Notre collaborateur approuve les premières pistes ouvertes par le ministre de l’Éducation — fin du collège unique institué par la réforme Haby / Giscard d’Estaing, et réouverture d’Écoles Normales, dès la 1ère année du Supérieur, afin de former au mieux les nouveaux enseignants dont la France a besoin. Mais, souligne-t-il, les adversaires de ces changements salutaires préparent déjà leur contre-offensive…
Monsieur le Ministre,
Je doute que vous ayez eu le temps, au milieu des responsabilités qui sont les vôtres et des événements dramatiques de ces derniers jours, de jeter un œil sur mon dernier livre, L’Ecole à deux vitesses, paru fin août.
Je me contenterai donc de me féliciter de la contiguïté de nos pensées…
Dans le chapitre final où j’ai rassemblé diverses propositions sur les réformes à mettre en œuvre au plus vite, j’écris en effet :
« Les enseignants doivent être recrutés et orientés dès le niveau Bac + 1, et formés dans des centres — les anciennes Ecoles Normales par exemple pour les instituteurs — où on leur enseignera les savoirs indispensables pour faire face à leurs classes. Pas de la pédagogie ou de la didactique, qui viendront avec l’expérience du terrain. Et les terrains scolaires sont si variés qu’aucune recette ne s’applique uniformément, à moins de chercher le chahut immédiat et irrémédiable.
« La mixité sociale n’a de sens que si elle s’accompagne d’une ambition qualitative. Il est donc essentiel de révoquer le collège unique, source depuis quarante ans de confusion et d’impossibilité technique de faire des cours cohérents. J’ajoute qu’une répartition des élèves en fonction de leur niveau (et non des revenus de leurs parents) doit s’accompagner d’une discrimination selon le niveau : on peut faire cours à 15 élèves en difficulté ou à 40 élèves sans problèmes, mais certainement pas, sous prétexte d’égaliser les conditions de travail, à 30 élèves de niveaux trop hétérogènes.
« L’évolution du niveau des élèves doit être la clé des rémunérations supplémentaires des enseignants. Elle sera évaluée par des instances idoines — il est temps que l‘Inspection, au lieu de passer en coup de vent tous les cinq ou six ans, ausculte les maîtres deux fois par an — en amont et en aval. Et comme il ne se trouve pas assez d’Inspecteurs, des enseignants chevronnés — vraiment chevronnés, pas des pistonnés ou des lèche-bottes de pédagos ultimes — seront à même de prodiguer des conseils et d’apprécier le travail. »
Et voici que vous annoncez à la fois la nécessité de rouvrir les Écoles Normales, qui formaient si bien nos maîtres autrefois, et d’en finir avec le collège unique, qui sous prétexte d’égalitarisme aura été le plus grand vecteur d’inégalités dont jamais système corrompu ait rêvé. Quant à la rémunération au mérite, elle est en partie incluse dans le Pacte mis en place par votre prédécesseur, et fort combattu par des syndicats qui se soucient davantage de propagande que d’efficacité pédagogique.
Évidemment, ces timides avancées dans la bonne direction suscitent déjà des réactions outrées chez les artisans du désastre, qui sentent que leurs beaux jours sont derrière eux. Le ban et l’arrière-ban des pédagogistes les plus forcenés vous canardent comme un lapin depuis dix jours (vous ferai-je remarquer qu’ils soutiennent, les uns et les autres, des organisations parallèles financées par votre ministère ? Non, je ne le ferai pas…). Sylvain Connac « chercheur » en sciences de l’Éducation (ancien instituteur, il n’a jamais vu un élève du Secondaire), écrit par exemple dans Le Monde — l’ex-« journal de référence » qui ouvre libéralement ses colonnes à tout ce que l’idéologie la plus rance a produit de pseudo-spécialistes :
« Un système éducatif ne fonctionne pas pour l’unique promotion de quelques champions, au risque de voir se créer des masses de perdants et de résignés scolaires. La responsabilité est plutôt du côté de l’excellence scolaire, par la recherche du progrès de tous, sans exception. »
Cela nous ramène au temps — l’Eden perdu de Mr Connac — où l’on avait inventé un Ministère de la Réussite Scolaire : on met la barre au plus bas, pour que chacun soit sûr de la sauter. Cela procède d’un mépris des élèves qui au fond n’est guère étonnant, ces temps-ci, chez des gens de gauche. Permettre réellement à chacun d’aller au plus haut de ses capacités est plus compliqué que de truquer les notes, et la différenciation des cursus en fonction des goûts et des capacités est une voie évidente pour y parvenir.
Puis Claude Lelièvre, « historien » de l’Éducation, s’est indigné à son tour que vous appeliez à reformer des Ecoles normales dont la formation serait « axée sur les fondamentaux et les valeurs de la République ». Comme celle de Jules Ferry, instituée pour préparer les loupiots à la future guerre franco-prussienne ? Ma foi, Lelièvre ne s’est apparemment pas aperçu que nous sommes effectivement en guerre — contre des fondamentalistes qui égorgent u décapitent les enseignants.
Enfin Sa Suffisance Philippe Meirieu, l’artisan en chef du désastre, s’est exprimé du haut de sa tour d’ivoire, critiquant la façon dont l’institution a salué la mémoire de Dominique Bernard : « Aucune parole ne pouvait être à la hauteur de l’événement et il aurait mieux valu, sans doute, s’en tenir au silence. Un silence collectif et solidaire. Un silence assourdissant pour enjoindre nos concitoyens de mettre un terme aux lieux communs et aux invectives sur les réseaux sociaux… »
… afin de laisser libre cours aux messages de haine et aux appels au meurtre des fanatiques de la charia ?
Je n’irai pas jusqu’à vous suggérer de révoquer ceux qui, parmi les nuisibles infiltrés dans la structure profonde de votre ministère, travaillent à démanteler par avance vos propositions, comme ils l’ont fait quand François Fillon ou Gilles de Robien tentaient d’imposer en Primaire une méthode d’apprentissage cohérente du Lire / Ecrire — une méthode alpha-syllabique, préconisée d’ailleurs par Stanislas Dehaene et tous les vrais chercheurs : par exemple la méthode LEGO expérimentée depuis deux ans dans l’Académie de Paris, décidément en pointe. Mais le corps des Inspecteurs devrait être sérieusement nettoyé — ou peut-être mis en extinction.
La fin du collège unique est une nécessité urgente. Il faut permettre à chaque élève d’avancer à son rythme et en fonction de ses capacités, de ses goûts, de son histoire. En instituant, bien sûr, des passerelles entre les niveaux, de façon à ne condamner personne à séjourner trop longtemps dans un niveau qui ne serait plus le sien — dans un sens comme dans l’autre : il faut redonner aux élèves, tous amateurs de records sportifs, le goût de la compétition et de l’effort permanent.
Bouleverser la formation des maîtres, afin de rendre le métier plus attractif, en est une autre. Vous ne pouvez pas laisser la (dé)formation des enseignants aux idéologues des INSPE, persuadés que l’enfant est naturellement bon et qu’il suffit de l’écouter et de solliciter ses capacités créatrices pour construire ses propres savoirs. Nous savons, vous et moi, que les chères têtes blondes ou brunes ont des instincts naturels cannibales, et que l’enseignement consiste justement à les dénaturer — ce pour quoi on leur fournissait autrefois un (insti)tuteur.
Enfin, pourquoi garder le Bac, coquille vide et onéreuse ? Autant construire des Certifications par matière, comme cela se fait pour les langues. Les professeurs qui officient sur Parcoursup y retrouveront plus aisément leurs futurs étudiants.
J’ai apprécié que vous proclamiez la tolérance zéro envers les apprentis islamistes. Les exclure, soit. Mais quand ils ont moins de 16 ans, on est forcé de les réintégrer ailleurs. Pourriez-vous donner des ordres pour que ce soit loin, très loin de leur collège ou lycée d’origine ? À charge à leurs parents, s’ils tiennent à conserver le bénéfice de la prime de rentrée, de veiller à ce qu’ils s’y rendent, chaque matin…
Mais je suis sûr que vous l’aviez déjà résolu, tant nos pensées au fond sont parallèles…
Très attentivement vôtre…
Jean-Paul Brighelli
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PS. Vous suggèrerai-je une inflexion dans votre discours laïque ? L’ennemi aujourd’hui a un nom, il s’appelle l’islamisme. Autant le nommer — parce que c’est bien d’une guerre qu’il s’agit, comme l’avait asséné Arturo Perez Reverte il y a déjà huit ans dans un article fondateur : « Es la guerra santa, idiotas ! » Que les pédagos bêlants répugnent à « stigmatiser », comme ils disent, des gens qui sont des ennemis de la France, ou à faire des cours d’Histoire réellement chronologiques, et non plus entachés de convictions anti-colonialistes, anti-esclavagistes et autres complaisances culpabilisantes et communautaristes, en dit long sur les complicités que les adeptes d’une gauche islamo-fasciste entretiennent avec ceux qui sapent nos institutions et parfois attentent à la vie des enseignants.
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