Le HCE a publié un énième rapport alarmiste sur le sexisme en France, affirmant que les hommes dominent systématiquement les femmes, oubliant que certains galèrent aussi pas mal… Pour y remédier, il propose encore une fois des mesures discutables comme des quotas, des interdictions de pubs pour jouets genrés ou des congés paternité obligatoires…
Le dernier rapport du Haut Conseil à l’Égalité (HCE) sur l’état du sexisme en France, publié le 22 janvier, présente une vision alarmiste des inégalités entre les sexes, que ce soit dans les médias, au travail, dans le sport ou dans la littérature jeunesse. Selon le HCE, la société serait de plus en plus polarisée autour des questions de genre, avec « d’un côté des femmes plus sensibles au féminisme et de l’autre une partie des jeunes hommes plus sensibles à des positions sexistes très dures, aux discours masculinistes ». Cette insistance sur une oppression systémique qu’exerceraient les hommes sur les femmes apparaît comme très idéologique et suscite des interrogations, tant sur le fond que sur la méthodologie employée par le HCE.
Une définition approximative du sexisme
Tout d’abord, le rapport définit le sexisme de manière extrêmement large, englobant à la fois les actes les plus graves (coups, viols, meurtres) et les comportements sujets à interprétation comme des remarques graveleuses, des blagues ou des commentaires sur une tenue vestimentaire. Une telle approche crée une confusion entre des faits de nature très différente et exagère nécessairement l’importance du sexisme dans la société française.
Ensuite, une grande partie du rapport s’appuie sur le Baromètre sexisme, une enquête d’opinion qui prétend mesurer la prédominance des comportements et représentations jugées sexistes en France. La lecture des réponses laisse penser que la perception des uns et des autres n’est pas aussi biaisée que le rapport veut nous le faire croire, et que les données utilisées par le HCE ressemblent beaucoup à du cherry picking, cette présentation tendancieuse qui ne retient que les éléments favorables à une thèse.
Le mythe de la domination masculine
L’une des conclusions les plus contestables du rapport est que le sexisme relèverait d’un système global qui perpétue la domination masculine. Pour appuyer ses théories, le HCE reprend le concept de la charge mentale, selon lequel la gestion quotidienne du foyer occuperait surtout l’esprit des femmes et nuirait à leur bien-être : « 80 % des femmes font la cuisine ou le ménage au moins une heure chaque jour, contre 36 % des hommes » ; « 83 % des rendez-vous médicaux en ligne sont encore pris par les mères ». Faut-il en déduire qu’il s’agit d’une horrible domination systémique ? Et si les femmes étaient, en moyenne, plus enclines à s’occuper de leur foyer et de leurs enfants, non pas parce que la « société » les obligerait implicitement à le faire, mais parce qu’elles en ont plus de goût pour certaines tâches que leur compagnon ?
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Le HCE s’appuie aussi sur une conviction majoritaire chez les sondés, que les hommes et les femmes ont des comportements différents dans certains domaines : la gestion financière, le rapport au travail, les activités domestiques… À quoi attribuent-ils ces différences, qui peuvent tout aussi bien relever de réflexes sexistes que de choix individuels et préférences personnelles ? La question ne leur a manifestement pas été posée. Parmi tant d’autres choses encore, le rapport reprend la rhétorique féministe habituelle sur les inégalités salariales ou, devrait-on dire, l’écart salarial entre hommes et femmes.
Il est sûrement significatif que le rapport du HCE ne dise rien des problèmes que rencontrent les hommes dans des domaines qui les concernent plus spécifiquement, et qui sont systématiquement passés sous silence dans ce type d’analyse. Rien sur le taux de suicide supérieur (notamment parce qu’ils sont plus enclins à utiliser des moyens plus radicaux comme les armes à feu) ; sur la surreprésentation dans les prisons ; sur le plus gros pourcentage de décrochage scolaire, etc. À en croire les chiffres du HCE lui-même, ils seraient de plus en plus nombreux à estimer qu’il est difficile d’être un homme dans la société (45 % des moins des 15-24 ans, une hausse de 19 points en deux ans). Là encore, de quelle domination parle-t-on ?
Les recommandations dangereuses du HCE
Pour remédier à ce qu’ils considèrent comme une situation inéquitable, les membres du HCE font une série de recommandations. Dans le domaine de l’éducation, ils proposent un programme effectif d’éducation à l’égalité censé sensibiliser enfants et adolescents au respect du corps, aux émotions et à la déconstruction des stéréotypes. Ils restent flous sur le contenu exact d’un tel programme mais on a pu voir que la moindre critique ou objection est immédiatement cataloguée comme réactionnaire, « anti-droits » et « anti-choix », en particulier lorsqu’elle provient d’organisations familiales qui s’inquiètent de l’influence de la théorie du genre à l’école. Le HCE la présente comme un fantasme, alors même que des directives comme la circulaire Blanquer sur l’identité de genre en milieu scolaire montrent bien les pressions idéologiques à l’œuvre.
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D’autres propositions sont tout aussi contestables. Citons, par exemple :
- l’interdiction de la publicité pour les jouets genrés, qui revient à légitimer une intervention excessive de l’État dans le domaine commercial et à ignorer par ailleurs les préférences des enfants ;
- les quotas de filles dans les filières de l’informatique et du numérique pour « réduire l’écart salarial et assurer une plus grande mixité et parité dans le monde professionnel », mais qui sous-entendent clairement que les femmes auraient besoin d’un traitement de faveur pour réussir dans des domaines techniques ;
- l’instauration d’un service public de la petite enfance, sans qu’il soit expliqué en quoi cela répondrait à un besoin réel, ni comment il serait financé ;
- le congé paternité obligatoire, concomitant au congé maternité de 16 semaines. Une mesure qui se veut progressiste mais qui, en imposant un modèle familial unique, prive les parents de leur liberté de choix sur l’organisation de leur vie ;
- le délit de sexisme, présenté comme un « véritable outil juridique de condamnation du sexisme ». Il est probablement inconstitutionnel et contribue à enfermer les femmes dans une posture permanente de victimes qui nécessiterait une protection spécifique.
Le HCE, un organisme dépendant du pouvoir politique
Créé sous la présidence de François Hollande en 2013, le HCE apparaît comme un organe avant tout politique, bien plus préoccupé par la diffusion d’une idéologie que par un travail rigoureux d’analyse des rapports sociaux. Il est dépendant du pouvoir exécutif (ses membres sont nommés par arrêté du Premier ministre, sur proposition du ministre des Droits des femmes), composé de « personnalités qualifiées », est-il dit sur le site sans autres précisions sur leurs compétences, bref il a le profil type de ces « machins » de plus en plus dénoncés dans le contexte actuel de réformes et simplifications nécessaires. À la lecture de son rapport, il n’est en effet pas flagrant que ses travaux soient vraiment nécessaires.
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