Déjà remise en cause par le quinquennat, la fonction présidentielle a achevé d’être désacralisée par l’entretien-débat d’Emmanuel Macron avec Edwy Plenel et Jean-Jacques Bourdin.
L’intervention d’Emmanuel Macron chez Jean-Pierre Pernaut, jeudi 12 avril, était plaisante à regarder et avait balayé la plupart des sujets. Dès lors, quel a été l’intérêt de la seconde avec le duo Plenel/Bourdin, dimanche ?
A la gauche de Macron, un journaliste populiste « en mode café du commerce », n’écoutant pas les réponses et coupant le président dont il est allé jusqu’à sous-entendre le caractère puéril. A sa droite, un idéologue remonté comme un coucou, persuadé d’œuvrer pour la salubrité de la République… Les Français sont en droit de se demander pourquoi la présidence a fait appel à cet épouvantable duo. On aurait voulu désacraliser la fonction présidentielle, on ne s’y serait pas pris autrement ! Tout avait pourtant bien commencé, notre président-monarque était arrivé majestueusement en descendant les marches du palais de Chaillot avec notre Brigitte nationale à son bras. Avec la Tour Eiffel en arrière-plan, le cadre de l’interview avait plutôt de la gueule. Quelle galère ensuite…
Hey Manu, tu réponds ?
Pendant plus de deux heures et demie, Bourdin et Plenel se sont appliqués à nous démontrer que le président de la République française est désormais bien peu de choses. Toute la perfidie de l’improbable duo a été mise au service de la désacralisation de la fonction présidentielle, déjà bien amochée par le quinquennat qui accélère les temps médiatique et politique.
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Lundi matin, très satisfait de lui-même, Edwy Plenel est allé se féliciter au micro de RMC d’avoir « cassé les codes », lors de l’interview. Il révèle qu’il s’était donné un seul objectif la veille : « L’interview présidentielle en France est une interview monarchique. Notre objectif tout simple [à Bourdin et à lui NDLR] c’était d’abord de casser ça ».
Il n’est pas allé jusqu’à tutoyer le président comme le ferait l’employé d’une startup avec son patron, mais on n’en était pas loin. Par ses démonstrations et ses questions orientées, il voulait en tout cas savoir si Macron était le président « des riches » ou « des très riches ». Pénible ! Bourdin et le camarade Plenel n’auront même pas estimé nécessaire de relancer Emmanuel Macron par des « Monsieur le président » que l’on était en droit d’attendre, préférant l’appeler « Emmanuel Macron » quand ce n’était pas « Emmanuel ». Et on l’a vite compris : les journalistes se plaçaient en fait au même niveau que notre président élu. Par la forme de nombre de leurs questions, l’interview a pris les contours d’un débat. Débat houleux et décousu, comme si cela ne suffisait pas. Pauvres de nous !
Président, suite et fin
Jean-Jacques Bourdin avait présenté l’émission comme le « bilan annuel » d’Emmanuel Macron. Le même Bourdin n’avait-il pas fait passer un « entretien d’embauche » au candidat en 2017 ? Pour quoi se prend BFM TV ? Et pour qui Emmanuel Macron se prend-il et prend-il les Français en se pliant à ce petit jeu ? Le vrai pouvoir politique est parti à Bruxelles et le vrai pouvoir économique est aux mains des multinationales, c’est entendu. Aussi, n’était-il pas illogique que la presse puisse désormais s’adresser au président en le méprisant. Avec cette interview musclée à l’anglo-saxonne, Emmanuel Macron, Edwy Plenel et Jean-Jacques Bourdin ont fait la démonstration que la France n’a plus de président souverain.
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