Purs produits de l’Occident qu’elles vomissent, les générations futures et leurs défenseurs zélés instruisent inlassablement notre procès. De l’apocalypse climatique au racisme, ils nous jugent coupables de tous les maux. Leur monde rêvé, plein d’idées progressistes devenues folles, combine puritanisme et transparence, lynchage et tyrannie des minorités. Bienvenue dans la terreur équitable.
Les adultes ont mauvaise presse. Il ne se passe pas de semaine sans qu’ils soient convoqués devant le tribunal de l’opinion pour répondre de leurs crimes. L’accusation est toujours menée au nom des générations futures, quand elle n’est pas directement assurée par des adolescents récriminateurs, comme l’énervante Greta Thunberg, dont les couettes n’adoucissent pas le regard éternellement courroucé, voire par des enfants éduqués à espionner leurs parents pour s’assurer qu’ils ne font pas « mal à la planète ». Mais au gré des chefs d’inculpation, le rôle du procureur peut aussi bien être tenu par des nonagénaires comme feus Michel Serres et Stéphane Hessel (que l’on traitait il est vrai de « plus jeunes d’entre nous »), par de jeunes comédiennes comme Adèle Haenel ou par les innombrables journalistes qui espèrent peut-être, par leur zèle redoublé, s’attacher les bonnes grâces des dites générations futures pour le jour où elles seront aux manettes de nos sociétés. Que ce jour se rapproche à grande allure a de quoi inquiéter quand on constate les saccages qu’elles ont déjà directement causés et ceux que l’on commet volontairement pour leur complaire, par exemple en truffant nos paysages de ces monstrueuses éoliennes [tooltips content= »Voir notre dossier « Paysages, arrêtez le massacre », du mois dernier. »][1][/tooltips]. On pense aussi à ces honorables professeurs officiant dans des institutions aussi prestigieuses que Normale Sup ou l’École des hautes études en sciences sociales qui, à l’image de bourgeois tentant, sous une dictature communiste, de faire oublier leurs origines par une ardeur prolétarienne sans faille, veulent montrer qu’ils sont dans le vent de l’histoire en truffant leur correspondance de jargon inclusif qui, non seulement défigure la langue, mais la rend incompréhensible.
Il faut ici lever un malentendu et me laver du soupçon d’amalgame. Le terme « générations futures » ne désigne évidemment pas l’ensemble des individus nés depuis les années 1990, il y en a une bonne proportion de fort aimables et civilisés, mais leurs porte-parole et, par association, l’idéologie qu’ils incarnent et l’identité qu’ils portent. Ce n’est pas une question d’âge, mais d’état d’esprit.
Vous faites notre procès
Il existe en effet un lobby de l’avenir, une nébuleuse de la table rase qui ne recoupe que partiellement la population disparate que l’on appelle la jeunesse. Il s’emploie à criminaliser le passé et réclame en conséquence le droit illimité de dénoncer et de condamner. « Vous n’avez pas fait vos devoirs », nous morigène la petite Suédoise. L’occupation principale de ce « parti
