Eric Zemmour est bien d’accord avec les Femen : le passage éclair du pape François à Strasbourg le 25 novembre est un scandale. Sauf que pour l’auteur du Suicide Français, le souverain @pontifex (son petit nom sur Twitter) n’a pas péché par action, en faisant cette apparition au Parlement européen et au Conseil de l’Europe, mais par omission, en n’allant pas célébrer une messe à la cathédrale.
« Qui suis-je pour juger ? »[1. Phrase reprise par Virginie Tellenne (Frigide Barjot) qui en a fait le titre d’un livre sur son engagement pour l’union homosexuelle et contre l’abandon de la filiation biologique (Qui suis-je pour juger, confessions d’une catho républicaine, éditions Salvator, 2014).] avait répondu François l’Argentin aux quelques journaleux qui tentaient de lui arracher une condamnation des homosexuels. Zemmour, lui, ne se pose pas la question. Il est Zemmour, et à ce titre – notoirement supérieur à celui d’évêque de Rome – il est habilité à juger le « serviteur des serviteurs », accessoirement chef spirituel d’un milliard et demi d’humains.
Alors il s’enflamme, dans sa chronique sur RTL : rendez-vous compte, le pape n’a même pas dit « Dieu » ou « Jésus », ni « avortement », ni « euthanasie », ni « mariage homosexuel ». Bref, « il dit les mots qui plaisent, pas les mots qui fâchent ». Sacrilège, semble s’étouffer notre zorro national ! Pire encore : « Il prône l’accueil généreux des migrants. » Décidément, on aura tout vu.
Un pape qui fait comme un certain Jésus-Christ dans l’Evangile, qui préfère la simplicité au faste, la douceur à la violence, et qui veut une Eglise ouverte sur le monde ? Et pourquoi pas le pardon et l’amour du prochain, tant qu’on y est ? D’autant qu’il y a plus grave encore, accrochez-vous : « Ce pape est obsédé par le dialogue entre le christianisme et l’islam. »
Alors là, forcément, si François n’est même pas cap’ d’appeler à la guerre sainte contre les mahométans, on se demande bien ce qui fait encore la supériorité de l’humanisme chrétien sur la barbarie islamiste ! Vous allez voir qu’un jour, cette pourriture gauchiste va nous expliquer qu’il faut aimer nos ennemis, comme l’autre Palestinien barbu dans la Bible.
« François jette les dogmes aux orties pour complaire à l’époque », explique donc tranquillement le gardien de la foi cathodique. Et d’évoquer « sa complaisance à l’égard du mariage homosexuel », bien connue de tous les catholiques qui ont lu la lettre dans laquelle il déclarait : « L’adoption du projet de loi serait un grave recul anthropologique. Le mariage (formé d’un homme et d’une femme) n’est pas la même chose que l’union de deux personnes de même sexe. »
« Le pape François est l’idole des médias, des députés européens et de la gauche occidentale, accuse enfin le néo-réac chéri de L’Obs. Il n’a pas l’air de s’inquiéter que les habituels contempteurs les plus sarcastiques et vindicatifs de l’Eglise l’applaudissent. » Mon Dieu ! Un pape « qu’adorent nos contemporains progressistes » ! Tous aux abris, le spectre de la réconciliation plane à l’horizon !
Autant il est toujours salutaire d’entendre Zemmour torturer les oreilles chastes de nos progressistes intégristes et autres néo-inquisiteurs médiatiques, autant son sermon condescendant adressé à un pape jugé trop moderne fait un peu pitié. Finalement, depuis la sortie de son best-seller, on se dit que la différence entre Eric Zemmour et un chrétien, c’est l’espérance. Tiens, ça rime avec France…
*Image : Soleil.
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