Mes chers amis,
Nous avons ferraillé toute la semaine, que ce soit à la terrasse d’un café, au téléphone ou sur les réseaux sociaux. Lorsque nous discutons des attentats (difficile de parler d’autre chose en ce moment), nous bifurquons très vite sur la question de l’islam et de l’intégration. Evidemment, le ton monte rapidement car votre discours victimaire et vos mantras habituels sur l’air du « pas de stigmatisation, pas d’amalgame », ne passent plus. Nous sommes amis, mais il y a des limites, faut pas déconner. Camus, que j’admire tant, déclarait : « Je mourrai à gauche malgré elle, malgré moi. » Hélas, je n’ai plus cette certitude depuis quelques années.
L’actualité est impitoyable avec vous. Elle vous donne tort, jour après jour. Votre logiciel antiraciste bugge quotidiennement à force de se fracasser sur la réalité. Vous avez abandonné la laïcité au nom de l’antiracisme. Et comme Elisabeth Badinter, je ne vous le pardonnerai jamais.
Votre discours victimaire est une catastrophe qui enferme des millions de musulmans dans l’absence d’autocritique, la rancœur, voire la haine à notre égard. A force de leur dire que nous sommes de méchants colonisateurs qui les stigmatisons ou d’invoquer un apartheid social, ils s’éloignent encore un peu plus de ce pays, se communautarisent et parfois nous détestent. Or, ce discours est non seulement terriblement contre-productif, il est aussi en grande partie faux.
Votre principale occupation aujourd’hui est de traiter les autres de racistes, comme l’écrit le « réac » (à vos yeux) Alain Finkielkraut. Un réactionnaire qui défend les valeurs de la république, se montre féroce envers le FN et ouvert sur les questions sociétales, c’est un concept audacieux.
Mes chers amis, vous avez fait de l’islam la religion des opprimés et ne regardez le réel que d’un œil, le gauche, celui de l’antiracisme. L’immigration est une chance, forcément une chance…
Vos rythmes cardiaques s’accélèrent, vos visages se renfrognent quand j’ose clamer, bravache, qu’une idéologie qui sécrète autant d’antisémitisme, d’homophobie, de sexisme, d’intolérance, de violence et dont une partie non négligeable de ses membres se sentent beaucoup plus proches de l’esprit de Dieudonné que de celui de Charlie… me pose problème. Je ciblerais des Français, bien blancs, voire cathos, sans doute applaudiriez-vous des deux mains. Mais là, vos mains, elles se crispent, je le vois bien.
Comme quoi, ça tient à peu de chose parfois, une vision de la réalité. Peut-être au fait de s’enfermer dans l’éthique de conviction en laissant à la porte l’éthique de responsabilité. Dommage aussi que vous ne vous demandiez jamais si c’est vrai ou faux, mais plutôt si c’est bien ou mal, juste ou injuste…
Séquestrés dans cette prison idéologique que vous avez construite, dans cette négation du réel au nom d’un idéal comme dirait Nietzsche, vous pouvez difficilement vous appuyer sur les faits. Du coup, vous n’avez plus qu’une seule solution : la rhétorique et la sophistique.
Ah mes chers amis, combien de fois vous ai-je entendu me répondre « pas d’amalgame » (votre mot préféré au scrabble ?) ou encore « tu généralises » ? Presque imparable. Car du coup, plus aucune analyse d’une réalité ou d’une tendance ne devient possible. Surtout lorsqu’elle vous dérange.
Si je vous rappelle que les islamistes remportent les élections dans les pays arabes et qu’à ce titre il est culotté d’affirmer que l’immense majorité des musulmans n’a rien à voir avec l’islamisme… Ou encore si j’évoque le fait que l’islam sécrète beaucoup d’antisémitisme, d’homophobie, de sexisme… votre réponse n’est pas de nier la réalité. C’est délicat. Non, le plus souvent, vous m’accusez de « généraliser », vous soulignez que tous les musulmans ne votent pas pour les islamistes (ce qui est déjà une évolution positive par rapport à ce que vous prétendiez précédemment). Et que beaucoup d’entre eux sont modérés. Ce que je ne conteste évidemment pas, mais ce n’est plus le sujet initial.
Par expérience, je note au passage que vous me répondez rarement sur l’antisémitisme, l’homophobie, le sexisme, etc. Il faut souvent que j’insiste. Dans ce cas, vous me rétorquez habituellement que toutes les religions le sont (homophobes, sexistes, etc). Je vous objecte aussitôt que je ne vois pas pour quelles raisons ça dédouanerait l’islam sur ces questions.
Si je pique le sac à main d’une vieille dame, le fait que d’autres ont déjà commis un tel acte avant moi m’exonère-t-il de toute responsabilité ou minimise-t-il ma forfaiture ?
En général, dans ces moments-là, votre visage se crispe à nouveau car vous n’avez plus trop d’arguments. Il devient parfois même livide si j’ajoute que lorsque des centaines de milliers de cathos descendent dans la rue pour manifester contre le mariage gay, vous êtes les premiers à les traiter de réacs, voire de fachos… alors que ces manifestants le font aussi au nom d’une religion. Sachant au passage qu’une majorité écrasante des musulmans est opposée au mariage gay. Mais les concernant, c’est moins grave, c’est juste parce que toutes les religions sont homophobes.
N’auriez-vous pas une vision très politisée de la réalité mes chers amis ?
Je regardais il y a quelques jours sur Paris Première « Zemmour et Naulleau », lesquels s’écharpaient au sujet des attentats. J’ai eu l’impression de vous entendre quand Naulleau a lancé qu’il ne fallait pas généraliser car Breivik n’était pas musulman, lui, histoire de minimiser le problème du terrorisme islamique. « Et alors, en quoi ça montre qu’il n’y a pas un vrai danger et un problème de terrorisme islamique », ai-je braillé illico, comme un gland, devant mon écran plat. J’ai failli ajouter un tonitruant « connard », mais comme ma petite fille n’était pas encore endormie, j’ai su contenir mes pulsions primitives…
Avec ce type de rhétorique purement sophistique, on ne peut plus rien dire, ni analyser. Les tendances n’existent plus, car tout est généralisation et vous dénicherez toujours des contre-exemples ou des exceptions. Lesquelles vous servent à infirmer ou minimiser ces mêmes tendances, lorsqu’elles vous déplaisent.
Si j’évoque le problème du nazisme en Allemagne dans les années 30, vous pouvez très bien m’objecter que tous les Allemands n’ont pas voté pour le moustachu et que certains sont même entrés en résistance. Ah oui, c’est vrai pardon, donc il n’y avait aucun problème en fait ?
Si j’ose affirmer que les hommes sont plus grands que les femmes, vous seriez capables de souligner qu’il existe des femmes plus grandes que les hommes. Et même au passage de me traiter de sexiste ! Sauf si je suis musulman ou que je rentre de l’île Maurice, car dans ce cas vous auriez peur d’apparaître comme racistes…
Quand il est difficile de contredire les faits, il reste la rhétorique. Hélas, comme disait Baudrillard, « le réel est plus fort que toi ».
Amitiés sincères,
Franck Crudo
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