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Jacqueline Sauvage: paysage après la bataille


Jacqueline Sauvage: paysage après la bataille
Rassemblement sur le Parvis du Trocadéro à Paris pour réclamer la libération de Jacqueline Sauvage, décembre 2016. SIPA. 00784814_000018
Rassemblement sur le Parvis du Trocadéro à Paris pour réclamer la libération de Jacqueline Sauvage, décembre 2016. SIPA. 00784814_000018

L’affaire Jacqueline Sauvage qui occupe les médias mainstream depuis plus d’un an est finalement un étonnant révélateur des contradictions qui travaillent actuellement la société française. Qui en dit long sur la déliquescence d’un système politique et médiatique qui n’en finit pas de partir en lambeaux.

Nous avions déjà l’antiracisme petit-bourgeois, élevé au rang de valeur cardinale par des gens pourtant apôtres d’une société communautaire racisée, et brandi comme un signe extérieur de richesse par les bénéficiaires de la globalisation. Voilà que s’affirme désormais l’hégémonie du féminisme victimaire des groupuscules parisiens. Il obéit à la même logique en mettant en avant l’image d’une femme mineure et éternelle victime soumise sans pouvoir s’en émanciper un patriarcat oppresseur. Et exactement comme pour le racisme, que l’on va le plus souvent chercher là où il n’est pas, on n’hésite pas à enfourcher de mauvaises causes au risque de dévoyer les vrais et les justes combats. Mais qu’importe le réel, la vérité, ou la morale puisqu’il ne s’agit en fait, en congédiant le réel, que de se donner bonne conscience à peu de frais et de prendre la pose. L’idéal étant quand, à l’aide du relativisme culturel comme Benoît Hamon ou Clémentine Autain, on peut faire fusionner antiracisme et féminisme en célébrant par exemple, le droit des intégristes musulmans à enfermer et bâcher leurs épouses au nom de la tradition et de la liberté de celles-ci d’accepter ce qui leur est imposé. Féministe et  anti-islamophobe, coup double.

Un enchaînement de réactions lamentables

Le combat pour l’élargissement de Jacqueline Sauvage au nom de la lutte contre les violences faites aux femmes est une mauvaise cause. Simplement parce que l’histoire que nous assène jour après jour la propagande médiatique, est fausse. Jacqueline Sauvage n’a pas été la victime pendant 47 ans d’un mari violent, qu’elle n’a pas abattu froidement de trois balles dans le dos pour se protéger. Le dossier, et tous ceux qui ont eu à en connaître racontent une autre histoire, celle d’une femme de caractère qui dominait sa famille et n’a pas supporté de la voir en échec. Et c’est à partir de cette réalité-là que les juridictions ont statué. C’est la raison pour laquelle lorsque François Hollande, dans une grande première dans la vieille histoire de l’usage de ce droit régalien, a décidé après une première grâce partielle, une deuxième totale un an après, a commis une mauvaise action. Provoquant un enchaînement de réactions lamentables symptôme du délitement des institutions et du désarroi de l’opinion.

À tout seigneur tout honneur, François Hollande a brusquement cédé, aux petites coteries médiatiques, mondaines et parisiennes qui le fascinent manifestement. Ce faisant, qu’il le veuille ou non, il a validé le mensonge, consacré un permis de tuer, et last but not least insulté magistrats et jurés. Personne ne doit pouvoir contester le principe du pouvoir qui lui est donné par la constitution, et le fait de s’en servir. Mais François Hollande fait de la politique, il a été élu pour ça, et utiliser une prérogative juridique ne le dispense pas de le faire dans des formes dignes et en fonction du contexte. De ce point de vue, c’est une catastrophe.

L’apogée du féminisme victimaire

Le féminisme victimaire devenu hystérique ensuite. Tous ces petits groupes qui portent leur androphobie et leurs frustrations en bandoulière sont désormais inaccessibles à toute approche rationnelle. Foin de la réalité, chaque argument qui tente d’y ramener, est immédiatement contré par des raisonnements qui n’ont rien à envier au complotisme le plus obtus. L’ensemble de la planète est dominé par un complot patriarcal et tout ce qui s’y passe doit être lu à la lumière de ce prérequis. Jacqueline Sauvage n’a rien dit pendant 47 ans, personne n’a remarqué chez les gens qui la fréquentaient la moindre trace de coup, on vous répond : emprise, femme soumise, amnésie traumatique, mémoire retrouvée, et toutes les imbécillités issues du commerce des psychologues charlatans. 35 magistrats et jurés ont eu à connaître de son dossier et l’ont cependant condamnée : des « masculinistes » pour les uns, des marionnettes manipulées pour les autres. Débat impossible, et c’est cependant à ces gens-là que le président de la République a donné raison.

Il y a aussi la classe politique, qui s’est vautrée toutes tendances confondues, dans une démagogie compassionnelle assez écœurante. C’est qu’il y a bientôt des élections, et avant des primaires. Alors, plutôt que de parler au peuple on va s’adresser à des petites coteries, des groupuscules que l’on espère prescripteurs d’opinion. Le plus désolant étant pour moi, Jean-Luc Mélenchon, après avoir intronisé Jérôme Kerviel en Robin des bois de pacotille, il a pris la défense de Clémentine Autain qui tirait dans le dos de la brigade des mères du 93 luttant contre l’intégrisme musulman. Pour faire bonne mesure, il vient de faire de Jacqueline Sauvage, coupable d’un crime, l’emblème de la lutte pour l’émancipation des femmes. Bravo camarade ! Qu’importe qu’il s’agisse d’un mensonge, si on s’encombre de la vérité, on ne va pas s’en sortir. Ce qui compte c’est s’adresser aux couches moyennes urbaines, les couches populaires on s’en fout, laissons-les au Front National.

La responsabilité des médias est écrasante

N’oublions pas les syndicats de magistrats qui n’en ratent pas une. Drôle d’institution que ces syndicats sollicités à tout propos pour s’exprimer « au nom » de l’institution judiciaire, qui n’ont une activité syndicale que théorique, mais une activité politique permanente. Les magistrats du siège sont soumis à un devoir de réserve strict, garant de la confiance que les citoyens doivent avoir dans leur impartialité. Qu’à cela ne tienne, il y a les syndicats. Le « mur des cons » a montré la conception que le Syndicat de la Magistrature avait de cette impartialité. Et surtout, il est devenu habituel que ces organisations se moquent du principe de la séparation des pouvoirs dans la mesure où elles ne l’invoquent qu’à leur profit. Et nous sommes bombardés de déclarations politiques critiquant le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif. Là encore, pour relever le camouflet indiscutable infligé à la Justice par François Hollande, les syndicats de magistrats, n’y voyant aucune contradiction, n’hésitent pas à contester au chef de l’État l’utilisation des prérogatives que lui donne la Constitution ! Dites-moi, amis magistrats, vous êtes les derniers à pouvoir critiquer la décision du Président. Il serait peut-être temps de redevenir cohérents.

On finira enfin par les journalistes qui, par facilité et commodité, ont véhiculé la fable de Jacqueline Sauvage victime pendant 47 ans d’un mari violent. Tous les débats, toutes les interventions tous les éditoriaux en ont fait un postulat. Dire d’abord que « cet homme était une ordure », discuter ensuite. La responsabilité des médias, dans la pérennisation du mensonge et le discrédit jeté sur les décisions de justice rendue après des procédures régulières par plusieurs juridictions, est de ce point de vue écrasante.

Je disais en commençant que ce nouvel épisode du feuilleton Sauvage était révélateur des contradictions qui travaillent la société française. Une promenade attentive sur les réseaux, la lecture des commentaires sous les articles de la presse mainstream démontrent qu’une grande partie de l’opinion française n’est pas dupe. Et supporte mal la façon à la fois arrogante et désinvolte dont elle est traitée.

Ceux qui entendent briguer ses suffrages au printemps prochain seraient avisés d’en tenir compte.



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