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Françafrique: un trône qui gêne?

Mort, l'ex Empereur centrafricain Jean-Bedel Bokassa fait encore parler de lui…


Françafrique: un trône qui gêne?
Jean-Bedel Bokassa sur son trône, à Bangui, le 4 décembre 1977. © BOCCON-GIBOD/SIPA

Les remous médiatiques, provoqués par la vente aux enchères de la réplique du trône de Jean-Bedel Bokassa au château d’Artigny, font remonter à la surface des souvenirs que la République tentait désespérément d’oublier. De l’opération Caban à l’affaire des diamants, la cession de l’objet fait ressurgir un sujet qui fâche dans les hautes sphères: le passé colonial de la France.


Le 26 mai a eu lieu une vente aux enchères qui évoque le « temps béni des colonies », pour paraphraser la chanson de Michel Sardou.

Organisée par la Maison Rouillac au château d’Artigny, en Indre-et-Loire, elle a mis en vente la réplique d’un trône françafricain : celui de Jean-Bedel Bokassa, dont le sacre néo-napoléonien avait coûté des millions d’euros à Paris en 1977. Sculpté dans de l’acajou massif et doré à la feuille, cette copie, représentant un aigle aux ailes déployées, mesure trois mètres de haut et 3,5 mètres de large. Le trône a été réalisé dans les ateliers de Rémi Le Forestier, spécialiste de ce type d’objets, qu’il expose dans des lieux prestigieux.

Fils de l’Empereur, ancien ministre et député, Jean-Serge Bokassa estime que ce trône devrait être exposé dans un musée consacré à l’histoire du Centrafrique qui fera la part belle à son père, dont le règne a été réhabilité. Face à l’anarchie qui règne dans l’ancienne colonie française d’Oubangui-Chari, l’opinion centrafricaine préfère désormais voiler les aspects dictatoriaux de l’ancien régime et se souvenir d’une présidence symbole de paix et de prospérité. Si de son côté, il feint d’ignorer la vente, il est peu probable que le gouvernement français apprécie l’engouement médiatique généré autour de cette réplique, qui lui rappelle un passé que la France s’efforce de gommer, surtout dans le contexte actuel de rivalité avec la Russie, désormais influente dans le pays.

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Installé dans les ruines de Berengo, l’ancien palais de celui qui avait été surnommé « l’Ogre centrafricain », le groupe paramilitaire Wagner affirme, selon le site d’informations Corbeau News, qui suit attentivement les activités des « vurú » (Blancs) de Moscou dans le pays, que cette réplique serait en réalité l’original dérobé par Paris. Une référence évidente à l’opération Barracuda lancée par l’Élysée, qui a mis fin au règne de Papa Bok’ deux ans après son somptueux couronnement afin de le remplacer par son cousin David Dacko. L’abus de vodka et les pannes de climatiseurs faisant oublier à Wagner que le vrai trône rouille pourtant dans une cour du ministère centrafricain de la Culture.

La vente a été curieusement associée à une autre pièce emblématique des frasques de la République : le scooter utilisé par le président François Hollande pour ses relations extra-conjugales. De quoi démontrer que l’histoire française n’a pas toujours su mêler majesté et discrétion politique !




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Journaliste , conférencier et historien.

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