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Gaza : les Salomon de comptoir


Gaza : les Salomon de comptoir

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Un ami me faisait remarquer, à juste titre, que le titre de « une » de Libération du samedi 16 novembre « Gaza sous le feu » aurait avantageusement pu être complétée par « Israël sous la pluie ». Non que la météo soit maussade au pays du Mossad, mais parce que le feu qui s’abat sur le territoire régi par le Hamas est la conséquence de la pluie de rockets et de missiles Fajr envoyée depuis des mois sur Israël par des groupes islamistes radicaux.

C’est sans doute trop demander aux experts en titraille du quotidien de la rue Béranger d’expliquer à leurs lecteurs que les conséquences sont le produit d’une cause, et non l’inverse. Mais comme à Libé, on n’est pas tombé de la dernière pluie (de rockets), le préposé à l’édito va vous révéler le fin mot de l’histoire. Tout cela ne serait que des manœuvres de dirigeants aussi cyniques que peu soucieux de la vie des gens qu’ils gouvernent : « En Israël, le Premier ministre Benyamin Netanyahou et ses alliés de l’extrême droite va-t-en guerre sont bien décidés à jouer des vieux réflexes et de la peur à quelques semaines des élections législatives » écrit ainsi Vincent Giret. Quelques lignes plus loin, il soupçonne le Hamas de vouloir entraîner l’Egypte des Frères musulmans dans une spirale de violence. Giret, et d’autres confrères de sa corporation éditorialisante, se plaisent à endosser la robe du juge impartial se lamentant qu’une fois de plus les modérés sont débordés par les extrémistes, et qu’il n’y ait en pas un pour rattraper l’autre. Netanyahou et le Hamas sont des « alliés objectifs » pour faire capoter tout ce qui pourrait ressembler à une paix, même fragile entre Israël et les Palestiniens. On passera sur la reprise constante de la vieille antienne stalinienne des « alliances objectives », qui sert avant tout à masquer la paresse de la pensée, et la rusticité de l’analyse.

Netanyahou va-t-en guerre ? Nos Salomon de comptoir n’ont pas dû bien lire la documentation que leur service ad hoc leur a fait parvenir pour alimenter leurs cogitations. Bibi Netanyahou est l’un des rares premiers ministres d’Israël à n’avoir jamais déclenché de guerre lorsqu’il était en fonction entre 1996 et 1999, ni depuis son retour au pouvoir en 2009. On ne le classera pas pour autant dans la catégorie des colombes, car l’homme ne cache pas qu’il n’hésiterait pas à faire donner la garde, et même plus, s’il estime que les intérêts vitaux de l’Etat juif sont menacés.

Netanyahou boute-feu pour des raisons électoralistes ? Nos éditorialistes ont dû confondre avec le combat de titans entre Fillon et Copé, et appliquer à la situation politique israélienne des schémas bêtement hexagonaux. Netanyahou n’a nul besoin d’une guerre pour l’emporter le 22 janvier prochain. Le capital de confiance dont il bénéficie dans une majorité de la population et les divisions de l’opposition laissent augurer une large victoire du Likoud et de ses alliés lors du prochain scrutin. Au contraire, les aléas d’une confrontation armée avec le Hamas, comme cela a été le cas lors de l’opération Plomb durci déclenchée par son prédécesseur Ehud Olmert en 2009, peuvent se révéler électoralement dangereux pour lui. Enfin, toute son énergie est employée à organiser la riposte, diplomatique et militaire, au danger principal pour Israël, la nucléarisation de l’Iran. Cependant, s’il laissait bombarder sans réagir ses électeurs potentiels, on comprendrait que ces derniers lui en tiennent rigueur dans l’isoloir.

La responsabilité de la séquence violente qui se développe actuellement dans la guerre sans fin entre Israël et ses ennemis est à porter au débit du seul Hamas. Les chefs islamistes radicaux de Gaza sont près à sacrifier non pas leur vie (ils se cachent dans les sous sols des hôpitaux du territoire), mais celles de centaines de leurs sujets pour éliminer leur vieil ennemi Mahmoud Abbas et saboter son initiative de reconnaissance d’un Etat palestinien non membre par l’assemblée générale de l’ONU. Mais cela, c’est trop difficile à dire pour nos éminents éditorialistes, parce que c’est trop simple.

*Photo : Libération/Patrick Peccatte.



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