Quel dommage, l’une des pires sculptures de rond-point, celle de Châtellerault dans la Vienne, a été détruite par les gilets jaunes.
La révolution des gilets jaunes a réussi à mettre en lumière l’une des plus grandes calamités esthétiques hexagonales, qui frappe indifféremment les carrefours giratoires de la France périurbaine et des zones rurales, des espaces pavillonnaires et des zones d’activités commerciales : l’art des ronds-points !
Les gilets jaunes n’ont pas de pétrole, mais ils ont du goût
La vocation de ces œuvres n’est aucunement artistique : elles ont pour fonction, avant toute chose, de distinguer un territoire, en mettant en valeur ce qui le rend le plus fier. On trouvera ainsi à Saint-Amand-les-Eaux une bouteille d’eau minérale géante en béton, on se délectera de la composition « Donut et Saucisse » à Montpellier, on dégustera un improbable « Kiwi de l’Adour », à Peyrehorade, dans les Landes…
A lire aussi: Etat, gilets jaunes: peut-on vraiment parler de « violence » ?
Mais parfois le propos symbolique est plus obscur. Les ronds-points deviennent alors des lieux magiques où s’incarne le grand rien aberrant de la laideur, qui suscite la curiosité des touristes, l’agacement des contribuables et le désespoir des esthètes. Le mouvement des gilets jaunes n’a pas manqué d’entrer en confrontation avec cet art giratoire.
Et maintenant, le petit remplacement
L’histoire retiendra l’incident de la « Main jaune », à Châtellerault, dans la Vienne. Une affreuse sculpture en forme de main géante tendue vers le ciel, sur laquelle étaient posées des voitures grandeur nature – hommage à l’industrie automobile faisant vivre la région. L’œuvre, installée en 2010, était un « totem » du monde ouvrier a dit l’édile. Rien de moins. Elle a été détruite par les flammes en quelques heures, au plus fort de la révolution, alors que le rond-point en question était occupé par les gilets jaunes.
Ce fut la consternation. On évoqua des éléments incontrôlables, la résurgence des heures les plus sombres. Reste que Châtellerault était enfin débarrassée de cette verrue. Mais il est aujourd’hui question de remplacer la « Main jaune ». Comme c’est à la mode, on va interroger directement la population, qui doit choisir entre un espace vert ou un « avion incarnant la haute technicité de l’industrie châtelleraudaise ». Vite, un grand débat !