En succédant à Dominique Baudis au prestigieux poste de défenseur des droits, Jacques Toubon, l’ex-Garde des Sceaux du président Chirac, a dû affronter l’hostilité de la gauche. Celle-ci voyait d’un très mauvais oeil le choix de François Hollande de le nommer à ce poste, alors qu’il s’était illustré dans le passé par des positions très conservatrices, notamment en ce qui concerne l’homosexualité. Ses opposants n’ont plus de souci à se faire, tant son évolution vers le progressisme sociétal a été aussi rapide que radicale. Près d’un an après sa prise de fonction, voici que le défenseur de nos droits, au nom de l’égalité et de l’intérêt supérieur de l’enfant, défend l’accès à la PMA pour les couples de femmes et prône de facto le recours à la GPA en entretenant un rapport plus qu’ambigu avec ceux qui militent pour sa légalisation.
La question de la gestation pour autrui fait couler beaucoup d’encre depuis que la Cour de Cassation a ordonné, le 3 juillet dernier, la transcription de l’acte de naissance de deux enfants nés de mères porteuses en Russie, reprenant ainsi à son compte l’arrêt de la Cour Européenne des droits de l’homme qui condamnait la France pour son refus de retranscrire à l’état civil des enfants issus d’une GPA pratiquée à l’étranger. Or, entre l’arrêt Mennesson de la CEDH du 26 juin 2014 et la récente décision de la Cour de Cassation, Jacques Toubon n’a pas été inactif, loin de là, dans son soutien à la cause des couples ayant recours à la GPA à l’étranger. Voyons de quelle façon.
Dans une interview accordée le 13 octobre 2014 à Public Sénat, tout en affirmant haut et fort que «l’interdiction de la GPA lui semble indispensable», Jacques Toubon plaide pour la retranscription de l’acte de naissance de ces enfants à l’état civil français, au nom de la nécessité de « leur donner une identité en France ». Le voici donc qui adopte le discours archi-convenu de ceux qui veulent faire accepter la GPA auprès de l’opinion : « je suis contre la GPA mais il ne faut pas pénaliser les enfants déjà nés ». Notre défenseur des droits est si pressé qu’il en vient même à faire des remontrances à Christiane Taubira, à laquelle il reproche sa lenteur dans l’application de l’arrêt de la CEDH !
Lors de l’audience de la Cour de Cassation du 19 juin dernier, le défenseur des droits, toujours aussi déterminé à défendre la cause des requérants, s’est fait représenter par le très médiatique avocat Patrice Spinosi, qui n’est autre que le conseil de Dominique et Sylvie Mennesson, les bénéficiaires de l’arrêt de la CEDH ! Les époux Mennesson ne défendent pas uniquement leur cas personnel mais militent pour la légalisation de la GPA, notamment via le Comité de soutien à la légalisation de la GPA et à la reproduction assistée (CLARA) qu’ils président et qui est représenté par … Maître Spinosi. Un comité spécialisé, entre autres, dans le conseil aux couples qui veulent avoir recours à des mères porteuses à l’étranger.
Ainsi donc, Jacques Toubon a choisi, pour se faire représenter à la Cour de cassation, l’avocat de ceux qui ont contrevenu à la loi française et qui est aussi l’avocat d’une association spécialisée dans le lobbying en faveur de la GPA, alors même qu’il défend publiquement l’interdiction de cette pratique ! Dire que l’une des dernières prises de position du feu Dominique Baudis, avait été justement de dénoncer la promotion de la GPA sur Internet…
Plusieurs féministes opposées à la GPA ont récemment sonné l’alerte dans les colonnes du Figaro en dénonçant la collusion entre une institution publique et le lobby pro-GPA.Tout en cherchant à se faire pardonner ses errements du passé auprès du camp progressiste en se mettant à la pointe du Progrès, Jacques Toubon ne veut tout de même pas se mettre à dos les conservateurs de son camp. En reconnaissant officiellement, en janvier 2015, que des militants de la Manif pour tous avaient été maltraités par les forces de police en 2012, n’espérait-il pas s’assurer une certaine sympathie de la part du collectif? Si la LMPT lui est certainement reconnaissante sur ce point, on peut fortement douter qu’elle laisse passer ses accointances avec le lobby pro-GPA. Et c’est compter sans la croisade contre cette marchandisation du corps des femmes menée activement par le Collectif pour le respect de la personne (CoRP,) qui compte parmi ses membres Sylviane Agacinski, Eliette Abécassis, ou Michel Onfray. Il n’est donc pas évident que le défenseur des droits puisse continuer à jouer longtemps la comédie.
*Photo : ALAIN ROBERT/APERCU/SIPA. 00696749_000013.
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