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Du bikini au burkini

Autoriser le burkini dans les piscines de France est une capitulation


Du bikini au burkini
Eric Piolle lors du meeting de Yannick Jadot le 29 janvier 2022 à Lyon © Bony/SIPA

À Grenoble, la justice a suspendu hier soir l’autorisation du burkini. Mais il n’est pas certain que le Conseil d’État, saisi par Eric Piolle, suive. L’autorisation du port du burkini dans les piscines de Grenoble n’est pas anecdotique. Elle est une agression pour les femmes et la culture ou les mœurs françaises. Votée par le conseil municipal de la ville iséroise le 16 mai, elle relance un débat que la gauche estime insignifiant quand elle ne l’instrumentalise pas à des visées électoralistes (captation d’un vote communautaire musulman). L’analyse de Françoise Bonardel.


Non, ce n’est pas un fait divers anecdotique dont on pourrait se détourner pour vaquer à des affaires plus dignes d’intérêt. La légalisation du port du burkini dans les piscines, si elle était adoptée ailleurs que dans quelques fiefs islamo-gauchistes, serait une soumission au nouvel ordre moral supposé français dont une jeune blogueuse voilée a récemment fait la promotion dans les médias avec un aplomb qui devrait nous interpeler. Mais sommes-nous encore capables de dire « non » à cette nouvelle provocation, ou bien est-ce quelque chose que nous ne savons plus faire et que nous habillons de bons sentiments et de « compréhension » alors que ce qui est à comprendre se situe ailleurs, et qu’il sera bientôt trop tard pour le faire ? On appelle même ça en français « se voiler la face », et il serait temps que nous retrouvions la lucidité propre à notre culture en ôtant le voile mental qui nous empêche de regarder la réalité en face. Car « voilés » nous le sommes, et peut-être est-ce une des raisons pour lesquelles nous pactisons si spontanément avec ce qui nous défie avant de nous détruire.

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Pas juste un maillot de bain différent des autres

Non, le burkini n’est pas un vêtement parmi d’autres, revêtu par des femmes musulmanes désireuses de continuer à s’habiller comme les filles de leur pays d’origine ou de lancer une nouvelle mode, provocatrice dans une société où les femmes se dénudent. On le saurait, si c’était là une affaire de femmes parlant chiffons, et rigolant entre elles de leur dernière invention ! Si c’était le cas, des filles non musulmanes porteraient parfois elles aussi le burkini, histoire de changer de look et de s’affranchir des modes occidentales comme on le fit en Europe dans les années 1970 en arborant des vêtements indiens et afghans. Le mot de ralliement était alors peace and love, et l’on croyait la fraternisation d’Allah et de Krishna encore possible. Il n’en est plus de même aujourd’hui et le burkini est devenu, comme la burqa dont il est le diminutif vestimentaire, un signe religieux on ne peut plus ostentatoire, et une des armes de la « guerre sainte » menée contre les mécréant(e)s aux mœurs impures.

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Non, le burkini n’est pas un maillot de bain juste un peu différent des autres dont il faudrait tolérer le port au nom de la diversité des goûts et des couleurs dont se glorifie la société française. Ce n’est tout simplement pas un maillot de bain, mais un vêtement recouvrant de la tête aux pieds le corps féminin et dont on se demande même, vu l’abondance de tissu nécessaire à sa confection, s’il n’entrave pas la nage. Car telle est la double utilité – sanitaire et fonctionnelle – du maillot de bain classique dont le minimalisme est avant tout utilitaire : faciliter les gestes de la nageuse dont il épouse le corps au plus près, et réduire au maximum les risques sanitaires en utilisant des tissus faciles à nettoyer, et ne recouvrant qu’une surface limitée de peau directement exposée aux jets de la douche par laquelle on doit passer avant d’entrer dans l’eau. Pourquoi devrait-on revoir à la baisse cette mesure d’hygiène élémentaire pour satisfaire une revendication communautaire ? La douche étant obligatoire avant le bain et recommandée après, comment les femmes portant le burkini vont-elles satisfaire à cette exigence de propreté sans dénuder une partie au moins de leur anatomie ? Va-t-on d’autre part considérer que le burkini couvrant la tête est un substitut suffisant du bonnet de bain caoutchouté, ou bien va-t-il falloir imposer aux femmes musulmanes de revêtir ce second bonnet, au risque d’être accusé d’acharnement hygiéniste aux relents islamophobes ? Ne parlons même pas de l’atmosphère créée, dans l’espace réservé aux femmes, par le port de ce « maillot » qui n’en est pas un, et qui va indirectement stigmatiser celles qui ne le portent pas !

Assimilation au bain français

Non, le port du burkini n’est pas une manière de s’intégrer à la société française comme le prétendent certaines militantes, disant se sentir exclues des piscines et plus généralement de l’espace public si on ne les autorise pas à offrir en même temps à Allah la preuve vestimentaire de leur pudeur. Étrange conception de la pudeur d’ailleurs que ce besoin d’en exhiber constamment les signes ! La manière par contre dont ces militantes jouent sur les deux tableaux devrait nous préoccuper puisque c’est au nom de leur « intégration » supposée à la société française qu’elles revendiquent d’arborer ce signe de séparatisme qui, si la loi en légalisait l’usage, les placerait en fait en situation dominante pour au moins deux raisons : parce qu’elles auraient obtenu gain de cause en dépit des protestations que suscite leur revendication, et parce que leur victoire contribuerait à démontrer qu’on peut impunément se servir des valeurs de tolérance de la société française pour la déconstruire, la remodeler au profit de l’intégrisme islamiste que les pouvoirs publics, trop indulgents à l’endroit de ce type de dérive, prétendent dans le même temps combattre.

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Alors non, décidément non au port du burkini dans les piscines comme de la burqa dans l’espace public français. Pourquoi d’ailleurs les femmes adeptes du naturisme ne revendiqueraient-elles pas elles aussi le droit de se baigner dans les piscines en string et les seins nus ? Au nom de quoi une revendication religieuse serait-elle plus respectable qu’une motivation libertaire ? On pourrait tout aussi bien imaginer que des prêtres intégristes fréquentant les piscines fassent également valoir leur « droit » – ne sont-ils pas citoyens français ? – de dissimuler leur corps derrière un vêtement enveloppant qui serait l’équivalent de leur soutane, et qui les protégerait du regard indiscret des femmes. Le spectacle serait alors cocasse de voir tous ces grands poissons mâles et femelles d’une espèce jusqu’alors inconnue déployant leurs nageoires dans l’eau des piscines, les uns au nom du Christ et les autres en celui d’Allah, tandis que les autres nageurs, excédés ou convaincus de leur indignité, finiraient par déserter les lieux ; le problème commençant également à se poser sur les plages.

Dommage que le sel marin qui dissout les impuretés physiques plus efficacement que ne le fait l’eau des piscines, ne puisse faire de même avec les idées folles !




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est philosophe et essayiste, professeur émérite de philosophie des religions à la Sorbonne. Dernier ouvrage paru : "Jung et la gnose", Editions Pierre-Guillamue de Roux, 2017.

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