L’exposition « Figures du fou » est une remarquable réunion d’œuvres et d’objets retraçant cette physionomie de la déraison qui, profane ou religieuse, est un miroir tendu vers chacun. Leurs mines sont peut-être moins grotesques qu’au Moyen Âge, mais les fous et autres bouffons sont toujours parmi nous.
L’exposition du musée du Louvre intitulée « Figures du fou : du Moyen Âge aux Romantiques » est une très belle occasion d’aller voir des chefs-d’œuvre et de découvrir des objets insolites et amusants. Côté peinture : la célèbre Nef des fous et L’Extraction de la pierre de folie de Jérôme Bosch, Les Proverbes flamands de Pieter Brueghel, L’Enclos des fous de Francisco de Goya, La Monomane du jeu de Théodore Géricault, Fou de peur de Gustave Courbet. Côté objets : des psautiers ornés de petites créatures farfelues accrochées aux rinceaux végétaux ou nichées dans les initiales des textes, une statue de Vierge folle au sourire disgracieux, un aquamanile où la belle Phyllis chevauche Aristote, un porte-serviette aux mains baladeuses, un jeu d’échecs avec des derrières à l’air, des cartes à jouer colorées, des grelots en céramique et en métal, des médailles à l’effigie de Triboulet et Coquinet – bouffons célèbres de monarques célèbres –, des gobelets à tête de fou et des marottes en tous genres. Au total, 300 œuvres viennent illustrer les différentes facettes du fou, cette figure emblématique du Moyen Âge et de la Renaissance dont l’accoutrement, les gestes, les mimiques et les regards semblent avoir fait le lien entre le religieux et le profane, le sérieux et le dérisoire, la lucidité et l’aveuglement, dans un monde codifié jusque dans les délires de son renversement carnavalesque.
L’affiche de l’exposition donne le ton, avec ce Portrait de fou regardant entre ses doigts (1548). Vêtu d’un manteau moitié jaune, moitié rouge, avec capuche à oreilles d’âne et crête de coq, un fou plutôt sympathique nous regarde en souriant à travers les doigts de sa main gauche. Son regard rieur contraste avec la mine peu engageante qui surmonte sa marotte[1]. Il tient