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Rabelais, au Théâtre de Poche Montparnasse

Le billet théâtre de François Kasbi


Rabelais, au Théâtre de Poche Montparnasse
Pierre-Olivier Mornas © Alejandro Guerrero

« Le plus grand esprit de l’humanité moderne : Pythagore, Hippocrate, Aristophane et Dante réunis » (Honoré de Balzac, à propos de Rabelais)

« La grande fontaine des lettres françaises (où) les plus forts ont puisé à pleine tasse » (Gustave Flaubert, à propos de Rabelais)


C’est la rentrée théâtrale. Et comme souvent, le Théâtre de Poche invite à réviser les classiques : Gargantua de Rabelais – après Yourcenar en juillet, reprise en janvier 2025 à ne pas manquer, merveilleux seul en scène autour des Mémoires d’Hadrien, par Jean-Paul Bordes.

Beau programme – pour un écrivain (Rabelais) si classique et culte qu’on en oublierait de le lire, à tort bien sûr. Certes Malherbe et la Contre-Réforme l’ont combattu, mais Chateaubriand et Hugo l’ont réhabilité et fêté – comme Jarry (le Père Ubu – évidence), Claudel, Céline, Cocteau, voire aujourd’hui Valère Novarina (un de nos classiques contemporains, et vivants). Et il fut un temps pas si lointain (1968) – où Jean-Louis Barrault lui consacrait un spectacle : Rabelais. Musique ? Michel Polnareff. Le saviez-vous ? Nous non plus.

Parenthèse : je me souviens de mon vieux professeur de latin en khâgne. Il distinguait deux catégories de personnes, et seulement deux. Ceux qui lisaient Rabelais (1483 ou 1494- 1553) – et les autres. À l’époque, j’étais des autres – et le suis hélas toujours un peu.

D’où l’agrément que procure le seul en scène de l’épatant Pierre-Olivier Mornas (il sait tout faire) dans son évocation de Rabelais et de Gargantua : c’est un bain – une ambiance restituée.

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La mise en scène d’Anne Bourgeois, d’une grande sobriété, permet d’écouter le texte, plutôt que d’en être détourné par des effets superflus. Pareil pour la musique de François Peyrony : un accessoire bienvenu, plutôt qu’une pollution, comme cela arrive.

Pierre-Olivier Mornas incarne à la fois Grandgousier et Gargamelle (les parents de Gargantua), Gargantua (ou Rabelais, c’est le même), etc.
Le géant festoie. Affamé, il mange tout le temps – mais c’est sa boulimie de savoir qui domine : apprendre, avec son précepteur Ponocrates (alter ego de Socrate).
Il engrange les connaissances, devient « donc » chef de guerre (les guerres picrocholines – du nom du roi Picrochole, qui attaque le royaume de Grandgousier), etc.
Les grands thèmes rabelaisiens – l’éducation, la connaissance, l’humanisme, le vin, etc. – émergent peu à peu au gré du monologue endiablé.
On regarde, on écoute, on révise – transportés dans ce XVIème siècle… rabelaisien. Et une fois n’est pas coutume, on saisit précisément, alors, ce que recouvre ce qualificatif rebattu. L’outrance, la démesure, la truculence (voire la trivialité) – mais aussi les lumières d’une certaine Renaissance. Le côté, en fait, révolutionnaire de Rabelais en son temps – et qui le demeure. Une délicieuse soirée.


Gargantua, de François Rabelais, mise en scène d’Anne Bourgeois, adapté et interprété par Pierre-Olivier Mornas. Jusqu’au 10 novembre. Du mardi au samedi 19H. Dimanche 15H. Théâtre de Poche Montparnasse (6e arrondissement). Durée : 1H10.

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Né à Paris en mai 1968. A collaboré ou collabore à La NRF, Esprit, Commentaire, La Quinzaine littéraire, Le Figaro littéraire, Service littéraire, etc.. A publié récemment "Bréviaire capricieux de littérature contemporaine pour lecteurs déconcertés, désorientés, désemparés" (Editions de Paris, 2018) et "Bien sûr que si !" (Editions de Paris, 2020)"

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