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Gladiator, c’est maintenant


Gladiator, c’est maintenant
Russel Crowe dans "Gladiator" de Ridley Scott, 2000.
Russel Crowe dans "Gladiator" de Ridley Scott, 2000.

Finalement, cela devait arriver. L’interdit chrétien sur les combats de gladiateurs ne pouvait pas tenir dans un monde où le divertissement est roi. On a ainsi appris qu’une émission russe de téléréalité s’apprêtait en juillet 2017 à lâcher 15 hommes et 15 femmes pour neuf mois en pleine taïga, avec pour seul objectif de survivre. Ce qui a pu inquiéter à raison certains, c’est que le créateur de l’émission, le milliardaire Yevgeny Pyatkovsky, déclare qu’il « refusera toute réclamation des participants, même s’ils devaient être tués ou violés ». Bref, de manière hypocrite et implicite, il est indiqué que tout sera permis, et d’ailleurs les candidats pressentis ont signé un engagement en ce sens.

Si la comparaison qui vient tout de suite à l’esprit est celle de la saga cinématographique de Hunger Games, inspirée des romans pour ados de Suzanne Collins, on songe aussi à la nouvelle d’un maître de la SF, Robert Sheckley, intitulée Le Prix du danger (1958), et qui a aussi donné un[access capability= »lire_inedits »] film de Boisset : « Raeder signa un papier dégageant la JBC de toute responsabilité au cas où il perdrait sa vie, ses membres ou sa raison au cours de l’émission. Et il signa un autre formulaire, selon lequel il exerçait ses droits reconnus par la loi sur le suicide librement consenti. »

Néanmoins, ce qui intéresse ici, c’est de savoir pourquoi il y aura des spectateurs pour goûter à ce jeu. Le mystère reste entier. Il l’était déjà pour saint Augustin, dans Les Confessions, parlant de la métamorphose d’un ami cultivé, Alypius, pourtant futur évêque : « Il se laissa entraîner de façon surprenante par un incroyable désir d’assister aux spectacles de gladiateurs. À la vue de ce sang, il en but en même temps la férocité. Il trouvait du plaisir à ces combats criminels et s’enivrait de voluptés sanglantes. » Et Augustin de conclure, avec une perplexité effrayée qui est toujours la nôtre : « Déjà il n’était plus le même qu’à son arrivée, mais un parmi la populace vers laquelle il était venu, et le vrai complice de ceux par qui il avait été entraîné. Que dire de plus ? »

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