Cet automne, les socialistes se ramassent à la pelle. Leur cuisante défaite au Sénat vient de s’ajouter à la série noire de la rentrée : remaniement imprévu, affaire Thévenoud, mélo Trierweiler, n’en jetez plus, « la gauche est à poil et ce n’est pas très beau à voir », dixit notre directrice de la rédaction. Commentant la fin des grands récits idéologiques, Elisabeth Lévy refuse de regretter la « vraie gauche » d’avant, la seule, la pure, à l’heure où le PS gouverne comme l’UMP – à moins que ce ne soit l’inverse. Moscovici ou Mélenchon, qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse de la bonne conscience puisqu’« être de gauche, c’est avoir raison » et filer doux sur toutes les questions qui fâchent l’homme de l’avenir : sur le mariage gay, la théorie du genre, l’antiracisme de théâtre, vous les avez vues les deux gauches ?! Reste un cache-sexe idéologique, pour ne pas dire un string éthique : la vertu ! Célébrée par Mediapart avec le zèle du grand inquisiteur, recherchée par l’Elysée comme le saint graal, la transparence guide nos pas. Avec un résultat aujourd’hui palpable : la gauche au pouvoir, ce n’est plus la chienlit mais l’ordre…
Analysant cette inversion historique, l’essayiste Christophe Bourseiller dissèque une extrême gauche universitaire aux abois, rêvant d’excommunier Marcel Gauchet pour mieux masquer son indigence intellectuelle. À défaut de Grand soir, le fan-club de Didier Eribon rêve de sang noir séchant au grand soleil sur la route du progrès. Rien que de très normal : quand on croit détenir « la » vérité, à quoi bon tolérer des opinions dissidentes ? De son côté, Jacques Julliard déplore le divorce entre le peuple et la gauche, réfugiée dans un libéralisme sociétal qui lui fait oublier ses racines ouvriéristes. En rupture avec ses anciens camarades de la deuxième gauche, l’historien ne mise pas un euro sur une éventuelle VIe République et préfère en appeler à une réforme proudhonienne du crédit. Décapant !
Hélas, loin de ces passionnants débats de fond, la chronique du quinquennat Hollande semble surtout s’écrire dans les tabloïds. En attendant le prochain épisode de la saga, les aventures de François et Valérie ont redonné des couleurs aux librairies, « l’ex » ayant vendu quelques centaines de milliers d’exemplaires de Merci pour ce moment. Un livre plein de fiel et de ressentiment, nous disent Elisabeth Lévy et Olivier Maulin, tandis que Guy Sitbon s’amuse à feuilletonner façon Harlequin la vie privée des puissants …
Une fois de plus, nous avons vu grand. En sus de nos digressions sur la gauche, un dossier « décroissance » stimulera vos méninges. Quelle que soit votre religion sur le sujet, vous méditerez la leçon de choses que nous dispense Gil Mihaely à travers les réflexions croisées de trois experts, l’un plutôt libéral, le deuxième décroissant planificateur, et le troisième critique modéré de la société industrielle. Pour ma part, j’ai poussé l’abnégation jusqu’à me rendre à Bordeaux fin août, lors des journées d’été des Verts, à la recherche des derniers décroissants du parti… Moins baroudeurs, Jacques de Guillebon et Paul Piccarreta ont enquêté avec bonheur sur les nouvelles filières d’agriculture bio organisées en coopérative.
Causeur, c’est aussi un shoot d’actualité à haute dose. Ainsi, notre entretien avec l’eurodéputé frontiste Aymeric Chauprade vous amènera sur le flanc droit du Front national, où l’on parle « inversion des flux migratoires », détricotage de l’Etat-providence et croisade tous azimuts contre l’islamisation… Sans transition, ou presque, Vanessa Ratignier, co-auteur d’un essai critique sur nos liens avec le Qatar, révèle la face cachée de notre diplomatie d’affaires, où les pétrodollars font oublier les beaux principes du pays des droits de l’homme… Pour compléter ce petit tour du monde, Laurent Gayard nous fait aborder les rives glacées d’un souverainisme québécois chancelant, cependant que Slobodan Despot s’adonne à une critique de la raison occidentale afin de nous plonger au cœur de l’âme slave.
Chez nous, quand il n’y en a plus, il y en a encore… Au théâtre ce soir, l’inclassable Michel Fau démonte la déconstructionnite contemporaine façon puzzle, tout en chantant les vertus de l’alexandrin, le roi des modernes ! Le jeune metteur en scène Léo Cohen-Paperman n’est pas moins critique quant à l’état des planches mais il en faudrait plus pour l’empêcher de suivre la voie tracée du théâtre populaire jadis tracée par Jean Vilar et Antoine Vitez … Théâtre toujours et gauche morale aussi, vous adorerez l’histoire édifiante de l’occupation trois ans durant par des avant-gardistes romains du Teatro Valle, que nous conte avec des trésors de causticité notre ami transalpin Mauro Zanon.
Comme de bien entendu, Alain Finkielkraut, Roland Jaccard et L’Ouvreuse vous régaleront de leurs chroniques. Musique, maestro !
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