Pour pouvoir leur résister, il faut être capable d’appréhender les formes nouvelles du combat idéologique
« L’imposteur est un homme qui essaye d’acquérir un pouvoir sur une fraction plus ou moins étendue de l’humanité en lui imposant un mensonge, ou un système de mensonges. Il en tire divers avantages d’orgueil ou d’intérêt. Cela peut aller de l’exploitation de quelques naïfs, à celle de peuples entiers », écrivait Jules Romains en 1944. On voit à quels imposteurs il pensait en cette fin de la deuxième guerre mondiale. Mais voici revenu le temps des imposteurs. Leur technique est toujours la même: « Cette technique a pour objet de frapper l’imagination de la foule en manipulant des émotions de peur ou de haine et de la mettre en état de réceptivité mentale. »
Les imposteurs d’aujourd’hui sont nombreux et divers: les politiciens de l’islam et les prêcheurs incultes qui se servent du Coran et de quelques hadiths pour justifier leur haine des Juifs et des infidèles, les théoriciens du genre, du décolonialisme et du racialisme qui diffusent leurs pseudo-sciences dans les universités et autres lieux de savoir, les technocrates et fonctionnaires de la peur qui manipulent des statistiques au nom d’un principe de précaution tel qu’ils l’ont décidé, les antifascistes autoproclamés qui crient au fascisme dès qu’un semblant de retour à l’ordre apparaît, la gauche totalitaire en quête à nouveau de ces utopies qui ont toujours fini dans les poubelles ensanglantées de l’histoire…
Toute l’œuvre des Philosophes des Lumières au XVIIIème siècle a consisté à tenter de démasquer l’imposture. Leur illusion et celle d’un Victor Hugo plus tard a été de croire qu’il suffisait d’instruire les peuples pour qu’ils ouvrent les yeux et restent vigilants face à l’imposture. Hélas, l’histoire du XXème siècle a prouvé le contraire. Ce qui est survenu au sein du peuple le plus instruit de l’Europe – les Allemands – a bien montré que la connaissance à elle seule ne pouvait prémunir du poison de l’imposture. Le XXème siècle a prouvé que ce ne sont pas les livres qui permettent de faire reculer la superstition et l’intolérance et que ce n’est pas en développant l’instruction qu’on met en fuite l’imposture.
L’instruction permet peut-être – et encore ce n’est pas sûr – de se prémunir contre les erreurs du passé mais en aucun cas elle ne donne une immunité contre les mensonges du présent. Les propagandes fonctionnent encore mieux sur des esprits éduqués qui peuvent croire facilement à un mélange de vérités, de demi-vérités et de mensonges. Seul l’esprit critique est capable de discerner l’imposture.
Aujourd’hui, l’imposture a perfectionné ses moyens. Grâce aux outils modernes de diffusion et de communication, en s’emparant de médias complices et volontaires, au service d’intérêts dissimulés, ou involontaires et aveuglés par le relativisme et l’absence de conscience des enjeux et des pouvoirs en présence dans ce qui ressemble à de nouvelles formes de guerre, elle se met en ordre de marche, une fois de plus.
Il s’agit donc d’un combat idéologique, d’une guerre des idées comparable à celle que nous avons connu par le passé face aux totalitarismes qui faisaient croire qu’ils étaient une nouveauté dans la civilisation, destinée à corriger les erreurs funestes du passé, mais qui en réalité représentaient une terrible régression à des étapes anciennes de l’humanité, soit l’affrontement de tribus ennemies, soit la domination d’un empire sans partage.
Face à ces tentations totalitaires, une fois de plus, nous avons besoin de rassembler nos idées et surtout de réviser l’idée démocratique. Nous avons besoin d’une préparation idéologique qui permettrait de retrouver la confiance dans notre héritage précieux, de ne pas nous confiner à une routine qui nous ferait croire que nous pouvons nous reposer sur la vision d’un passé démocratique qui a pu libérer les peuples des oppressions féodales et que nous sommes encore et toujours portés par l’histoire. Alors qu’il s’agit surtout d’empêcher l’histoire de tourner mal, emportée dans un tourbillon régressif.
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