François Hollande ne reçoit aujourd’hui que ce qu’il mérite, avec le brûlot publié à grand fracas par son ex-compagne Valérie Trierweiler : lorsqu’on se conduit comme un butor, il ne faut pas s’étonner de subir de plein fouet les effets de la plus terrible des haines, celle qui anime les amantes publiquement bafouées. De son maître François Mitterrand, il a appris quelques ficelles permettant la navigation dans les eaux périlleuses de la politique sommitale, mais il a négligé de respecter, comme son mentor savait si bien le faire, les règles de la bienséance en matière de libertinage. Séduire, coucher, quitter, l’ordinaire affectif et sexuel des hommes de pouvoir, cela peut valoir de pénibles désagréments à ceux qui transgressent les bonnes manières de la bagatelle. Rompre élégamment est un art tout d’exécution, qui exclut la fuite honteuse comme la brutalité, pour parvenir, dans les meilleurs des cas, à transformer vos « ex » en un groupe soudé d’admiratrices inconditionnelles.
Ceux qui ne se sentent pas capable de mener ces jeux subtils préfèrent souvent s’abstenir de chercher l’aventure dans le monde des femmes qui virevoltent autour des lieux de pouvoir : journalistes, actrices, intellectuelles, dont la perversité potentielle est décuplée par la surface sociale et éditoriale dont elles bénéficient. Après tout, le bunga-bunga de Silvio Berlusconi, comme jadis la fréquentation assidue des demi-mondaines par Clemenceau et Edouard Herriot, relevaient d’une saine prudence : les professionnelles ne se risquent pas à des coups tordus pouvant mettre en péril leur réputation commerciale…
Aujourd’hui, l’opprobre qui frappe les usagers de la prostitution de luxe contraint les hommes politiques à rechercher dans leur entourage immédiat les « femmes honnêtes » disposées à leur dispenser les trésors de sensualité et de tendresse nécessaires à leur survie dans le monde brutal de la politique : collaboratrices et surtout journalistes politiques, une profession où la présence de femmes, souvent jeunes et bien faites, s’est considérablement accrue au cours du dernier demi-siècle.
Les historiens de la presse considèrent que Françoise Giroud, directrice de la rédaction de L’Express au début des année soixante du siècle dernier, est à l’origine de l’introduction de ce bataillon des amazones de la plume et du micro dans les sphères du pouvoir. Catherine Nay, ancienne de chez Giroud, toujours active à un âge que la courtoisie m’interdit de mentionner, le raconte sans détour au journaliste du Monde Xavier Ternisien : « Le journalisme politique français hérite aussi d’une tradition de séduction, lancée à la fin des années 1960 par Jean-Jacques Servan-Schreiber et Françoise Giroud à L’Express. Le tandem à la tête de l’hebdomadaire avait recruté à dessein de jeunes et jolies femmes pour couvrir la politique. La consigne était de montrer le dessous des choses, la pâte humaine », explique celle qui fut, avec Michèle Cotta[1. Catherine Nay, comme Michèle Cotta une fois leur folle jeunesse passée se sont « rangées » dans un mariage avec un baron du gaullisme pour la première, et une longue liaison publique avec un hiérarque socialiste pour la seconde.], le symbole de ce journalisme féminin glamour.
« Montrer les dessous»… L’expression est savoureuse par son double sens qui révèle la technique permettant de fournir aux lecteurs des magazines un récit de la politique (on dit aujourd’hui un « storytelling ») susceptible de captiver un lecteur rebuté par le morne et aride compte rendu du quotidien de l’exercice du pouvoir, tel qu’il se pratiquait jusqu’alors dans les journaux réputés sérieux.
Oui, j’ose l’affirmer, au risque de subir les foudres des furies féministes : la plupart des journalistes politiques de sexe féminin couchent à droite et à gauche, au propre comme au figuré. Celles, très peu nombreuses qui pratiquent la vertu, par choix, et non par la nécessité liée au peu d’attrait de leur physique, n’hésitent pas à en tirer publiquement gloire, en insistant sur les situations scabreuses dont elles ont réussi à se tirer sans dommages…Les autres se taisent, et poursuivent leur quête inlassable du « pillow talk » qui fait saliver des rédacteurs en chef, les mêmes qui vous traineraient devant les tribunaux si vous compariez leur activité à une forme sophistiquée de proxénétisme.
Ces femmes, néanmoins ont leur fierté, allié à un narcissisme qui n’a rien à envier à celui de leurs amants passagers. Un cocktail explosif…
*Photo : REAU ALEXIS/SIPA. 00626342_000021.
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