Est-ce l’anniversaire du 6 février 1934 qui rend nombre de dirigeants politiques légèrement hystériques ? En écoutant les réactions outrées de l’opposition aux déclarations de Claude Guéant, c’est à se demander si la gauche cherche un Goldstein de substitution depuis le lifting républicain du Front National.
Approuver la phrase, au demeurant plutôt anodine, du ministre de l’Intérieur est une chose. S’en offusquer en est une autre. Le plus drôle dans cette énième affaire d’indignation pavlovienne, c’est que les neuf dixièmes des personnes choquées partagent de facto le jugement de Guéant. Tous ces gentilshommes du PS ou du Front de Gauche qui crient aujourd’hui à la « xénophobie d’Etat » n’ont de cesse de proclamer la supériorité du modèle républicain, et du triptyque Liberté-Egalité-Fraternité. Bref, « toutes les civilisations ne se valent pas » est probablement l’une des assertions les plus consensuelles du paysage politique hexagonal.
Notons d’ailleurs que Claude Guéant n’a pas parlé de « culture » mais de « civilisation »[1. Une civilisation est en quelque sorte une culture arrivée à son paroxysme, qui se développe puis décline en s’universalisant si l’on suit la définition de Tönnies], terme universaliste qui devrait faire le bonheur des héritiers de Jules Ferry que sont nos si lisses responsables politiques.
Après tout, sans jouer les vierges effarouchées, on peut parfaitement contester l’opinion de Guéant. Car, à bien des égards, les civilisations sont incommensurables, et le jugement que l’on porte sur l’une ou l’autre dépend largement de notre ancrage…civilisationnel. A tout prendre, seule la colère des Verts est compréhensible : pluralistes multiculturels assumés, les Europo-Ecologistes refusent tout ancrage culturel et national particulier. Eux au moins méritent la palme de la cohérence (à moins qu’ils ne la boycottent, comme l’huile du même nom…).
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