Hollande à …0, 5% !


Hollande à …0, 5% !

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« François Hollande est à 0,5% d’opinons favorables ! ». Je savais que ça n’allait pas très fort pour la cote de popularité présidentielle, mais, en entendant ces propos échangés par deux quidams dans un bistrot du côté de la Gare de Lyon, j’ai sursauté. J’avais cru comprendre que ça stagnait déjà dans les eaux historiquement basses des 18-20%. Alors, 0, 5% tout de même, Hollande avait dû faire une nouvelle gaffe. Par exemple accepter une énième exigence de Gattaz. Gattaz, lui, me fait penser de plus en plus à un joueur de roulette qui se sait dans une période de chance et qui ose tout en misant systématiquement sur la même couleur. Hollande, si ça se trouve, venait d’accepter la fin du Smic, la baisse de l’âge de la scolarité obligatoire à 12 ans ou le démantèlement de l’inspection du travail afin de libérer l’initiative des entrepreneurs et de favoriser le retour de la croissance. C’est vrai, quoi, Hollande est persuadé que le seul moyen de gouverner, c’est de gouverner à droite. On ne peut pas lui en vouloir, les élections ont l’air de confirmer cette  impression alors qu’en fait, ce sont les Français qui manquent d’imagination, comme on l’a vu aux municipales. Ils ne sont pas contents de la gauche parce qu’elle mène une politique de droite alors ils décident de faire mal à la gauche en votant à droite. On a vu plus logique.

Mais revenons à ces 0, 5% hollandiens, parce que tout de même, on entre là dans les contrées mystérieuses de l’imperceptible, les zones pascaliennes de l’infinitésimal, on approche du « vanishing point », bref  on fait dans la poésie pure…

Et puis j’ai compris que ce n’était pas tout à fait la cote de popularité présidentielle dont il était question avec ce 0, 5%.  Le Parisien trainait sur le comptoir, entre les œufs durs et les pompes à bières.  Et on pouvait y lire ce sondage qui était une sorte de banc comparatif entre les différents présidents de la Vème république. Je soupçonne d’ailleurs que le but ultime était tout de même d’arriver à ce score humiliant pour Hollande, que l’on s’était torturé les méninges du côté du journal pour parvenir à ce 0, 5%. Un peu comme si, pour jouer au même petit jeu avec Gattaz, puisqu’on parle de lui, la question auprès d’un échantillon représentatif de 1072 françaises âgées de 18 ans et plus, avait été : « Avec quelle  personnalité aimeriez vous passer la nuit ? Laurent Delahousse, Manuel Valls, Antoine de Caunes, David Beckam ou Pierre Gattaz ? » Et que l’on avait titré fièrement ensuite : « Moins de 0, 3% des femmes font confiance aux patrons. »

Bon, en même temps, c’est la loi du genre et l’on sait depuis un bout de temps que les sondages sont au service de qui les commande et ont eu une belle part dans la transformation de nos démocraties, certes imparfaites, en barnum putassiers où l’on laisse s’exprimer les pires pulsions à force de poser des questions qui rendent bêtes : « Préférez vous qu’on reconduise les immigrés à la frontières ou avoir un cancer ? » Résultats : « Une écrasante majorité de Français pour un durcissement de la politique migratoire. »

Dans ce sondage qui l’envoyait au quatrième sous-sol, Hollande était battu par De Gaulle et Mitterrand, 36% et 27% des Français. Etant donné que les deux font davantage partie de l’histoire que de l’actualité, c’est tout de suite plus facile. On a sa statue dans le marbre et ce que vous avez fait est l’objet de sages colloques universitaires pas d’éditos au vitriol. Le premier a libéré la France et sauvé au moins deux fois la République alors qu’il était maurassien. Le second a sauvé la gauche avant de l’assassiner dans la foulée mais c’est normal car il était maurassien aussi. Mais au moins lui doit-on quelques mois entre mai 81 et fin 83 où l’on a entrevu ce que pouvait être la gauche au pouvoir.

Mais appartenir à l’histoire ne suffit pas. Toujours si l’on en croit ce sondage, Pompidou est battu par Sarkozy, Giscard et Chirac. On en déduira qu’il faut appartenir à l’histoire ET affronter des crises pour rester dans les mémoires. Pompidou a pourtant été le président d’une France heureuse, même pour ceux qui luttaient contre l’ordre établi. Finalement, quand on était un gauchiste de La Cause du Peuple, ce devait être tout de même plus plaisant d’affronter un président qui récitait à l’estomac du Paul Eluard face à l’affaire Gabriel Russier qu’un président qui aurait giflé la Princesse de Clèves pour moquer les concours administratifs.

Sarkozy est tout de même sur le podium, avec 10%. Loin derrière De Gaulle et Mitterrand mais coiffant sur le poteau Giscard et Chirac qui sont à égalité [1. On goûtera l’ironie quand on sait à quel point ces deux-là se sont aimés…]. Malgré tout, ce n’est pas bien exaltant comme résultat. C’est encore tout frais, Sarkozy, pourtant. Il faut croire que la prestation de Hollande n’a pas réussi tout à fait à faire oublier celle de Sarko qui, si on regarde en détail, est celui qui polarise encore le plus la gauche et la droite.

On dira que ces 10% posent un voile pudique sur le bouclier fiscal, le discours de Grenoble, Buisson et l’instrumentalisation de l’identité nationale pour ne se souvenir que de cette énergie déployée qui a entretenu une illusion, celle que le Président de la République pouvait influer en quoi que ce soit sur le destin de ses concitoyens. Parce que, si vraiment nous sommes honnêtes, ce que nous reprochons au fond, à gauche comme à droite, à Hollande, ce qui explique ses 0, 5%, ce n’est pas tant sa politique qui est la même que celle de Sarko, c’est de ne plus être capable, lui, de cacher  son impuissance, de cacher le fait que le roi est nu.

Les 0, 5% de Hollande ne disent pas grand chose sur Hollande, en fait. Mais beaucoup sur notre lucidité  historique et notre désespoir démocratique : le pouvoir, désormais, est ailleurs.



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