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Haïssable moi

Un "homme enceint" fait la une du magazine "Glamour" au Royaume Uni


Haïssable moi
Logan Brown Glamour

Logan Brown brise les tabous, se réjouit la presse progressiste


Ils font la couverture du magazine Glamour (édition anglaise). Ils au pluriel parce que, contrairement à ce qu’il semble à première vue, ils sont plusieurs. Ils au masculin parce que je me contrefous des diktats nouveaux en matière de syntaxe prétendument inclusive. Plusieurs, disais-je. Un monsieur, une dame, un enfant à naître. Le tout réuni en un seul individu. Cet état multiple, croit-on comprendre, fait la fierté de ce personnage. C’est en effet à l’occasion du mois des fiertés LGBT (et dérivées) que cette exposition médiatique nous est proposée. On ne pouvait trouver plus parlant, il est vrai.

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Je vais à présent m’efforcer de rendre compte de ce fameux pluriel. Voilà : le personnage photographié est un homme. Du moins s’affirme-t-il comme tel au moment de la prise de vue. Il porte un enfant. Pas dans ses bras, banalement, comme nous le ferions vous et moi. Non, dans son ventre. Manifestement le terme est proche. Ainsi, avec fierté (puisqu’on y est…) le sujet revendique la gloire d’apporter au monde émerveillé la preuve vivante qu’il est possible d’être à la fois homme et enceint. (On ne prétend pas encore que ce serait « normal », mais ne nous inquiétons pas trop, d’aucuns s’emploient à ce que cela devienne avant peu une évidence « sociétale » pour tout un chacun »). Cela dit, osons une minuscule réserve, une broutille de rien. Il y aurait en effet l’ombre d’une tromperie dans la présentation de ce bel agencement et la revendication triomphale évoquée à l’instant, car ce n’est pas l’homme qu’il est aujourd’hui qui a été mis enceint mais la femme qu’il était au moment du coït… (Vous me suivez ?) Notre fier héros est, on l’aura compris, une femme repentie ayant entrepris son chemin de conversion. Une précision tout de même : à moins bien sûr que, comme dans Molière, « on ne fasse aujourd’hui la médecine selon une méthode toute nouvelle », il faut bien que le dispositif anatomique mobilisé pour cet heureux événement ait été plutôt féminin. Donc, homme, notre « cover symbol » ne le serait que de très fraîche date. Une sorte de vendange tardive, pour dire gaiement les choses. (On me pardonnera d’en rester à ces données physiologiques traditionnelles. J’avoue ne pas me tenir très au courant des dernières évolutions.)

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Cependant, on n’omettra pas de noter que l’accouché(e) aura tenu à manifester sa réprobation devant ce qui lui a semblé être un grave déficit de formation des personnels soignants mobilisés par son cas. Nous autres, nous comprenons fort bien leur désappointement. Lui, non. Son ego trinitaire méritait infiniment mieux, à n’en pas douter. En fait, nous nous trouvons devant l’expression la plus achevée du culte du moi. Nous voici confrontés à l’individualisme porté à son paroxysme, à l’égocentrisme dans sa phase ultime, au nombrilisme dans ses excès les plus délirants : concentrer sur sa petite personne tous les sexes (je passerais pour ringard en limitant à deux), se vouloir le maître de la paternité et de la maternité réunies, soumettre à sa volonté, à son désir, à son caprice, éventuellement à ses intérêts les lois de la nature, bref, s’affirmer comme l’alpha et l’oméga de toute chose. Oui, voici que viennent les temps de l’Homme total, de l’Homme totalitaire en vérité, l’Homo Autarcicus, l’Homme sans Dieu et qui se prend pour Lui. Le plus désespérant est que, sous peine d’accusations de transphobie et autres anathèmes nous nous voyons contraints de saluer bien bas, d’applaudir, d’encenser. Pour ma part, j’attendrai de pouvoir juger aux conséquences. Un enfant est né de cette bizarrerie. Ménageons-nous le temps de voir ce que donnera à terme le foudroyant départ dans la vie que son géniteur merveilleusement polyvalent lui a, non pas offert, mais imposé.

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Ex-prof de philo, auteur, conférencier, chroniqueur. Dernière parution : « Moi, papesse Jeanne », éditions Scriptus Malvas

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