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C’est l’hallu finale!

En AG, à Tolbiac, les étudiants ont voté l’instauration d’un 10 améliorable afin de permettre à "toutes et tous" de se mobiliser sans redoubler


C’est l’hallu finale!
"Auto-conférence de la Commune libre de Tolbiac", 4 avril 2018. © Yannick Coupannec/Leemage

Le « 10 améliorable », note plancher


Tous ensemble, toutes ensemble : grève générale ! « En plein mouvement contre la réforme des retraites, nous considérons que chacun doit pouvoir se mobiliser pour son avenir sans être inquiété.e de redoubler. En conséquence, nous exigeons que soit mise en place à Paris 1 la note plancher du « 10 améliorable » pour les examens de fin de semestre, et que tous les enseignements soient banalisés pour mettre fin aux politiques d’assiduité qui pénalisent celles et ceux qui combattent les politiques du gouvernement » (Assemblée générale, centre Tolbiac, 4 avril). Ni Dieu ni Masters ! C’est l’hallucination finale !

Le partiel est au bout du fusil

Les assemblées générales inter-facs, apprentis insoumis néo-maos-trotskystes, champions du tri non sélectif et des incendies de poubelles, manquent d’imagination et d’ambition…Tout ça pour un 10/20 ! Le partiel est au bout du fusil, camarades ! Soyez réalistes, exigez des « 18 améliorables », le vin et l’agreg pour tous ! Il y a deux générations, Jacques Martin avait inventé une école citoyenne, inclusive, bienveillante, démocratique et participative, L’école des fans, 10/10 pour tous ! 

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Terreur pipole de Saint Germain-des-près, génération Bob L’éponge, l’activiste Juan Branco, avocat sanguinaire et sans examen d’accès à l’Ecole d’Avocats (qu’il intègre par équivalence), lâche une bombe dans Coup d’Etat, son dernier brûlot : « La fin des rois approche, et la lame sanglante, sur leur nuque fraîche et préservée, s’apprête à tomber ». Billy the Kid ne met pas la barre très haut : son ennemi mortel, c’est Emmanuel Macron. N’est pas Robespierre, Thiers ou Vergès qui veut. Attention Juan : la Révolution dévore ses enfants et les bébés requins de l’eau du bain ! Avant la Révolution, Marat, 1er de Corday, intrigua en vain pour faire reconnaître une fausse noblesse espagnole et enregistrer un blason. L’appétit vient en mentant, 1789 rend lyrique : « La grandeur du crime est la seule différence qu’il y ait entre un conquérant et un brigand… C’est par la violence que l’on doit établir la liberté ». Touche pas à mon Pol Pot ! Adolescent, Tourgueniev avait accroché un portrait de Fouquier-Tinville dans sa chambre. On ne la fait pas à Arletty : « Les terreurs j’en suis revenu, elles ont surtout la terreur du boulot ». Jean Yanne est raccord : « Les hommes naissent libres et égaux en droit. Après ils se démerdent ».

L’UNEF a été braquée par L’Alternative, nouvelle fédération étudiante téléguidée par LFI. Louis Boyard, Blague Bock Bambino-Bambino de la Nupes, a trouvé un slogan de Mai 68 à sa pointure : « J’ai quelque chose à dire, mais je ne sais pas quoi ». Annie Ernaux -Comtesse de c’est dur et des malheurs de sophismes- fulmine : « Penser que des gens mourront avant d’être à la retraite est quelque chose de très violent ». Good bye Staline… La véritable héritière du joli Moi de Mais, de la Société du spectacle, Mille Plateaux télé, c’est Marlène Schiappa. Sur BFMTV, dans Playboy, ses romans libertins, elle vit sans temps mort et jouit sans entraves. La Cause des femmes est plus rentable que celle du peuple. Deux générations plus tard, les soixante-huitards oligophrènes, greluchons diversocrates, Racaille le Rouge ont gagné la partie. Comme la République, la bêtise est une et indivisible. « Ne dites plus : Monsieur le Professeur, dites: crève salope ! Penser ensemble, non. Pousser ensemble, oui ! Prenons nos désirs pour des réalités ! ». Le niveau baisse dans tous les coins.

Identification d’une flemme

Conçue entre deux hashtags et trois textos, ardente, pâle, nerveuse, coupée de ses racines, vampirisée par les écrans et réseaux sociaux, la jeunesse peine à se projeter en dehors de TikTok et des incendies de scooters électriques. « Les Trissotin lui ont appris (à l’élève) l’art d’écraser un texte littéraire entre l’enclume des pseudo-concepts linguistiques et le marteau des bonnes intentions civico-humanitaires (…) Reste que l’enseignement du français ne peut être considéré comme un champ de ruines parmi d’autres, parce qu’en s’effondrant, la maîtrise de la langue et la compréhension des textes écrits ont emporté avec elles la capacité d’argumenter et l’intelligence critique » (Pierre Mari).

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Les programmes extra-light, discours creux faisant parler les orphelins et les esprits enfantins, la fausse monnaie de l’évolution des connaissances, rien n’y fait, tout va de mal en PISA, la glissade continue : le roman de l’aboulie nationale. Les politiques démagos, syndicats corporatistes, cacographes héraults des marqueurs d’énonciation, ont coulé l’école de la République et la méritocratie. Parcoursup et les algorithmes ont achevé le mammouth. La modernité pédagogique ne date pas d’hier. En 1804, Stéphanie de Warhouf publiait un opus iconoclaste : Vélocifère grammatical ou la langue française et l’orthographe apprises en chantant (ouvrage très élémentaire, unique en son genre, mis en vaudevilles et dédié aux Demoiselles, suivie De l’arithmétique des dames, ouvrage simplifié et à la portée des personnes les moins intelligentes).

Dans le 8e arrondissement, les émigrés factieux soucieux de blés flamands et de coton anglais, multicultu.râlent et slaloment pour échapper à Parcoursup… Un LLB à McGill (Montréal) ? Une école d’archi en Italie ? Les parents de L’Auberge espagnole doivent financer la Salade Grecque des enfants. À l’heure où blêmit l’hypokhâgne – les yeux fixés sur leurs pensées, tristes, le dos courbé – les grands-parents regrettent Rosemonde Gérard, Marcel Pagnol, l’odeur de l’encre, la craie, le calcul, les dictées.

Pas facile de sortir de l’ornière ; le terrain est miné. Pas de vagues. Des pistes sont étudiées en haut lieu depuis cinquante ans… Depuis cinquante ans, en haut lieu… Cinquante ans depuis, en haut des pistes… : Remplacer les divisions de profs démissionnaires par des ‘droit commun’, contre une remise de peine ? Abandonner les méthodes transversalo-globalo-visuelles de lecture et les Enseignements Pratiques Interdisciplinaires ? Oublier les adaptations d’Iphigénie en rap(t) et les châteaux-forts en pot de yaourt ? Imperturbable dans la tourmente, Pap N’Diaye garde son flegme (la marque des grands serviteurs de l’État) et occupe le terrain : le harcèlement dans les Maternelles Moyenne section, la mixité sociale à l’École Alsacienne… « Je suis sûrement plus complexe que l’on a pu le penser. Je gagne à être connu ! ».

Les premières victimes de l’effondrement culturel et pédagogique, ce sont les classes populaires. « Ce qui rend notre culture si difficile à communiquer au peuple, ce n’est pas qu’elle soit trop haute, c’est qu’elle est trop basse. On prend un singulier remède en l’abaissant encore davantage avant de la lui débiter par morceaux » (Simone Weil).

Pourquoi le buste en bronze de Samuel Paty est remisé dans un entrepôt plutôt qu’au Collège du Bois d’Aulne ? De qui, de quoi, a-t-on peur ? Qui fait la loi ?




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