Irak : la nation impossible?


Irak : la nation impossible?

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Réagissant aux derniers événements en Irak, certains commentateurs imputent aux Etats-Unis et à l’administration George Bush la responsabilité du chaos actuel. Sans entrer dans ce débat, précisons qu’il s’agit de deux questions différentes : la guerre destinée à abattre le régime de Saddam Hussein ne se confond pas avec la gestion de l’occupation et la reconstruction. Autrement dit, les Américains ont peut-être moins péché au départ qu’à l’arrivée, la « dé-baathisation » et la mise à l’écart des sunnites ayant plongé l’Irak dans une quasi-guerre civile. De toute manière,  l’analyse des responsabilités n’a qu’une importance secondaire à l’heure où, faute de nation en son sein, un Etat arabe de plus est en train de s’écrouler…

Qu’il s’agisse du Liban, des pays secoués par le « printemps arabe » comme la Syrie, la Libye ou le Yémen ou de ceux travaillés par des conflits plus anciens comme la Somalie et le Soudan, nombre d’Etats arabes se trouvent au bord de l’éclatement, sans que les Tomahawk, chars Abrams et GI’s n’y soient pour rien. La chute de Mossoul et l’avancée vers Bagdad des forces sunnites – au-delà d’un petit carré de fanatiques, toute une communauté se sent laissée pour compte – derrière les drapeaux noirs d’Al-Qaïda rappellent les événements de janvier 2013 au Mali.

De nouveau, se pose la question des conditions d’établissement de la démocratie dans certains Etats arabes, du moins dans leurs frontières actuelles. Et c’est là tout le problème : après plusieurs décennies, parfois presque un siècle, tous les régimes qui se sont succédé dans ces pays n’ont pas réussi à « fondre » les différents groupes ethno-religieux se trouvant par hasard à l’intérieur de leurs frontières. Si ces nations artificielles achoppent sur la religion, l’ethnie, la tribu, ou le clan avant de s’y briser, il faut tout simplement en prendre acte.

Il est vain de vouloir corseter des sociétés hétéroclites dans des camisoles de force.  Plutôt que de chercher d’improbables amalgames, réfléchissons à la possibilité d’adapter les frontières aux corps politiques capables de soutenir des Etats stables. Une fois cet objectif atteint, les drapeaux, défilés militaires, ambassades et sièges dans les organisations internationales seront autre chose qu’une façade. Qui sait, avec le temps, des démocraties libérales pourraient même y naître…

*Image : wiki commons.



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est historien et directeur de la publication de Causeur.

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