Un long rapport du Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes (HCE) dénonce le sexisme des humoristes et publie une liste de « recommandations » pour lutter contre la violence de cette « arme ».
Dans son premier rapport annuel sur le sexisme (visiblement amené à se renouveler), le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) entend lutter contre la « tolérance sociale » envers les injures et l’humour sexiste. Créneau porteur : Ségolène Royal ne nous apprenait-elle pas déjà dans son dernier ouvrage que « le sexisme est un racisme » ?
130 pages de « recommandations » antisexistes
Lancé par les regrettés Hollande et Vallaud-Belkacem en 2015, le HCE a remplacé l’Observatoire de la Parité. Son champ d’intervention ne se limite plus ainsi à la simple parité en politique. Dirigés par l’ancienne députée socialiste Danielle Bousquet, les cafardages et rapports divers du Conseil ciblent désormais tous les secteurs de la société. Et si vous trouvez que les humoristes n’ont jamais été aussi peu drôles, vous n’avez peut-être encore rien vu…
L’officine publique tente coûte que coûte de nous imposer l’écriture inclusive. Qu’apprend-on du rapport de 130 pages rédigé dans une grammaire « sans stéréotype de sexe » ? Et en quoi les humoristes sont-ils menacés ?
Le sexisme, véritable idéologie mortifère « prônant et justifiant la domination masculine », se nicherait là où on ne le voit pas ou plus. Il n’est pire « sexistes » que les sexistes qui s’ignorent… La « tolérance sociale » vis-à-vis de ces derniers n’a que trop duré. En 2017 une femme sur vingt disait avoir été victime d’injures sexistes. Soit 1,2 million de victimes. Ensauvagement de la société française ? Laxisme des tribunaux ? Vous n’y êtes pas du tout.
L’humour est « l’arme des dominant.e.s au détriment des dominé.e.s. »
Pour le HCE, l’humour français contribue en partie à ce sexisme généralisé, facteur déclencheur de violences verbales, si ce n’est pire : « Il existe un continuum entre les remarques sexistes et les violences. On sait que les injures sexistes entretiennent la culture des violences faites aux femmes », dénonce Mme Bousquet. L’humour est « l’arme des dominant.e.s au détriment des dominé.e.s. » peut-on lire dans le foisonnant rapport ! Des preuves du sexisme sont ensuite apportées :
– Le site Blague.info compile les blagues potaches. Un tiers des « blagues du jour » de ce site, apparemment plébiscité par nos concitoyens, reposerait sur un « ressort sexiste » selon le Haut Conseil, scandalisé. Comme le site est classé premier dans le référencement Google sur le mot « blague », c’est d’autant plus problématique. Honte au délétère algorithme des Californiens qui distille la nauséabonde idéologie macho dans la cour de récré !
– Les youtubeurs Cyprien et Norman se voient eux reprocher que cinq de leurs six vidéos les plus populaires fassent rire aux dépens du sexe faible. Interrogé par Numérama, Cyprien se confond en excuses : « J’ai certainement fait des erreurs sur la représentation de la femme dans mes vidéos, j’en ferai peut-être à l’avenir, mais je travaille pour en faire le moins possible. » De là à ce qu’on puisse dénoncer et faire retirer de tels contenus humoristiques pas bien méchants, il n’y a peut-être que quelques anné Que le HCE ne l’y reprenne plus.
– Enfin, le rapport a écouté les comiques des matinales d’Europe 1, de RTL et de France Inter pendant un mois. Résultat du flicage : « Un ressort sexiste est utilisé par plus de la moitié des contenus humoristiques étudiés» ! Seule la brave Charline Vanhoenacker de France Inter s’en tire mieux que les autres.
Des bons points pour France Inter
France Inter connait d’ailleurs des audiences spectaculaires (+ 350 000 auditeurs au dernier comptage). Ouf, la station est une lueur d’espoir. Léa Salamé, qui s’en est réjouie avec Charline Vanhoenacker, affirme sans rire que sa radio est une sorte de « valeur refuge » pour beaucoup de citoyens en cette période troublée par les violences des gilets jaunes. Elle pourra maintenant ajouter dans son SAV qu’en plus d’une « information sérieuse et pluraliste » (sic) c’est un « refuge » sans sexisme.
Pour Le Monde, les résultats de notre concile sur le sexisme sont « édifiants ». Le triste humour de notre pays contribue à présenter les femmes comme « stupides, agressives ou à les réduire à un objet sexuel ». Le prestigieux journal dénonce ce « sexisme du quotidien caché derrière les blagues » du net et des radios. Le quotidien se console sur un point : « Les jeunes femmes, qui sont particulièrement la cible d’injures à caractère sexiste, font preuve d’une moindre tolérance à l’égard de ces comportements. » Le Monde place donc toute sa confiance dans notre belle jeunesse. Mais on ne sait pas si elle lit Le Monde autant qu’elle consulte Blague Info.
La liste de Bousquet
Ce rapport a pour objet de faire réagir les pouvoirs publics. Forte de ses effroyables constatations, déplorant que la langue française soit bourrée d’expressions sexistes ou que l’épidémie de « manspreading » ne soit pas endiguée, Madame Bousquet appelle le gouvernement à « combattre avec vigueur » cette idéologie « mortifère ». Un plan national est demandé. L’action de la Mairie de Paris est saluée, cette dernière retirant des campagnes de publicité Aubade. Il est demandé au CSA de comptabiliser la répartition des hommes et femmes parmi les comiques sévissant sur nos antennes. Enfin, un musée national des droits des femmes apparaît comme une des priorités !
Que dire….#manspreading ? pic.twitter.com/FDTjqPESS9
— Danielle Bousquet (@dabousquet) 23 mai 2018
Ce rapport semble être un brouillon à partir duquel on légiférera bientôt…
Si cette féminine « soif de pénal » peut paraître anachronique dans la conjoncture politique et sociale, cela transparaît dans le rapport. Marlène Schiappa est plus discrète depuis que la France périphérique a plongé l’exécutif dans la crise. Mais n’oublions pas qu’elle avait accompli l’exploit de remplacer la fracture sociale par la fracture homme/femme avant que nos ronds-points ne soient saturés de jaune. N’oublions pas non plus que le président Macron a fait des « droits des femmes » la grande cause de son quinquennat. Précisons enfin que les bureaux de Mesdames Bousquet et Schiappa sont à la même adresse.
Sur le fil de l’Amérique rasoir
Dans son combat crétin contre l’humour ou les injures, le HCE ne fait que contribuer à l’importation d’une vision américaine de la société. Après Halloween et le « Black Friday », il ne manquait plus que les grilles de lecture des Ricains dans nos rapports sociaux. En se concentrant sur des clivages culturels et des batailles déjà gagnées en Occident, les clivages économiques plus complexes à traiter sont opportunément mis de côté… Et si la rengaine féministe est en sourdine à cause des gilets jaunes, prenons le pari que le rapport sera ressorti à l’occasion d’une actualité moins chargée. Aux Etats-Unis, pendant ce temps, les « masculinistes » se déchaînent contre la nouvelle vision de l’homme que la marque de rasoirs Gillette véhicule.
La cérémonie des Oscars, de son côté, n’aura pas de présentateur, l’humoriste pressenti ayant lui aussi eu des mots malheureux. Tous ces délires ont de quoi rendre plus d’un Français circonspect si ce n’est « néoféministophobe ». Finissons donc par une bonne blague chinée sur Blague Info :
« Comment donner plus de liberté à une femme ? – En agrandissant la cuisine. »
Pouinnnn ! Si le site de blagues ne nous apporte pas l’humour le plus fin, le HCE est parti pour faire bien pire dans le domaine de la liberté d’expression.
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