Les plans sociaux pourraient se multiplier dans l’industrie en France. À l’habituelle menace normative s’ajoute maintenant la menace fiscale, fragilisant dans la compétition internationale jusqu’à nos plus puissants groupes.
Depuis plusieurs semaines, les plans sociaux se multiplient dans les usines françaises. Auchan et Michelin ont déjà annoncé la suppression de milliers d’emplois et selon le nouveau ministre délégué chargé de l’Industrie, Marc Ferracci, « des annonces de fermetures de sites, il y en aura probablement dans les semaines et les mois qui viennent ».
Conjoncture pas rassurante pour les gros industriels tricolores
À court terme, le secteur automobile est le plus menacé : 32 000 suppressions de postes en Europe ont déjà été annoncées au premier semestre 2024, soit plus que pendant la pandémie de Covid, dans ce secteur qui emploie 1,7 million de salariés en Europe. Mais plus largement, ce sont tous les champions industriels français qui sont affectés.
Si cette tendance devait se confirmer, ce serait une catastrophe pour les territoires où ces grandes industries jouent un rôle prépondérant sur le plan économique et social. Les usines permettent non seulement de générer directement des milliers d’emplois, mais elles alimentent aussi le tissu économique local grâce aux sous-traitants et partenaires avec lesquels ces entreprises travaillent. Enfin, elles irriguent indirectement les économies locales par des dépenses diverses auprès de commerces et surtout les taxes locales. Un rôle d’autant plus important qu’elles sont souvent implantées dans des territoires où les opportunités économiques sont plus fragiles, et donc fortement dépendants de leur activité. En outre, leur présence historique leur confère un poids social clé au niveau local où plusieurs générations se sont souvent succédé au sein des usines concernées. Aussi, il est plus qu’urgent de prendre des mesures dès maintenant pour permettre aux champions industriels français d’affronter la crise qui se profile. Pourtant, l’actualité n’est guère rassurante.
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Depuis des années, la France et l’Europe ne cessent d’imposer des restrictions de plus en plus nombreuses aux industriels qui contraignent leurs capacités de production et affaissent directement leur compétitivité. Autant de règles auxquelles ne sont pas soumis les concurrents étrangers qui profitent de la situation pour grignoter durablement les parts de marché des acteurs historiques déjà fragilisés par l’explosion du coût des matières premières et de l’énergie.
Révolution dans l’automobile
Le secteur automobile est un cas d’école. L’électrification à marche forcée du secteur décidée par l’Union européenne a déstabilisé une industrie où l’Europe disposait d’un savoir-faire inégalé dans le monde, mais pas de batteries électriques… Conséquence : Stellantis, Renault ou Valéo sont aujourd’hui en grandes difficultés.
Et d’autres leaders économiques clés pour la France sont directement ciblés par l’accroissement des normes environnementales, comme CMA CGM dans le domaine du transport et de la logistique, le groupe Seb pour l’électroménager, le groupe Bouygues dans le BTP, TotalEnergie pour l’énergie, etc. Autant d’entreprises dont l’activité pourrait être mise en péril ainsi que les milliers d’emplois qui vont avec.
A cette menace normative s’ajoute maintenant la menace fiscale. Le débat relatif au budget 2025 a fait paniquer le monde des affaires avec l’apparition à l’Assemblée nationale de nouvelles taxes en tout genre qui ont fait grimper la charge fiscale à plus de 35 milliards d’euros contre 10 milliards de hausse prévue à l’origine. Des mesures suicidaires dans un contexte marqué par un marché assez peu dynamique, avec une perspective d’accroissement des coûts en salaires que les entreprises ne peuvent pas maîtriser.
Si le budget 2025 a finalement été rejeté par l’Assemblée nationale, la menace plane toujours avant son examen par le Sénat qui sera scruté de près par tous les grands industriels. D’autant qu’interrogé sur les plans sociaux en cours, le ministre de l’Economie Antoine Armand n’a pas rassuré en déclarant qu’il serait « probable » qu’il y ait d’autres mauvaises nouvelles économiques « dans le courant des mois à venir ». On comprend bien que lui, il a les dossiers, et sait que l’année à venir sera très compliquée… Dans ce contexte, il n’est pas certain que son souhait de débloquer en priorité 1,6 milliard d’euros pour décarboner l’industrie soit le signal attendu par les entreprises, petites ou grosses, qui auront besoin de beaucoup plus pour passer la vague. Pas d’aides : mais de dérégulation, de déréglementation, bref, de plus de liberté pour changer de cap et éviter de couler !
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