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Les Iraniens sont loin de tous pleurer la mort de Raïssi

Et il est à craindre que son remplaçant soit encore pire que lui !


Les Iraniens sont loin de tous pleurer la mort de Raïssi
Des Iraniens pleurent leur présient, Téhéran, 20 mai 2024 © Vahid Salemi/AP/SIPA

Toutefois, le Conseil de Sécurité de l’ONU a accordé une minute de silence pour le boucher de Téhéran.


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Un « martyr qui a sacrifié sa vie pour sa patrie ». On n’en attendait pas moins de la part des autorités iraniennes après la mort du président Raïssi. Il parait qu’un message Telegram des Brigades Al Qassam du Hamas soulevait la thèse de l’attentat israélien. Ce ne serait pas uniquement le temps qui aurait été maussade, mais le pilote également qui s’appellerait… Eli Copter (!). Bien peu probable, certes, mais cette mort n’a pas fait pleurer tout le monde et on a vu des manifestations de liesse en Iran même. N’en tirons cependant pas des conclusions hâtives, car le régime tient la population iranienne d’une main de fer, et le successeur n’a aucune chance d’être un modéré.

Avec sa barbe bien taillée, sa démarche grave et son turban noir de descendant du Prophète, Raïssi était un criminel et un inculte. Les Iraniens se moquaient de ses fautes de syntaxe, de sa parole pâteuse et de son ignorance. Il n’avait étudié à l’école que des matières religieuses mais n’avait pas atteint le titre d’ayatollah, ce qui d’ailleurs avait été aussi le cas de son mentor, Ali Khamenei, avant que ce dernier ne soit nommé Guide Suprême. Raïssi était l’un des favoris pour sa succession, sa personnalité médiocre et son conservatisme garantissaient qu’il laisserait la réalité du pouvoir aux Gardiens de la Révolution, aujourd’hui les vrais maitres de l’Iran. Le Ministre des Affaires étrangères, Hossein Amirabdollahian, mort dans le même accident d’hélicoptère, spécialiste du monde arabe et beaucoup plus talentueux que Raïssi, était leur homme de confiance dans le gouvernement.

Une personnalité médiocre qui était appelée à prendre le pouvoir suprême

Si le président décédé était un intellectuel minable, c’était surtout un tueur. Tueur de bureau, mais tueur de masse. En 1988, la guerre avec l’Irak terminée, l’ayatollah Khomeini règle ses comptes avec l’opposition de gauche qui l’avait pourtant soutenu au début de sa révolution. Au nom de Allah, le miséricordieux, on interroge les détenus sur leur rapport à l’islam. Ceux qui ne répondent pas bien sont considérés ennemis de Dieu, et la fatwa est formelle: ils seront exécutés, souvent après avoir été torturés. On connait le nom de cinq juges qui ont envoyé à la mort entre 5000 et 30 000 prisonniers dans le pays: deux sont devenus Ministres de la Justice, un président de la Cour disciplinaire des Juges et un autre membre de la puissante Assemblée des Experts. Le dernier est Ebrahim Raïssi, qui a œuvré dans les prisons de la capitale et en a tiré son surnom de « boucher de Téhéran ». 

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Mais ses exploits ne se sont pas arrêtés là. En septembre 2022, une jeune femme kurde, Mahsa Amini, arrêtée et violemment frappée par la police des mœurs parce que son foulard n’était pas réglementaire, décède après trois jours de prison. Des manifestations vont soulever le pays. Le duo Khamenei – Raïssi poussera à la répression et six mois plus tard, les protestations seront étouffées dans le sang. Aujourd’hui, l’Iran est un pays où les pendaisons sont monnaie courante. De nombreuses femmes en sont les victimes, ce qui n’émeut pas particulièrement nos féministes wokistes transsectionnelles. Un an après la mort de Mahsa Amini, le parlement iranien a renforcé les sanctions contre les femmes qui ne portent pas le voile en public. Une Commission de l’ONU, instituée en 2022, n’a toujours pas été admise à enquêter en Iran. Ce n’est pas grave, son mandat a simplement été prorogé. Il n’y a que quand Israël est en cause que le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU considère qu’il  y a urgence à condamner…

La loi américaine dite « Mahsa »

Une loi, dite loi Mahsa, élaborée par la Chambre des Représentants américaine, aggrave les sanctions contre les dirigeants iraniens et spécifiquement contre Ebrahim Raïssi. Elle a été signée le 24 avril par Joe Biden, alors que l’un des proches du président, Ben Cardin, président de la Commission des Affaires étrangères, pourtant considéré comme un ami d’Israël, avait essayé de la bloquer au Sénat. Car derrière la scène, les négociations se poursuivent entre les États-Unis et un Iran en voie d’accession à l’énergie nucléaire, qui, malgré les sanctions, vend deux millions de barils de pétrole par jour, qui profitent au régime et à ses affidés, et ne ruissellent pas vers le peuple iranien. La loi Mahsa renforce les sanctions contre les dirigeants iraniens et spécifiquement contre Ebrahim Raïssi. Mais celui-ci n’aura souffert d’aucune incrimination par la justice internationale, ce qui contraste avec le mandat d’arrêt scandaleux de la CPI contre Benjamin Netanyahu, émis le jour même de la mort du boucher de Téhéran.

Terrible symbole, ce mandat a été adressé contre des dirigeants israéliens qui mènent une guerre  dont la justification est évidente au regard des massacres commis par le Hamas le 7 octobre. Il aurait dû être émis contre Raïssi car sans l’aide des Iraniens, ces massacres n’auraient pas eu lieu. 

Aujourd’hui, malgré sa férocité, malgré la situation économique catastrophique où il maintient sa population, le sinistre régime iranien, loin d’être devenu un paria, n’a jamais été aussi influent. Son poids dans l’islam ne fait qu’augmenter. Les Frères Musulmans en sont les vecteurs les plus efficaces dans le monde sunnite, et même ses rivaux les plus acharnés, tels l’Arabie Saoudite, l’Égypte et les Émirats doivent composer avec l’Iran. Le Pakistan, pays ennemi il y a peu, décrète un jour de deuil national en signe de solidarité fraternelle. On n’est pas étonné de la chaleur des messages de condoléances à la mort de Raïssi des partenaires de l’Iran dans l’actuelle reconfiguration antioccidentale du monde : la Chine, la Russie, la Turquie, mais aussi l’Inde et l’ensemble des BRICS. On l’est plus par la minute de silence accordée par le Conseil de Sécurité de l’ONU, qui n’est  pas coutumier de cet honneur.

Mais dans sa brièveté, la palme revient au président du Conseil Européen, le Belge Charles Michel, qui exprime ses « sincères condoléances ». De deux choses l’une, soit ses condoléances ne sont pas sincères et c’est un menteur, soit elles le sont et c’est un salaud. Il y a des limites à la complaisance, mais certains dirigeants occidentaux s’obstinent à les tester.



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est président d'honneur du CRIF.

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