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Géopolitique de la baston


Géopolitique de la baston
Chuck Norris dans <em>Delta Force,</em> 1986.
Chuck Norris dans <em>Delta Force,</em> 1986.
Chuck Norris dans Delta Force, 1986.

Ces jours-ci, j’ai eu envie de revoir Delta force. Un de ces films que je regardais avec mon fils quand il était petit pour qu’il ne devienne pas plus tard une couille molle d’étudiant trotskiste pro-palestinien. Produit par Menahem Golan et Yoram Globus, deux Américains qui nous avaient donné Un justicier dans la ville avec Charles Bronson – celui-là, je l’ai sans doute vu avec mon père –, et qui avaient décidé cette fois-ci d’envoyer Chuck Norris au Liban.

Sa mission était simple, avec son groupe commando, les « Delta force », il avait carte blanche pour délivrer des otages détenus par une milice de salopards armée par deux pays voisins et qui devaient être exécutés si on ne libérait pas d’autres salopards du même genre. Chuck Norris était partant, il faut dire qu’il avait les mains libres et qu’on était venu le chercher pour ce qu’il savait faire et rien d’autre : la guerre. Et ensuite, la paix. Pendant la mission, pas de colis de la Croix-Rouge à distribuer, pas de contact à établir avec la population, pas besoin de négocier ceci ou cela avec des chefs de tribus. Après, pas d’inspecteurs onusiens des travaux finis qui viendraient l’emmerder avec des histoires de sommation ou de dommages collatéraux, pas de tribunal international qui allait lui pourrir la retraite sur des points de droit ou de crimes contre l’humanité.

J’ai à peu près tout oublié du film sauf la fin. Avec l’élite des combattants de l’armée américaine, l’ex-champion du monde de karaté, (car au départ, Chuck Norris n’est pas comédien, à l’arrivée non plus d’ailleurs et pour jouer Tootsie, il vaut mieux prendre Dustin Hoffman mais sur ce coup-là, il ne s’agit pas de se mettre du rimmel mais de se mettre sur la gueule) fonce avec les otages vers la côte, poursuivi par les Arabes en Mercedes. Dans les films, si les terroristes avaient du goût, ça se saurait.

Dans la dernière scène du film, le chef des Libanais pro-syrien, pro-iranien et pro-tout ce qui peut leur fournir des armes dans leur lutte contre la souveraineté du Liban, se retrouve en face de notre héros. L’Arabe fourbe et sadique, celui-ci est comme ça, qui du fond de son bunker a envoyé tant de jeunes hommes à une mort certaine, est à découvert. Chuck Norris, sur sa moto armée d’un lance-roquette (les producteurs ont peut être décroché un contrat avec Suzuki) arme son tir. Rien ne peut empêcher la justice américano-sioniste de se frayer un chemin à la vitesse de la lumière jusqu’à la gueule du chiite. Et il le sait. On peut lire dans son regard de la terreur. Il a compris qu’aucun président Français pro-arabe ne viendra le tirer d’affaire, qu’aucune campagne mondiale d’opinion pro-palestinienne ne pourra arrêter le glaive punitif. Lui qui se voyait finir sous les applaudissements comme son frère d’arme après avoir tué une petite fille à coups de crosse, va connaître le triste sort du cheikh à roulettes et de tous ceux qui ont tenté de s’asseoir après lui dans son fauteuil. Rien ne vient le consoler dans la minute qui lui reste à vivre, ni les 100 vierges qui l’attendent, ni les obsèques héroïques et hystériques que lui réservent ses coreligionnaires armés, ni les protestations de Michel Warschawski, ni l’indignation de Stéphane Hessel ni les rapports accusateurs des ONG scandinaves. Il repense à Soral, Meyssan et Dieudonné, ces Français libres et visionnaires qui lui avaient prédit, alors qu’ils le rencontraient à Damas, qu’il se ferait flinguer par un Américain financé par des juifs, mais il avait lâché un débonnaire « Inch’Allah » en comptant plutôt sur les protections diplomatiques.

Là, il n’a plus le temps d’appeler l’ambassade et quand la caméra resserre l’image sur sa gueule de métèque de chiite antisioniste, on lit au fond de ses yeux noirs de la trouille. Face à Chuck Norris, le combattant prêt à tuer pour la cause chie dans son froc.

À ce moment-là du film, j’ai beau être profondément antiraciste et farouchement persuadé que la violence n’est pas la solution, j’ai beau être convaincu qu’il faut tendre la main, pardonner les péchés, construire la paix dans le dialogue, quand la roquette made in USA vient fendre en mille la gueule du terroriste, je ne peux réprimer un chah[1. Bien fait, en arabe.] jubilatoire. Est-ce que ça fait ça à tout le monde ?



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Cyril Bennasar, anarcho-réactionnaire, est menuisier. Il est également écrivain. Son dernier livre est sorti en février 2021 : "L'arnaque antiraciste expliquée à ma soeur, réponse à Rokhaya Diallo" aux Éditions Mordicus.

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