Le retour aux bonnes vieilles méthodes de droite souhaité par le ministre de l’Éducation émeut les partisans de l’égalitarisme scolaire. Le regard libre d’Elisabeth Lévy.
Gabriel Attal veut créer des groupes de niveau en maths et en français au collège. À en juger par le niveau du braillomètre, c’est une excellente mesure. Toute la gauche politique, médiatique et enseignante est en émoi. Les médias de service public communient dans la réprobation. Des syndicats de profs et des fédérations de parents d’élèves dénoncent une volonté de ségrégation sociale.
Le ministre s’attaque aux vaches sacrées
Najat Vallaud-Belkacem et Benoît Hamon, deux ex-ministres dont on se rappelle surtout les « ABCD de l’égalité » et ce genre de fadaises accusent le ministre de vouloir faire du tri social. Selon Benoît Hamon, instaurer des groupes de niveau en 6ème, c’est « décréter dès la 6e qu’il va y avoir des élèves à la cave, des élèves au rez-de-chaussée et des élèves au premier étage ». Avec lui et ses amis, le problème est réglé: tout le monde à la cave.
Tous ces gens reprochent à Gabriel Attal de s’attaquer en loucedé à la vache sacrée de l’égalitarisme scolaire. Selon Mediapart, il « torpille le collège unique »[1]. Le site d’Edwy Plenel n’a pas complètement tort, et Gabriel Attal a mille fois raison de le faire.
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On réquisitionne les habituels sociologues pour mettre un vernis scientifique sur l’idéologie. Toutes les études, dit-on pompeusement, prouvent que les groupes de niveau sont inefficaces. Peut-être, mais on n’a pas besoin d’études pour savoir que le collège unique a fabriqué des générations d’ignorants. L’inévitable François Dubet lâche le grand mot: ce sont des slogans et des mesures « conservatrices »[2]. C’est de droite, donc c’est mal. Peut-être que justement, l’éducation a vocation à être conservatrice.
L’égalitarisme contre la méritocratie
Cependant, l’étude PISA montre un accroissement considérable des inégalités. En effet, 20% des élèves français sont au niveau de ceux du Kazakhstan quand 20 % sont au niveau des meilleurs, les Sud-Coréens. L’école reproduit des inégalités sociales.
Mais c’est justement le bilan du collège unique. Depuis 50 ans, nous avons vu la multiplication des mesures égalitaires, et depuis cinquante ans les inégalités se creusent. Preuve que l’égalitarisme est contre-productif. Le refus de la hiérarchie, de la compétition ou de la notation, n’a pas amélioré le niveau des mauvais mais favorisé la fuite des bons – souvent les plus privilégiés. L’école publique s’est mise à suspecter les bons élèves. Au nom d’une fausse bienveillance, on a cessé de demander des efforts aux plus pauvres. Et pour cacher les conséquences de cette politique désastreuse, on a traité de réacs (quand on était poli !) tous ceux qui dénonçaient la baisse du niveau qui nous explose aujourd’hui à la figure.
Ce renoncement à la méritocratie, à l’élitisme républicain -une invention de la gauche rappelons-le- est d’abord une insulte aux classes populaires que ces beaux esprits jugent incapables d’accéder à l’excellence. Voilà pourquoi ils veulent en finir avec l’idée même d’excellence.
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[1] https://www.mediapart.fr/journal/france/051223/groupes-de-niveaux-redoublement-brevet-gabriel-attal-torpille-le-college-unique
[2] https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/education-nationale-les-slogans-conservateurs-ne-font-pas-une-politique-efficace-par-francois-dubet-20231201_IDJZ2OYA5VHIVFNQTLYBDOT2XE/
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