périphérie d’Abuja. L’explosion a eu lieu dans la gare de Nyanya, elle même déjà ciblée par une attaque quinze jours auparavant, faisant 75 morts. Boko Haram est sur le coup.

Au Kenya, au moins sept personnes ont été tuées et une centaine blessées début mai, par des bombes artisanales à Mombasa. Le mouvement islamiste des Chebab est vraisemblablement à l’origine de l’attaque. Fuad Mohamed Khalaf, un des plus hauts responsables de ce groupe somalien lié à Al-Qaïda s’est adressé à ses troupes en ces termes : « Quand leurs soldats et leurs avions de combat (du Kenya, ndlr) tuent les vôtres, Allah vous autorise à riposter en conséquence ».

En Syrie, plusieurs centaines de jeunes Européens, à grands coups de prêches allumés, ont d’ailleurs décidé de participer au jihad contre le « pouvoir impie » des Assad.

Plus proche de nous, en Seine-Saint-Denis, un directeur d’IUT a reçu des menaces de mort après avoir tenté de mettre fin à des magouilles au sein de son établissement. « J’appelle tous les musulmans à te punir. Tu dois payer, toi, tes proches, tes enfants » a-t-il pu lire dans des lettres anonymes. Le 21 mai au soir, alors qu’il sortait d’une réunion à Paris, il a été agressé par deux hommes qui l’ont roué de coup.

Au sultanat de Bruneï, la nouvelle législation basée sur la charia, la loi islamique, est désormais appliquée. Elle prévoit l’amputation de membres pour les voleurs, la flagellation pour la consommation d’alcool, la lapidation en cas d’adultère. « Avec l’entrée en vigueur de cette législation, nous remplissons notre devoir envers Allah », a déclaré le sultan.

Le 15 mai, Maryam Yahya Ibrahim, Soudanaise, médecin, 27 ans, a été condamnée par le tribunal islamique de Khartoum à la pendaison pour apostasie et, auparavant, à subir à cent coups de fouet pour adultère. La jeune femme est enceinte de huit mois et déjà mère d’un enfant de 2 ans.

Tous ces actes ont été perpétrés au nom d’Allah. Il ne s’agit peut-être que d’une minorité numérique qui bénéficie d’une retombée médiatique quand le plus grand nombre, pacifique, est passé sous silence. Hélas, les condamnations de circonstance des autorités islamiques ne s’accompagnent pas de manifestations de masse de musulmans criant « Pas en mon nom ! ». En l’absence de tels cortèges, on est en droit de s’interroger sur la propension de l’islam à enfanter des monstres. Mohammed Merah et Youssouf Fofana ont-ils mal lu le Coran ? On aimerait que des millions de musulmans nous répondent d’une voix unanime. Au nom de tous ceux qui veulent la paix.

*Photo : Kirsty Wigglesworth/AP/SIPA. AP21564965_000002. 



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