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Gags tragiques à Matignon

Le regard d’Henri Beaumont


Gags tragiques à Matignon
Le Premier ministre Michel Barnier au journal télévisé de France 2, 22 septembre 2024 © Thomas HUBERT/SIPA

Dette, école, ministres… De mal en Pisa, la dégringolade continue.


Au fond de la vallée, en la nuit étoilée, le nouveau gouvernement est né. C’est la panique sur France Culture, au Nouvel Obs, chez LFI, Les Verts. Les avions renifleurs d’extrême-droite sont en alerte maximale. « Au voleur ! Au voleur ! A l’assassin ! Au meurtrier ! Justice, juste ciel… » La lutte les dépasse. Canon bleu ne répond plus, Mission dernière chance pour Michel (Tanguy) Barnier.

Lignes rouges sur pistes bleues

« Le racisme est l’une des valeurs clés du gouvernement » (Marine Tondelier) le plus conservateur depuis Nicolas Sarkozy, Gengis Khan, Attila… Les Compagnons de la chanson progressiste, cloches de l’indignation prudhommesque, sonnent, sonnent l’alarme et font les poubelles. Sandrine Rousseau vibrionne dans le mépris de classe, déconstruit les bourgeoises Maniatis de la nouvelle équipe. « La femme est une grande réalité, comme la guerre » (Larbaud). Bruno Retailleau, hétéro et catho, défend les chrétiens d’Orient. A Auray, une bisaïeule de sa trisaïeule, Marie-Constance Retailleau de Pontcallec, a « liké » plusieurs posts Instagram de Cadoudal en 1799…

François Hollande raille un gouvernement de « Restauration ». Marat Marais du plateau de Millevaches, Louis XVIII du grand peuple de Gauche, fosse tranquille, il sait de quoi il parle. Incroyable & Merveilleux macroniste, Gabriel Attal confesse qu’il a « une histoire à écrire avec les Français ». Il demande des garanties sur l’IVG et la PMA, cabriole dans l’écume, le buzz, multiplie les saltos dans les cerceaux. Oum le Dauphin se prend pour Moby-Dick. Rien n’est trop beau lorsqu’il s’agit de grandeur. Nous avons échappé au pire, un gouvernement Castets : Mathilde Panot au ministère de la rééducation, Thomas Piketty à Bercy, l’impôt sur les os, une faillite vénézuélienne en trois mois. Pour combien de temps ? L’épée dans les reins, le gouvernement Barnier n’a aucune marge de manœuvre, économique, financière, politique.

Dénis d’initiés

Loin des sentiers obliques, à la justice enclin, bon maître, généreux quoiqu’il fût économe, le Premier ministre n’a pas de fange en l’eau de son moulin, pas d’enfer dans le feu de sa forge. Le problème, c’est l’oseille, les champs de blés et d’orge, les sacs de grains qui semblent des fontaines publiques… La caisse est cramée.

Nous n’échapperons pas à une kyrielle de rodomontades, chocs d’autorité, de savoirs, de mémoires… Une consultation citoyenne sur la simplification de la transformation de l’action publique, un grand Grenelle anti-gredins, un big bang de l’anti-gang bang, un plan Marshall d’éclairage du bois de Boulogne. Le GIGN, Louis de Funès et Bourvil vont être positionnés au poste frontière de Menton. Le taux d’application des OQTF pourrait passer de 8% à 11%.  

A lire aussi, Stéphane Germain: Le pouvoir d’achat, ce paresseux mantra

Anne Genetet, nouveau cornac du mammouth, est rassurante : l’éducation reste la mère de toute les batailles : « Le navire ne changera pas de cap ». La Hougue, les Cardinaux, les Saintes ? Six ministres en deux ans. Le cap Carnaval des connétables du déclin, la rue de Grenelle, Salamine. Ni savoirs, ni transmission. Depuis deux générations, du Primaire au Supérieur, la même bouillabaisse de bons sentiments, acronymes abscons, notes gonflées aux hormones pour endormir les parents, préserver l’omerta. Sur Teams, EcoleDirecte, la foire aux PowerPoints, copiés-collés, tutos, vidéos, enseignants Fée Clochette-coach, bat son plein. L’acmé de la tartufferie, c’est la « spécialité » HGGSP (Histoire-Géographie, Géopolitique et Sciences politiques), un poke bowl d’ersatz d’Humanités qui piège un quart des élèves de Terminale. Theatrum Maudit, Mer de toutes les histoires (à dormir debout), folie des glandeurs, les six thèmes transverses du programme surpassent l’« Arbor scientiae » de Lulle et les « 900 Conclusions (philosophiques, cabalistiques et théologiques) » de Pic de la Mirandole… « De nouveaux espaces de conquête ; Faire la guerre, faire la paix ; Histoire et mémoires ; Identifier, protéger et valoriser le patrimoine ; L’environnement, entre exploitation et protection ; L’enjeu de la connaissance ». Six heures hebdomadaires de gloubi-boulga, axes, jalons, démarches réflexives, pour un vernis de culture générale et préparer un « grand oral » sans enjeu, car postérieur au dépôt des dossiers d’inscription dans le Supérieur.

Une blouse, deux dictées, trois fables de La Fontaine, ne changeront rien à l’affaire. Les pédago-gauchistes font la loi, les programmes, coupent ce qui dépasse, le latin, le mérite, l’excellence. LFI adore les analphabètes autodidactes, élèves Ducobu, Delogu, Jeune Garde en section « fichier S ». De mal en Pisa, la dégringolade continue. Pour échapper à la loterie ParcoursSup, aux Bourdieuseries des Facultés en faillite, les premiers de cordée exfiltrent leurs enfants, avant le Bac, direction Montréal, Milan, McGill, la Bocconi.

À Bercy, Antoine Armand s’interroge : « Face à la gravité de la situation budgétaire, comment chacun peut contribuer intelligemment » ? Un rapport évalue à 13 milliards d’euros le montant annuel de la fraude sociale. Pour les fins limiers du Haut Conseil du financement de la protection sociale, les normes sont « fraudogènes », « le tout-contrôle est stigmatisant, pas pleinement efficace ». Afin d’éponger les 3228 milliards d’euros de dette publique, surgissant hors de la nuit vers l’aventure au galop, il nous reste Zorro, le Comte de Monte-Cristo et l’or des Templiers. Le nouveau garde des Sceaux, Didier Migaud, veut « rendre la justice plus proche des citoyens, plus juste, plus rapide ». Stabilité et bonne nouvelle rue de Valois : « La Culture est fille du plaisir et non pas du travail » (Ortega y Gasset). Aux Armées, au Quai d’Orsay, rien. À l’étranger, la France ne pèse plus rien. La remontada ne sera pas une partie de plaisir. Les mots ne sont jamais les mêmes pour exprimer ce qu’est le buzz, le blues, le Booz.

Michel Barnier, Booz endormi

Pendant qu’il sommeillait, Marianne, une moabite, s’était couchée aux pieds de Michel Barnier, le sein nu, espérant on ne sait quel rayon inconnu, quand viendrait du réveil la lumière subite…

« Marianne méditait, Michel broyait du noir ;
Des zozos aux infos, piapiataient vaguement ;
Les ennuis immenses, tombaient du firmament ;
L’heure était difficile ; les Français n’osaient croire.

Tout reposait dans l’urne et quand gérer la dette ;
Les astres émaillaient le ciel profond et sombre ;
La croissance évanouie parmi ces fleurs de l’ombre
Brillait dans le néant, Marianne se demandait,

Immobile, ouvrant l’œil à moitié sous ses voiles,
Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été,
Avait, en s’en allant, négligemment jeté
La France hébétée hors du champ des étoiles. »

(d’après Victor Hugo, Booz endormi).

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