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Trois parties pour deux balles!

« Insert Coin » : Flippers, bornes d’arcade et jeux à pièces, une expo à la Monnaie de Paris, jusqu’au 30 juin


Trois parties pour deux balles!
A couple playing arcade games, namely Ms Pac-Man New York City 1er janvier 1985 © Jill Freedman/Getty Images

Venez jouer aux flippers et aux Baby-foot à la Monnaie de Paris dans l’exposition interactive « Insert Coin » jusqu’au 30 juin !


Qu’est-ce que l’identité française ? Concrètement, matériellement, sans thèses fumeuses à la rescousse, sans prêchi-prêcha de chaque côté de l’échiquier politique, je veux du solide, de la pierre de taille, pas de l’évanescent ; je veux du coulé dans le bronze et validé par plusieurs générations depuis l’Après-guerre.

Artistes des comptoirs de bistro

Je l’ai trouvé à la Monnaie de Paris dans l’exposition « Insert Coin » qui nous raconte l’histoire des machines de jeux fonctionnant avec des pièces de monnaie. Une expo frappée par le bon sens populaire qui n’a pas peur de mettre en avant la culture du zinc et du divertissement, les deux mamelles des jeunesses en formation. Sans cette approche bistrotière qui manque tant à nos gouvernements, on ne comprend rien à notre pays, à la liberté et à l’égalité, à une certaine forme aussi de fraternité devant un verre de « Monaco » et un Baby Bonzini. Un homme d’État qui n’aurait pas fréquenté assidument les bars serait-il vraiment apte à diriger une nation comme la nôtre ? Je ne le crois pas. Il lui manquerait la souplesse et la fermeté du poignet pour effectuer une « gamelle », l’albatros de Ballesteros, l’ace de Djoko, la figure artistique des troquets qui faisait d’un joueur lambda de Baby, un élu du quartier ! Il y a des bruits qui nous rappellent notre adolescence, le son de la balle en liège venant taper dans la cage en métal du goal et ressortir par magie, c’est du Brahms à l’heure de l’apéro, une arabesque qui vaut une mauresque.

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Le bâtiment historique qui abrite l’Hôtel de la Monnaie construit au XVIIIème, face aux bouquinistes de la Seine, se transforme en un « Balto » plus vrai que nature jusqu’au 30 juin. On n’est plus dans le VIème arrondissement au printemps 2024 mais à Créteil en 1974 ou à Montluçon en 1983. Les organisateurs ont imaginé plusieurs salles pour chaque décennie, des années 1960 aux années 1990, à chaque fois, une ambiance différente, vinyles, formica, chromes, publicités d’époque et doudous générationnels dans les vitrines, Rubik’s Cub ou 45 tours de Christophe, affiche de Bébel en Pierrot le fou et casque de mob sans visière ; que vous ayez été « jeune » dans les Yéyés, sous Tonton président ou quand Indra chantait le tube « Misery », vous allez vous souvenir de vos quinze ans sans injections de botox.

C’était mieux, avant TikTok

Avant les échanges virtuels, le rade du coin, que vous habitiez en pleine cambrousse ou en banlieue, était le rendez-vous des collégiens et des lycéens. On s’y chambrait, on refaisait le monde à notre sauce sans la tutelle des parents, on était un peu marioles mais on apprenait à interagir socialement. Et accessoirement, on dépensait notre argent de poche en partie de flippers, de Baby et plus tard, sur les bornes d’arcade. « Insert Coin » revient sur l’évolution technologique et sociologique de ce business jadis florissant, signe d’une humanité rieuse et où « le vivre-ensemble » n’était pas un mensonge électoraliste.

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De la fabrication de ces machines au consommateur final en passant par les cafetiers et divers intermédiaires, une chaîne se mettait en place et solidifiait notre ancrage quelque part.

Tract contre l’uranium à Ille-sur-Têt (66) à l’entrée d’un bar lors de la campagne du référendum 28 mai 1978 © Etienne MONTES/Gamma-Rapho via Getty Images

Autant le Baby n’évolua guère dans sa forme, autant le flipper connut des vagues et des modes au cours de ces trente ans d’existence. Celui à l’effigie d’Indiana Jones avec sa tirette lanceur en forme de pistolet recueille un succès phénoménal, des files de gamins de onze ans avec leurs parents s’y agglutinent. Car la Monnaie de Paris a eu la bonne idée de rendre opérationnelle cette fête foraine, bruyante, donc vivante, en remettant à chaque visiteur quelques pièces. On peut donc y jouer « pour de vrai ». Il ne manque que la fumée de cigarettes pour recomposer fidèlement ce tableau et son atmosphère…

Tous ces jeux fonctionnent à l’exception de quelques-uns qui étaient déjà en maintenance après une semaine d’ouverture ; comme durant l’Âge d’or, les flippers ont toujours été sensibles aux manipulations brusques et aux bourrins du super tilt. Voir une grand-mère bourgeoise s’amuser à Pac-Man en compagnie de sa petite-fille me donne plus d’espoir dans le genre humain qu’assister à un meeting de campagne.


11, Quai de Conti. Du mardi au dimanche, de 11h à 18h
Nocturnes les mercredis jusqu’à 21h
Entrée : 12 € (incluant 10 pièces de jeu)

Monsieur Nostalgie

Price: 17,00 €

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Journaliste et écrivain. À paraître : "Tendre est la province", Éditions Equateurs, 2024

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